Jean-Luc Mélenchon, dimanche 23 avril. | CYRIL BITTON / FRENCH POLITICS POUR LE MONDE

Drôle d’ambiance au bar Belushi’s, dans le 10arrondissement de Paris, où les partisans de Jean-Luc Mélenchon auront balancé entre joie et tristesse. Il aura fallu attendre 22 heures pour que le candidat de La France insoumise prenne la parole à la tribune. Depuis l’annonce des premiers résultats, son équipe ne reconnaît en effet pas les premières estimations, qui le donnent au coude-à-coude pour la troisième place avec François Fillon, juste à quelques points derrière Marine Le Pen. A l’extérieur de la salle où il a donné rendez-vous à ses partisans, ces derniers crient : « Résistance, résistance ! » Un peu plus tôt, une Marseillaise avait été entonnée.

Peu après 20 heures, le député européen s’est fendu d’un message sur Facebook :

« Nous ne validons pas le score annoncé sur la base des sondages. Les résultats des grandes villes ne sont pas encore connus. J’appelle à la retenue et les commentateurs à la prudence. »

A la tribune, la gorge serrée par l’émotion, il semble pourtant reconnaître à demi-mot sa défaite :

« Le résultat annoncé depuis début de la soirée n’est pas celui que nous espérions. » Il s’empresse d’ajouter : « En toute hypothèse, ce ne sera pas celui qui a été annoncé qui sera le bon. Le ministère de l’intérieur a réservé sa déclaration jusqu’à ce soir minuit. »

Doutes sur les estimations

Auparavant, son directeur de campagne, Manuel Bompard, avait rappelé qu’en 2012, le score de Marine Le Pen avait été annoncé à 20 % avant d’être ramené à 17,9 % des voix. Il avait appelé à ce que « cessent les pressions pour nous faire entériner un résultat de sondage ». Un peu plus tard, ce dernier précise qu’ils attendront minuit avant de se prononcer définitivement.

Un autre lieutenant de M. Mélenchon, Gabriel Amard, se montre aussi circonspect. Les yeux rivés sur son téléphone, il scrute les remontées qui lui sont envoyées, affichant sa stupeur :

« Je n’arrive pas à comprendre qu’on tue le match entre Marine Le Pen et Mélenchon, il y a quelque chose qui cloche. »

Les sympathisants de La France insoumise, le 23 avril au soir, après l’annonce des premiers résultats. | CYRIL BITTON / FRENCH POLITICS POUR LE MONDE

Au micro, M. Mélenchon critique « les médiacrates et les oligarques » qui « jubilent ». « Rien n’est si beau pour eux qu’un second tour entre deux candidats qui approuvent et veulent prolonger les deux les institutions actuelles, qui n’ expriment aucune prise de conscience écologique (...) et qui, les deux, comptent s’en prendre, une fois de plus, aux acquis sociaux les plus élémentaires du pays », dénonce-t-il, renvoyant dos à dos les deux finalistes annoncés.

Consultation des militants

A cette heure, le député européen ne donne aucune consigne de vote. Comme l’avait annoncé son équipe ces dernières semaines, le candidat précise qu’il consultera les 450 000 personnes qui ont « appuyé » sa candidature sur sa plate-forme Internet, jlm2017.fr. « Chacun, chacune d’entre vous sait en conscience quel est son devoir. Dès lors, je m’y range », déclare-t-il, en affirmant n’avoir reçu « aucun mandat » de ces signataires.

Dimanche soir, la question qui serait posée n’avait pas encore été finalisée. Si les résultats se confirment, le choix devrait cependant être donné entre un appel à voter pour M. Macron, une abstention, un vote blanc ou une absence de consigne. Le verdict devrait être annoncé mardi, selon M. Bompard.

Quelques minutes après avoir terminé sa courte déclaration, le candidat de La France insoumise, que l’on pensait retranché avec ses proches, traverse la salle pour venir saluer une dernière fois la foule massée à l’extérieur. « A vous, jeunes gens, de reprendre le flambeau à l’endroit où je vous l’aurai tendu, donné », lance-t-il sous les applaudissements du public, qui lui répond par de chaleureux « mercis ». Et de lancer :

« Nous sommes La France insoumise maintenant et pour toujours ! »