Olivier Zarrouati, le président du directoire de Zodiac. | Charles Platiau / Reuters

Le rouge est mis pour Zodiac Aerospace ! Avec une semaine de retard sur le calendrier prévu, l’équipementier pour l’aéronautique a été contraint d’annoncer, vendredi 28 avril, une perte de 24 millions d’euros à l’occasion de la publication de ses résultats du premier semestre achevé le 31 mars. Une onzième contre-performance d’affilée en trois ans.

A pareille époque il y a un an, le fabricant de fauteuils d’avion affichait encore un bénéfice de 44 millions d’euros. C’est toujours son activité de fabrication de sièges et de toilettes qui a fortement « impacté » ses résultats. Le groupe a ainsi subi des surcoûts de l’ordre de 200 millions d’euros. Il n’en fallait pas plus pour que le résultat opérationnel courant du groupe pique du nez avec une perte de 12 millions d’euros contre un solde positif de 80 millions d’euros il y a un an.

Ces mauvais résultats ont fait tomber de son siège Olivier Zarrouati, le président du directoire de Zodiac. Le patron du groupe a remis son mandat. « Après autant de “profit warnings” [avertissements sur résultats], cela aurait même dû arriver avant », signale un dirigeant du secteur qui préfère rester anonyme. The Children’s Investment (TCI), turbulent actionnaire de Safran et (un peu) de Zodiac, n’a pas hésité a réclamé « le remplacement complet du management de Zodiac ».

M. Zarrouati a précisé qu’il conservait ses fonctions le temps de boucler les négociations autour de la vente de Zodiac au motoriste Safran. Le patron du directoire a reconnu qu’elles affrontaient « quelques vents contraires ». Pour y faire face, Zodiac a recruté Yann Delabrière, ancien PDG de l’équipementier automobile Faurecia comme « conseiller spécial ».

Sa mission sera de mener à bien la restructuration en cours de l’équipementier. Il aura aussi pour tâche de travailler à un « scénario alternatif » au rachat de Zodiac par Safran. Faute de s’entendre avec le motoriste, M. Zarrouati n’exclut pas que Zodiac continue en « stand alone ». Seul, autrement dit. C’est le sens de la lettre que le président du conseil de surveillance, Didier Domange, a adressé ce week-end, selon nos informations, aux familles propriétaires.

« La concurrence s’intensifie »

Cette posture de négociation répond à la volonté de Safran de revoir les conditions de l’offre ficelée en janvier, avant la publication de résultats bien plus mauvais que prévus de Zodiac. Autant dire que le groupe peut faire une croix sur les 10 milliards d’euros annoncés à l’origine. Pas certain non plus que Safran soit toujours disposé à consentir des conditions avantageuses aux actionnaires familiaux de l’équipementier. L’offre avait été structurée pour leur permettre des exonérations fiscales liées au pacte Dutreil. Pour se décider, Safran va étudier le plan de développement « à moyen terme » que Zodiac devait lui faire parvenir vendredi, ce qui lui permettra de déterminer la valeur de sa cible à horizon 2020.

De son côté, le fonds TCI maintient la pression pour amener Safran à durcir le plus possible ses conditions. Lundi, Chris Hohn, le fondateur du plus célèbre fonds activiste européen, a adressé une nouvelle lettre à Ross McInnes, le président du motoriste, où il estime désormais la valeur de l’action Zodiac à 10 euros, à comparer aux plus de 29 euros proposés à l’origine. En février, TCI évoquait un prix de 20 euros…

Le financier tient compte de la déception sur les résultats mais il se fonde également sur une étude menée auprès de clients, de salariés ou d’experts de l’aéronautique, dont les conclusions, selon lui, jettent une ombre sur les perspectives du fabricant de sièges. « La concurrence s’intensifie de façon significative sur le marché des intérieurs d’avions. En plus de perdre des parts de marché, Zodiac va faire face à une pression accrue sur les prix qui va pénaliser le redressement de ses marges », assure ainsi le financier qui pointe également la menace de pénalités élevées à verser à Boeing ou à Airbus après les retards de livraison. Cette campagne agace au plus haut point Zodiac qui a décidé selon plusieurs sources d’assigner TCI pour « dénigrement ».

Si la proie veut accréditer l’idée qu’elle n’a pas besoin de Safran, son prétendant échaudé le lui rend bien. En janvier, Safran avait prévenu que l’intégration de Zodiac justifiait un changement de statut pour permettre à Philippe Petitcolin, le directeur général du motoriste, de réaliser un nouveau mandat de trois ans. L’assemblée générale extraordinaire du 15 juin se voit proposer de repousser la limite d’âge du directeur général et du directeur général délégué de 65 à 68 ans. Que le rachat de Zodiac se fasse ou non.