Bernard Tapie, en 2013. | FRED DUFOUR / AFP

Nouveau revers judiciaire pour Bernard Tapie. Jeudi 18 mai, la Cour de cassation a définitivement condamné l’homme d’affaires à rembourser les 405 millions d’euros obtenus au terme de l’arbitrage de 2008, dans le cadre de son conflit avec le Crédit lyonnais sur la revente d’Adidas. Dans un arrêt de 120 pages, elle estime que la cour d’appel de Paris a eu raison de le condamner le 3 décembre 2015 à restituer l’intégralité des sommes perçues. « Une somme qui a été payée en exécution d’une décision de justice ou d’une sentence arbitrale qui a été ensuite rétractée doit être restituée », relève la plus haute juridiction.

Cet arbitrage privé a définitivement été annulé en juin 2016. Pour la justice, il était entaché de « fraude » car les relations entre le camp Tapie et l’un des trois juges-arbitres, Pierre Estoup, avaient été à l’époque dissimulées, ce qui avait biaisé la sentence en faveur de l’ancien patron de l’OM.

« Le dossier Adidas est aujourd’hui clos. La question est désormais de savoir comment nous allons recouvrer les 404 millions auxquels s’ajoutent des intérêts considérables : environ 40 millions au 30 novembre 2015 », a réagi Me Jean-Pierre Martel, avocat historique du CDR, organisme chargé de solder le passif du Lyonnais. « Si l’ensemble des actifs connus est un jour vendu au meilleur prix, nous ne recouvrirons pas tout. Reste à savoir s’il y a des actifs cachés », a-t-il ajouté.

Bernard Tapie devra-t-il rembourser immédiatement les sommes perçues ? Il est, à titre personnel, en liquidation judiciaire et ses sociétés ont été placées en procédure de sauvegarde : M. Tapie s’est engagé à rembourser ses dettes et le tribunal de commerce examinera ses promesses le 6 juin. « Cessons de fantasmer avec les 405 millions d’euros », réagit auprès du Monde M. Tapie.

« La vie continue et le combat aussi »

Devant le tribunal de commerce, le camp Tapie avait produit une note d’un avocat fiscaliste, Me Patrick Philip, détaillant les avoirs de l’ancien ministre de la ville. Des 345 millions d’euros accordés en juillet 2008 par un tribunal arbitral, il ne restait plus, à en croire ce document, que 101,5 millions, après paiement des impôts et dettes. Dont 97 millions avaient déjà été saisis par la justice pénale, dans le cadre de l’instruction menée par le juge Serge Tournaire portant sur un éventuel trucage de l’arbitrage. Ce à quoi il faut ajouter les 45 millions perçus par les époux Tapie au titre du préjudice moral, réinvestis pour moitié dans La Provence et le reste dans diverses propriétés.

Selon l’homme d’affaires, il n’est pas question que ses 1 500 employés soient impactés par la décision de la Cour de cassation. « Mes journaux, j’ai mis mes avoirs personnels pour les pérenniser, ils n’ont rien à voir avec l’arbitrage », assure M. Tapie. Qui annonce de nouvelles initiatives judiciaires dans les semaines à venir. « La vie continue et le combat aussi », a ainsi réagi Bernard Tapie auprès de l’AFP. « Nous n’avons pas d’autres choix que de nous tourner vers les juridictions européennes », a estimé de son côté l’un de ses avocats, Me Frédéric Thiriez, sans donner plus de précisions sur les actions envisagées.

L’arbitrage Tapie fait aussi l’objet d’une enquête pénale dans laquelle le parquet de Paris a demandé en mars un procès pour six protagonistes, dont l’homme d’affaires, Pierre Estoup et le PDG d’Orange, Stéphane Richard, à l’époque directeur de cabinet de la ministre de l’économie, Christine Lagarde. Cette dernière, actuelle directrice générale du Fonds monétaire international, a été reconnue coupable de « négligence », mais dispensée de peine par la Cour de justice de la République.