Tout au long de la campagne présidentielle, Donald Trump n’a cessé d’évoquer « l’accord ultime » que représente selon lui une paix israélo-palestinienne. Il a utilisé cette formule après son élection, dans un entretien accordé au Wall Street Journal, le 11 novembre, puis évoqué un « grand accord de paix » à l’occasion de la visite à Washington du premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, le 15 février.

Il devrait être à nouveau question de cet objectif, que de nombreux experts du conflit israélo-palestinien jugent hors d’atteinte, lors de la réception du président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, à la Maison Blanche, mercredi 3 mai. Ce dernier pourra alors mesurer le changement intervenu à Washington. Les deux mandats de M. Obama avaient été marqués par des relations conflictuelles avec M. Nétanyahou, elles sont désormais au beau fixe, aux dépens des Palestiniens.

Dans un entretien accordé à l’agence Reuters, le 27 avril, M. Trump n’a pas caché ses ambitions : « Je veux voir la paix avec Israël et les Palestiniens. Il n’y a aucune raison qu’il n’y ait pas de paix entre Israël et les Palestiniens, aucune. »

Le nouveau président des Etats-Unis n’est pas le premier à s’attaquer à ce dossier lancinant, mais il n’a pas tracé pour l’instant de perspectives claires. Réputé pour son peu d’intérêt pour les détails de la diplomatie, il a même donné l’impression, lors de la visite de M. Nétanyahou, d’abandonner la solution des deux Etats, qui consiste en la création d’un Etat palestinien aux côtés d’Israël, du fait d’une formulation hasardeuse.

Déplacement promis de l’ambassade

Deux proches de l’ancien magnat de l’immobilier sont officiellement à la manœuvre : son ancien conseiller juridique Jason Greenblatt et surtout son gendre, Jared Kushner. La nomination comme ambassadeur des Etats-Unis en Israël d’un soutien fervent de la colonisation israélienne dans les territoires occupés, David Friedman, s’est accompagnée du maintien au Conseil de sécurité national de l’experte chargée du dossier israélo-palestinien au sein de l’administration précédente, Yael Lempert, une diplomate de carrière.

De même, l’objectif du déplacement promis de l’ambassade des Etats-Unis de Tel Aviv à Jérusalem ne semble plus une priorité. Une telle décision, considérée comme inacceptable pour les Palestiniens, pourrait enterrer prématurément les espoirs de M. Trump.

Interrogé à ce sujet par Reuters, le président a esquivé en conseillant aux journalistes de l’interroger à nouveau à ce sujet « dans un mois ». Début juin, M. Trump sera confronté à une échéance : celle de geler pour six mois supplémentaires une loi votée par le Congrès il y a plus de vingt ans en faveur du transfert de l’ambassade. Sa décision coïncidera par ailleurs avec le cinquantième anniversaire de la conquête par Israël de la Cisjordanie et de Gaza lors de la guerre de 1967. Une visite en Israël en mai, présentée comme une hypothèse dans l’entretien de Reuters, pourrait servir de compensation.

Abbas remis en selle

Lors de la visite de M. Nétanyahou, M. Trump avait rappelé qu’une négociation réussie suppose que « les deux parties fassent des concessions ». Si l’administration américaine a rappelé son opposition à la construction dans les colonies situées à l’est de la « barrière de sécurité » érigée unilatéralement par Israël en Cisjordanie, sans succès pour l’instant, elle n’a pas encore indiqué ce qu’elle pourrait demander au président de l’Autorité palestinienne, même si elle a souhaité une plus grande implication de ses alliés sunnites traditionnels (Arabie saoudite, Egypte, Emirats arabes unis, Jordanie).

L’intérêt manifesté par M. Trump pour ce conflit remet pour l’instant en selle M. Abbas, au point d’avoir les honneurs de la Maison Blanche. Il oblige aussi ce dernier à apparaître de bonne volonté, sous peine de mesures de rétorsion, notamment du Congrès, où a été déposé un projet de loi suspendant l’aide américaine tant que l’Autorité palestinienne versera des fonds aux familles de responsables d’attentats anti-israéliens.

M. Abbas pourrait renoncer plus facilement à sa stratégie d’internationalisation du conflit, notamment aux Nations unies, très mal vue à Washington, mais son impopularité en Cisjordanie et à Gaza ne le place cependant pas en position de force face à M. Trump.