Lors d’une manifestation contre le limogeage du directeur du FBI,  James Comey, par Donald Trump, le 10 mai, à Los Angeles. | DAVID MCNEW / AFP

Editorial du « Monde ». Washington vit l’une de ces tempêtes politiques que la capitale des Etats-Unis affectionne tout particulièrement. L’affaire témoigne d’une administration républicaine plus chaotique que jamais depuis l’élection de Donald Trump à la Maison Blanche. Plus grave, ce nouveau « scandale » des bords du Potomac conduit à s’interroger sur l’attachement du 45président de l’Union américaine à la ­démocratie.

Par une lettre de quatre lignes signifiant à James Comey qu’il était incapable d’assurer sa mission, M. Trump a limogé, mercredi 10 mai, le directeur de la police fédérale (le FBI). Celui-ci supervisait, avec une fermeté renouvelée, une enquête ayant la particularité d’exaspérer le président – parce qu’elle pourrait le concerner directement. Il s’agit de déterminer si la Russie a joué un rôle dans la campagne électorale de 2016. ­L’enquête porte ainsi sur de possibles relations entre des officiels russes à Washington et certains membres de l’équipe du candidat Trump.

C’est la première fois depuis le scandale du Watergate – qui conduisit Richard Nixon à démissionner à l’été 1974 – qu’un président licencie un directeur du FBI menant une investigation susceptible de l’impliquer. Si toute l’opposition démocrate, minoritaire dans les deux Chambres du Congrès, dénonce une décision arbitraire et contraire au jeu de la démocratie, nombre d’élus républicains s’interrogent aussi sur le bien-fondé du coup de tête de M. Trump.

Celui-ci a toujours nié la moindre complicité avec la Russie durant la campagne présidentielle. Son entourage qualifie de chasse aux sorcières l’enquête poursuivie par le FBI. Les proches du président démentent, notamment, le moindre lien avec les auteurs du piratage des ordinateurs du quartier général des démocrates, attribué à des hackeurs russes par l’ensemble des services de renseignement américains. Certains des courriels rendus publics faisaient apparaître la candidate démocrate, Hillary Clinton, sous un jour peu favorable – comme si quelqu’un avait intérêt à ternir son image.

L’impression donnée d’avoir quelque chose à cacher

Le problème, en ce qui concerne M. Trump, est qu’il donne sans cesse l’impression d’avoir quelque chose à cacher quand il s’agit de ses relations avec la Russie. Personne n’a jamais compris ses multiples déclarations d’admiration à l’égard de Vladimir Poutine. Inévitablement, les questions vont bon train concernant de possibles liens d’affaires avec des banques russes de la part d’un président qui est le premier à refuser de rendre publique sa déclaration de revenus. Un minimum de transparence fiscale de sa part atténuerait singulièrement les soupçons.

En attendant, le Congrès poursuit, de son côté, sa propre enquête sur le rôle éventuel de la Russie dans la campagne 2016. M. Trump doit nommer un nouveau directeur du FBI. Si celui-ci choisit d’abandonner le « dossier russe », l’affaire rebondira de plus belle. D’où l’insistance avec laquelle les démocrates et certains républicains réclament au ministère de la justice la nomination d’un procureur spécial pour aller au bout de cette enquête.

M. Trump a déjà attaqué les juges, quand ils se sont opposés à ses projets sur l’immigration. Il a insulté les services de renseignement du pays. Il ne se passe pas une semaine sans qu’il agresse la presse. Washington vit ainsi au rythme des foucades et des Tweet d’un président autour duquel plane cette question : est-il capable de respecter ce jeu subtil de pouvoirs et contre-pouvoirs caractérisant la démocratie américaine ?

Pourquoi Donald Trump a renvoyé le directeur du FBI
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