L’équipe de France est encore en course pour une qualification en quarts de finale de son Mondial. | GRIGORY DUKOR / REUTERS

Que l’équipe de France de hockey sur glace perde d’entrée lors de son Mondial à domicile contre la Norvège samedi 6 mai (3-2), qu’elle bouleverse la hiérarchie de son sport en écrasant la Finlande le dimanche (5-1), en un jour phagocyté par l’élection d’un nouveau président, ou qu’elle vienne à bout mardi aux penaltys du voisin suisse, l’écho médiatique reste pour le moment encore modeste pour la 14e nation mondiale.

Avant d’affronter les ténors canadiens, jeudi à 20 h 15, les Bleus, quatrièmes (sur huit) du groupe B, sont en course pour une nouvelle qualification en quarts de finale, trois ans après le Mondial biélorusse.

Si les résultats sportifs restent le principal levier pour accroître la popularité du hockey sur glace, qui ne compte que vingt mille licenciés en France, cinq internationaux expatriés débordent d’arguments pour convaincre de l’intérêt de leur discipline. Revue de détail.

  • Le hockey, c’est l’fun

Comme on dit au Québec, où la majeure partie de la population est fondue de crosse et de rondelle, le hockey c’est l’fun ! « C’est un sport incroyable et tellement complet. Il faut venir voir un match avec l’esprit ouvert. Il y a de l’action, on ne peut pas s’ennuyer avec des shoots toutes les vingt secondes et des mises en échec spectaculaires », plaide Floran Douay, le cadet à 22 ans de l’équipe de France.

« C’est le “sport co” qui va le plus vite », renchérit Stéphane Da Costa, le talentueux centre du CSKA Moscou.

  • Le hockey, c’est la solidarité

Pour Teddy Da Costa, aujourd’hui en République tchèque après être passé par la Pologne et la Finlande, l’état d’esprit du hockey n’est comparable à nul autre sport collectif : « Tu protèges tes amis en permanence. Même si un type plus grand et plus balèze cherche des crosses à l’un de tes coéquipiers, tu arrives toujours en soutien. Tu fais en sorte d’éviter par exemple qu’il se fasse attraper par un deuxième adversaire. C’est comme ça le hockey. Il y a une solidarité et un esprit à part. »

Stéphane Da Costa a déjà inscrit quatre buts pour les Bleus. | GRIGORY DUKOR / REUTERS

  • Le hockey, c’est pas cher et ça peut rapporter vite

Ancien joueur de la Ligue nationale de hockey nord-américaine (NHL), meilleur championnat au monde, Stéphane Da Costa, auteur de quatre buts depuis le début du tournoi, se fait pragmatique. « Je voudrais dire que l’équipement n’est pas si cher. Les clubs aident et fournissent de plus en plus jeune le matériel. Et puis, tu peux devenir professionnel plus facilement car il y a moins de concurrence que dans d’autres sports. »

  • Le hockey, ça fait voyager

Sur les vingt-cinq joueurs qui composent l’équipe de France de hockey, ils ne sont que neuf à disputer le championnat de France (six à Rouen, deux à Bordeaux et un à Gap), connu sous le nom de Ligue Magnus — du nom du Français Louis Magnus, patineur artistique mais aussi fondateur de la Fédération internationale de hockey sur glace au début du XXe siècle. Cinq autres Bleus jouent en Suisse, trois en NHL, deux au Danemark et d’autres en Finlande, en Autriche, en Hongrie, en Chine ou encore en Russie.

Antoine Roussel s’est expatrié à l’âge de 15 ans au Canada dans le sillage de ses parents, qui avaient choisi de s’installer au Québec, berceau du hockey. « Le hockey français est un peu dans la situation du basket dans les années 2000. Il n’y avait à l’époque qu’un ou deux Français en NBA, maintenant ils sont plus d’une dizaine. Le fait que nous soyons trois à jouer en NHL, ça permet de faire rêver quelques enfants, de leur montrer que c’est possible », explique, avec l’accent québécois, l’ailier gauche de 27 ans.

Pierre-Edouard Bellemare a passé neuf ans en Suède avant d’atteindre le plus haut niveau en NHL, aux Flyers de Philadelphie. Son expérience suédoise l’a façonné et lui a « presque réappris » son sport, comme il le dit lui-même. C’est là-bas qu’il est devenu un spécialiste de la phase de jeu en infériorité numérique (penalty killing), cruciale au hockey.

Pierre-Edouard Bellemare ne se laisse pas faire face aux solides Finlandais. | FRANCK FIFE / AFP

« A notre époque, il était obligatoire de s’expatrier. A l’étranger, loin de la famille, des tentations avec les copains, tu te sacrifies plus pour ton sport. Tu te frottes à une mentalité différente. Tu apprends une façon de jouer spécifique au bloc auquel tu appartiens… », souligne l’ancien joueur des Dragons de Rouen.

Le Haut-Savoyard Floran Douay, formé en Suisse, dont la Ligue est l’une des meilleurs du monde, est impressionné par la culture hockey de son pays d’adoption : « Dans la rue, toutes les cinq minutes, je vois des gamins avec une crosse. Les patinoires font le plein. Les Suisses ont la vignette de leur équipe collée sur le coffre de leur voiture ».

Finland - France | Highlights | #IIHFWorlds 2017

  • Mais le hockey, ça pourrait être encore plus le fun

Parti à 21 ans pour la Suède avec un titre de champion de France avec Rouen, Pierre-Edouard Bellemare est un témoin attentif de l’évolution de la Ligue Magnus, remportée cette année par les Rapaces de Gap. Il trouve qu’elle a déjà « bien évolué », passant de vingt-six à plus de soixante-dix matches par saison pour chaque équipe : « Tu n’es pas pris au sérieux au niveau mondial avec vingt-six matchs », observe-t-il.

Mais la Ligue Magnus pourrait encore être améliorée en mettant des patinoires à disposition des clubs. Le joueur de Dallas Antoine Roussel dénonce le cercle vicieux par lequel le manque de moyens induit un faible nombre de licenciés : « Le rôle de la Fédération française est de développer le hockey, mais elle n’a pas la main sur la construction des patinoires. Il n’est pas normal qu’une belle ville comme Bordeaux n’ait par exemple qu’une seule patinoire. Il est compliqué pour des familles de se dire : “On met les enfants au hockey et on se coltine une heure et demie de trajet derrière.”»