Bannière officielle du 70e Festival de Cannes sur la façade du Palais des festivals à Cannes, le 15 mai 2017. | VALERY HACHE / AFP

Le 70e Festival de Cannes se tient au palais des Festivals et des Congrès, du 17 au 28 mai, sous la présidence du cinéaste espagnol Pedro Almodovar. Comment naquit ce grand événement de renommée mondiale et comment fonctionne-t-il depuis ?

  • Quelle est l’origine du festival ?

Le Festival de Cannes est créé en réaction à la Mostra de Venise, première compétition internationale dédiée au 7e art, qui, en juillet 1938, couronne, sous la pression du dictateur allemand Adolf Hitler, le documentaire nazi Les Dieux du stade, de Leni Riefenstahl, et aussi le film italien Luciano Serra, pilote, de Goffredo Alessandrini. En France, on pense alors organiser un festival affranchi des contraintes des pays totalitaires et à destination des démocraties libres. A l’automne 1938, Jean Zay, alors ministre de l’éducation nationale français, et Albert Sarraut, ministre de l’intérieur, soutiennent l’idée d’un festival de cinéma.

En juin 1939, les médias annoncent la création officielle d’un festival de cinéma en France, soutenu par plusieurs pays, Etats-Unis en tête. Il s’agit alors de lui trouver un cadre prestigieux : Biarritz est d’abord retenue sur une liste d’une dizaine de villes françaises, mais c’est finalement Cannes qui remporte l’implantation. Le 31 mai 1939, la station balnéaire des Alpes-Maritimes et le gouvernement signent la naissance officielle du Festival international de cinéma.

  • De quand date le premier festival ?

Le premier Festival de Cannes devait initialement se tenir du 1er au 20 septembre 1939 dans la salle du casino municipal, mais le 1er septembre 1939, les Allemands envahissent la Pologne. Le 3 septembre, la guerre est déclarée et le Festival ne peut pas avoir lieu. Il faut attendre sept années et la sortie de la guerre pour qu’il voie finalement le jour. La première édition effective remonte donc à 1946, elle se tient du 20 septembre au 5 octobre. Dix-huit pays sont représentés dans la sélection officielle, contre vingt-neuf en 2017.

A l’époque, certaines stars arrivent en hydravion ! Le prix du jury international et celui de la mise en scène couronnent La Bataille du rail, de René Clément. L’actrice française Michèle Morgan reçoit le grand prix international de la meilleure interprétation féminine pour son rôle dans La Symphonie pastorale, de Jean Delannoy.

  • Qu’est-ce que la Palme d’or ?

C’est le prix le plus prestigieux du Festival de Cannes. Une palme par référence aux armoiries de la ville et à ses palmiers. Elle n’a pas été dessinée par Cocteau, comme le veut la légende, mais par la joaillière Suzanne Lazon. Soixante-dix ans d’histoire du cinéma ont vu défiler réalisateurs et stars les plus prestigieux et des palmes ont été remises couronnant des chefs-d’œuvre du monde entier.

Mais cela n’a pas toujours été le cas. De 1947 à 1954, un seul Grand Prix et des prix secondaires sont attribués en fonction de la qualité des films par un jury exclusivement composé de personnalités françaises. C’est en fait à partir de 1955 qu’un jury composé de personnalités étrangères et appartenant au cinéma décerne la première Palme d’or de l’histoire du Festival au film Marty, de Delbert Mann.

Pour les 70 ans du Festival de Cannes, la Palme d’or sera sertie de diamants. Ce trophée de la maison Chopard, d’une valeur de plus de 20 000 euros, est offert par la célèbre maison de joaillerie en échange d’un partenariat.

  • Le festival a-t-il toujours eu lieu depuis 1946 ?

Le Festival a en fait été parfois annulé ou interrompu. C’est ainsi que différents blocages sur des questions sensibles (financement, relations avec le festival de Venise..) conduiront à l’annulation des festivals de 1948 et 1950.

Le Festival de Cannes 1968 débute bien, mais il est interrompu le 19 mai par les troubles liés aux événements sociaux de mai.

  • Combien de films sont sélectionnés en 2017 ?

Dix-neuf films sont en compétition officielle cette année pour la Palme d’or à Cannes, mais ce sont des dizaines d’autres œuvres qui seront projetées durant le Festival, dans quatre autres sections :

  1. Un certain regard regroupe des œuvres originales et audacieuses dans leur propos et leur esthétique. Il récompense souvent des cinéastes peu connus.
  2. Le Hors-compétition propose des films événements. D’après une histoire vraie, de Roman Polanski, est notamment très attendu pour cette édition.
  3. Les Séances spéciales et Séances de minuit offrent une exposition à des œuvres plus personnelles.
  4. Cannes Classics met en valeur des films du patrimoine en copies restaurées.

Par ailleurs, neuf films, dont un d’animation, concourront pour la Palme d’or 2017 du court-métrage. D’autres films courts sont présentés dans le cadre de la Quinzaine des réalisateurs et de la Semaine de la critique.

  • Qui juge les films ?

S’agissant de la sélection officielle, un jury prestigieux, présidé par le réalisateur, scénariste et producteur espagnol Pedro Almodovar, est composé de huit professionnels du cinéma (quatre hommes et quatre femmes) comme la comédienne française Agnès Jaoui, l’actrice américaine Jessica Chastain ou encore le réalisateur sud-coréen Park Chan-wook. Le palmarès sera révélé dimanche 28 mai au cours de la cérémonie de clôture, à l’issue de laquelle sera projetée la Palme d’or, en présence de l’équipe du film récompensé.

Différents jurys auront à départager les participants aux autres compétitions. Ainsi l’actrice américaine Uma Thurman préside-t-elle cette année le jury d’Un certain regard. Le cinéaste représentant de la « nouvelle vague roumaine », Cristian Mungiu, préside, lui, le jury des courts-métrages et de la Cinéfondation — pépinière créée en 1998 par Gilles Jacob de nouveaux talents issus d’écoles de cinéma du monde.

  • Cannes n’est-elle qu’une manifestation artistique ?

C’est aussi une rencontre de l’industrie du cinéma qui attire chaque année de nombreux acteurs, producteurs, réalisateurs et agents. En 2016, la participation au Marché du film a atteint 11 902 accrédités, dont 1 747 acheteurs, pour un total de 5 201 sociétés. En 2017, 3 450 films sont présentés au Marché du film. L’activité économique revêt donc, parallèlement à la dimension artistique, un aspect capital.

Et les prix des logements flambent en conséquence. En 2016, le penthouse de l’hôtel Martinez, 1 000 m², était par exemple facturé 38 200 euros la nuit. Mais les retombées économiques sont beaucoup plus larges. Selon Capital, elles s’élèvent à près de 200 millions d’euros au niveau national.