Un rassemblement de soutiens du Hamas devant l’université de Birzeit, le 26 avril. | ABBAS MOMANI / AFP

Les élections étudiantes, en Cisjordanie, présentent un intérêt politique majeur. Faute de scrutins nationaux depuis 2006, elles offrent une fenêtre rare de pluralisme et d’expression démocratique. Celles organisées mercredi 10 mai à l’université de Birzeit, près de Ramallah, ont confirmé pour la troisième année consécutive la domination du Bloc islamique, affilié au Hamas. Ce scrutin destiné à pourvoir les 51 sièges du conseil étudiant, au sein de la plus célèbre institution du système éducatif palestinien, ressemble à un nouveau camouflet infligé au Fatah, le parti du président Mahmoud Abbas.

Le Bloc islamique a recueilli 25 sièges, comme en 2016, contre 22 pour le mouvement Chabiba, affilié au Fatah. Ce résultat est d’autant plus significatif que l’Autorité palestinienne (AP) et l’armée israélienne exercent, depuis la fin 2015, des pressions régulières sur les étudiants considérés comme proches du Hamas. L’agence palestinienne Ma’an a ainsi rapporté que l’armée avait arrêté à l’aube, mercredi, avant l’ouverture du vote, trois membres du Bloc islamique, dont le chef de section à l’université, qui avait participé la veille à une réunion publique devant les étudiants.

Une jeunesse désabusée

Le Bloc islamique s’est montré très actif à Birzeit, depuis sa victoire en 2015, pour défendre les préoccupations des étudiants. Il a notamment joué un rôle moteur, en septembre 2016, dans une grève de près d’un mois, pour protester contre la hausse des droits d’inscription voulue par la direction. L’université demeura portes closes pendant tout le mouvement, et la direction finit par réduire ses ambitions. Mais le Bloc islamique a aussi profité du discrédit dont souffre l’Autorité palestinienne parmi la jeunesse, profondément désabusée. « Le problème du Fatah, c’est qu’il doit toujours défendre les positions de l’AP, qui sont très impopulaires, comme la coordination sécuritaire avec Israël ou bien les négociations de paix », explique Ghassan Khatib, professeur adjoint en études internationales et ancien ministre du travail.

Même la grève de la faim des prisonniers palestiniens, entrée dans son 23e jour et très soutenue par le Fatah, n’a pas permis à son mouvement de jeunesse d’en tirer partie aux élections. Le pessimisme est généralisé au sein de la société palestinienne. Selon une étude publiée en mars par le Palestinian Center for Policy and Survey Research, 60 % des personnes interrogées estiment que la solution à deux Etats n’est plus viable en raison de l’expansion des colonies. Ils sont 64 % à souhaiter la démission de Mahmoud Abbas.

Il est toutefois à noter que cette victoire du Hamas à l’université de Birzeit, qui compte près de 11 000 étudiants, ne témoigne pas d’une tendance générale au sein des établissements supérieurs palestiniens. En avril, deux d’entre eux – de taille bien moindre – avaient donné leur préférence aux représentants du parti au pouvoir. Lors du scrutin de l’université An-Najah de Naplouse, le Fatah s’est emparé de 41 sièges, contre 34 au Hamas. Le score était aussi de 19 contre 11 en faveur du Fatah à l’Université polytechnique de Hébron. Mais les experts palestiniens estiment que le scrutin à Birzeit présente bien plus de garanties de transparence et de rigueur qu’ailleurs.