Dans une classe de Vertou (Loire-Atlantique), en septembre 2016. | LOIC VENANCE / AFP

La réforme des rythmes scolaires, qui a rétabli dans la douleur, en janvier 2013, les neuf demi-journées de classe par semaine, sera-t-elle déverrouillée cet été par un nouveau décret ? Les villes s’interrogent et guettent le Journal officiel. Au fil des déclarations de campagne, Emmanuel Macron s’est engagé à lever les « contraintes » qui pèsent sur l’organisation actuelle.

« L’idée serait d’ouvrir des concertations tripartites au niveau local, entre les communes, l’éducation nationale au niveau déconcentré et les enseignants, expliquait-on dans son entourage ces dernières semaines. Il ne s’agit évidemment pas que les communes dictent aux écoles l’organisation de leur temps scolaire. » Quid de la demi-journée de classe supplémentaire ? Des trois heures d’accueil périscolaire qui incombent, en plus, aux collectivités depuis trois ans ? « Elles seront supprimées ou conservées selon l’accord trouvé entre les parties prenantes. »

Une manière de se défausser sur les communes ? « Sur le principe, les maires ne sont pas contre le fait qu’on puisse leur laisser carte blanche… à condition que la proposition ne masque pas un désengagement de l’Etat », réagit Agnès Le Brun, maire LR de Morlaix (Finistère), et vice-présidente de l’Association des maires de France, en faisant état de 7 élus sur 10 éprouvant des « difficultés persistantes ».

Concertation

C’est là que le bât blesse : à en croire les informations que distille l’entourage d’Emmanuel Macron, les financements de l’Etat pourraient s’interrompre en 2019, sauf pour les communes les plus pauvres. « Il y a une forme d’hypocrisie que de parler de libre choix en faisant planer une suppression des aides de l’Etat, s’énerve Charlotte Brun, adjointe à l’éducation à la mairie de Lille. Nombre de collectivités n’auraient pas les marges financières pour aller de l’avant. N’est-ce pas une façon de revenir à la semaine de quatre jours en 2019 sans le dire ? », interroge l’élue socialiste.

Grandes ou petites, quelle que soit leur couleur politique, les villes questionnées n’envisagent pas de « trancher sans concertation ». Probablement pas d’ici septembre, donc. « On ne se positionnera pas sans avoir eu de débat », dit-on à Lille. « Nous attendons le décret pour lancer la réflexion », répond-on à Marseille. « Nous privilégions la stabilité des familles et des partenaires, dans l’attente des décisions au niveau national », glisse-t-on à Lyon. « Sur une question comme l’école, on ne peut pas trancher d’un oui ou d’un non, ni tout détricoter d’un claquement de doigts », souligne-t-on à Montreuil (Seine-Saint-Denis).

« Coût de fonctionnement » et « coût politique »

Du côté des communes isolées, des villages, où l’on pourrait croire qu’un retour en arrière serait plus simple, on ne perçoit pas, a priori, d’effet d’aubaine. C’est au contraire le « coût de fonctionnement » d’une remise à plat de la réforme, « le coût politique » auprès des familles qu’invoquent les élus. « Il faut voir les efforts qui ont été faits par nos édiles pour offrir aux enfants un accueil de qualité, défend Vanik Berberian, maire centriste de Gargilesse-Dampierre (Indre), 350 habitants, et président de l’Association des maires ruraux de France. Il en va de l’attractivité du village, et donc de sa survie. »

Des prises de position engagées, il y en a déjà quelques-unes, dans le sens du maintien comme du retrait. « On est prêts à sortir de la réforme, mais qu’Emmanuel Macron affiche clairement son projet ; trois mois, c’est peu pour se préparer », lance Jean-Michel Fourgous, maire LR d’Elancourt (Yvelines), qui avait pris la tête d’un collectif d’un millier d’élus antiréforme. « Aucune chance qu’à Paris on détricote quoi que ce soit, martèle au contraire Alexandra Cordebard, ajointe de la maire PS, Anne Hidalgo. On est décidés à faire progresser ce qui est une réforme de justice sociale. » Dans la capitale, où les enseignants étaient à la pointe de la contestation aux premières heures du quinquennat, plus de 90 % des écoliers fréquentent aujourd’hui, deux fois par semaine, les ateliers périscolaires.