Le pape François lors de la conférence de presse qu’il a donné dans l’avion qui le ramenait d’Egypte, le 29 avril. | POOL / REUTERS

Interrogé sur l’élection présidentielle française, dans l’avion qui le ramenait d’Egypte, où il venait d’effectuer une visite de 27 heures en soutien aux chrétiens du pays, le pape François a refusé de s’immiscer directement dans le choix pour le second tour, samedi 29 avril.

Cependant, à sa manière, le chef de l’Eglise catholique a donné quelques pistes en répondant à la question, qui lui était posée, de savoir s’il pouvait donner des « éléments de discernement aux électeurs catholiques » français, alors même qu’il avait évoqué, la veille, à l’université Al-Azhar, au Caire, les risques des « populismes démagogiques ».

« Sur la France, a-t-il répondu, je vous le dis sincèrement : je ne saisis pas bien la politique intérieure française. J’ai cherché à avoir de bons rapports avec le président Hollande. Il y a eu un conflit autrefois [sur le mariage pour tous, puis sur la nomination de l’ambassadeur de France près le Vatican], mais on a pu en parler. Des deux candidats [du second tour de la présidentielle], je ne connais pas l’histoire. Je sais que l’un représente la droite forte mais l’autre, je ne sais pas qui il est, alors je ne peux pas donner une opinion. »

Et François a ajouté :

« Parlant des catholiques, un homme m’a dit : Mais pourquoi vous ne pensez pas à la politique en grand ? A faire un parti pour les catholiques ? Ce monsieur était quelqu’un de bien, mais il vit dans un autre siècle ! »

Avant d’apporter cette réponse, le souverain pontife avait expliqué ce qu’il entendait par « populisme ». « Il y a une dimension des populismes… Vous savez que ce mot, j’ai dû le réapprendre parce qu’en Amérique du sud, il a une autre signification. Il y a le problème de l’Europe. (…) Chaque pays est libre de faire son choix devant cette question. Je ne peux juger si ce choix est fait pour ce motif de l’Europe ou pour un autre, je ne connais pas la politique interne. Ce qui est vrai, c’est que l’Europe est en danger, je l’ai dit au prix Charlemagne [qui lui a été décerné en mai 2016] et récemment sans nuances. Nous devons méditer là-dessus : il y a un problème sur l’Europe, c’est les migrants, mais n’oublions pas que l’Europe a été faite par les migrants. C’est un problème que l’on doit bien étudier. »

  • Sur les camps de migrants

Le pape a également répondu à une question sur les camps de migrants. Il y a quelques jours, il avait parlé de « camps de concentration » à propos de certains camps de migrants. Invité par un journaliste allemand à préciser sa pensée, il a apporté cette réponse :

« Je n’ai pas commis de lapsus. Il y a des camps de concentration, excusez-moi, des camps de réfugiés qui sont des camps de concentration. Il y en a en Italie et dans d’autres endroits. En Allemagne, non, c’est sûr. Mais pensez : que font ces gens qui sont enfermés et qui ne peuvent sortir ? Pensez à ce qui s’est passé dans le nord de l’Europe quand des réfugiés voulaient aller en Angleterre en traversant la mer. Ils sont enfermés à l’intérieur ! »

« Quelque chose m’a fait rire et cela, c’est un peu la culture italienne. Cela m’a fait rire ! Cela se passe dans un camp de réfugiés en Sicile et celui qui me l’a raconté est un délégué de l’action catholique (…) Les chefs de la ville où se trouve le camp ont parlé avec les gens du camp de concentra… du camp de réfugiés. Ils leur ont dit : “Vous, à l’intérieur, cela vous faire du mal pour votre santé mentale. Vous devez sortir, mais s’il vous plaît, ne faites pas de mauvais coups. Nous, nous ne pouvons pas ouvrir la porte. Mais faisons un trou, derrière… Vous sortez, vous faites une belle promenade !” C’est ainsi que se sont créés de bons rapports avec les habitants de ce village, de bonnes relations. Ils ne commettent pas d’actes de délinquance, de criminalité. Le seul fait d’être enfermés, sans rien faire, est un lager, mais cela n’a rien à voir avec l’Allemagne. »

  • Sur le président américain Donald Trump

Interrogé sur le point de savoir s’il allait recevoir Donald Trump en mai, à l’occasion du G7 qui se tiendra en Sicile, à Taormine, comme le président américain a semblé en envisager l’hypothèse récemment : « Je n’ai pas encore été informé par la secrétairerie d’Etat [le ministère des affaires étrangères du Vatican] qu’il y ait eu une demande. Je reçois tous les chefs d’Etat qui formulent une demande. »

  • Sur le président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi

A la question de savoir s’il avait apporté un soutien au président égyptien lors de sa visite au Caire, notamment en affirmant que « la paix, le développement, la prospérité valent tous les sacrifices », il a déclaré : « Il faut interpréter littéralement. J’ai dit défendre la paix, l’égalité des citoyens quelle que soit leur religion. Ce sont des valeurs, j’ai parlé des valeurs. Qu’un dirigeant défende l’une ou l’autre, c’est un autre problème. J’ai entendu : “Mais le pape va soutenir le gouvernement en se rendant là-bas.” Parce qu’un gouvernement a toujours ses faiblesses et adversaires politiques. Moi je n’interviens pas, je parle des valeurs, et chacun voit si tel gouvernement de tel Etat favorise ces valeurs. »