La salle d’études peuplée de troncs d’arbres où commence le périple | BnF

Après la Grande Bibliothèque de Montréal et le Musée des civilisations du Québec, c’est au tour de la Bibliothèque nationale de France (BnF) d’accueillir, jusqu’au 13 août, l’exposition « La bibliothèque, la nuit ». Particularité, hormis une salle d’introduction présentant quarante œuvres d’art issues des collections de la BnF, il s’agit là d’une exposition virtuelle, une sorte de voyage à la fois immobile et immersif dans le temps et dans l’espace.

Conçue par le metteur en scène canadien Robert Lepage et sa compagnie Ex Machina, cette scénographie insolite prolonge l’essai lumineux d’Alberto Manguel (La bibliothèque, la nuit, Actes Sud, 2006), écrivain et actuel directeur de la bibliothèque nationale de Buenos Aires.

Soit la découverte de dix fabuleuses bibliothèques, réelles, imaginaires ou disparues, chacune représentant une époque, une culture ou une fonction assignée à ces lieux de mémoire. Le périple débute dans une salle d’études peuplée de troncs d’arbre dont les livres ouverts figurent les feuilles. Là, les visiteurs s’équipent d’écouteurs et d’un casque de réalité virtuelle, assis sur des chaises pivotantes afin de profiter pleinement de la vision à 360° degrés qu’offre cette nouvelle technologie (Oculus Rift) réservée jusqu’ici à l’univers des jeux vidéos. Il suffit de fixer son regard sur un logo pour pénétrer dans un monde de papier où circulent des silhouettes en chair et en os

Sanctuaires du savoir

De la bibliothèque d’Alexandrie (Egypte), qui fut l’une des sept merveilles de l’Antiquité, à la récente Megabiblioteca José Vasconcelos à Mexico, cette exposition témoigne à la fois de l’intimité et de l’universalité de ces sanctuaires du savoir, y compris lorsqu’ils ne servent plus que de simple décor, à l’instar de la Bibliothèque universitaire de Copenhague (Danemark) où les visiteurs ont uniquement accès à des textes électroniques, même si les livres physiques demeurent en place, tels des fantômes du temps jadis. « C’est intéressant parce que si on a n’a pas accès au contenu d’une bibliothèque, le lieu même conserve encore un rôle, à tout le moins acoustique. Les étudiants choisissent d’y travailler avec leur ordinateur portable. Comme si le lieu était hanté et perpétuait l’esprit du XIXe siècle, en écho à leurs propres lectures », expliquait Alberto Manguel, de passage à Paris, pour le vernissage, le 15 mai, de cette exposition.

Chacune des dix bibliothèques retenues dans la sélection par Robert Lepage et Alberto Manguel, amis de longue date, fait l’objet d’une séquence vidéo d’une durée de quelques minutes, commentée par l’écrivain. Sur les marches du hall de la bibliothèque qui prendra feu – elle a brûlé pendant la guerre des Balkans –, un violoncelliste interprète l’Adagio en G mineur d’Albinoni.. A la bibliothèque du Parlement (Ottawa, Canada), les oiseaux peints par le naturaliste John James Audubon dans son chef-d’œuvre The Birds of America (1834) prennent leur envol sous la coupole. Dans sa bibliothèque du Nautilus, représentée par une gravure d’époque en noir et blanc, le capitaine Nemo (Vingt mille lieues sous les mers) reçoit un visiteur.

Un voyage intellectuel autant que sensoriel au pays du livre.

Au-delà de cet aspect mélancolique ou féerique, « La bibliothèque, la nuit » offre l’occasion de découvrir des trésors dissimulés aux profanes tels les rayonnages de l’abbaye d’Admont (Alpes autrichiennes) réservés à l’étude des moines, ou de contempler, grâce aux mouvements de caméra, des détails architecturaux de toute beauté : colonnes ioniques, fûts de marbre, arcs-boutants massifs, statues allégoriques (Bibliothèque du Congrès, Washington, la plus grande au monde, avec ses 20 millions d’ouvrages) ou encore la structure de bois pivotante du temple Hase-dera (Kamakura, Japon) qui renferme des sutras bouddhistes. Un voyage intellectuel autant que sensoriel au pays du livre.


Exposition « La bibliothèque, la nuit. Bibliothèques mythiques en réalité virtuelle », jusqu’au 13 août. BnF François-Mitterrand, Quai François Mauriac, 75013 Paris. Du mardi au samedi 10h-19h, dimanche 13h-19h. Entrée : 10,60 €, tarif réduit : 8,60 €. Accessible à partir de 13 ans. Réservation indispensable jusqu’à la veille de la visite sur fnac.com ou sur place le jour de la visite.