Susana Diaz, Patxi Lopez et Pedro Sanchez, le 15 mai 2017. | PIERRE-PHILIPPE MARCOU / AFP

Le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE), qui s’est déchiré en octobre 2016 sur l’attitude à adopter face au gouvernement conservateur de Mariano Rajoy, doit désigner dimanche 21 mai un nouveau secrétaire général sur fond de bataille pour le leadership sur la gauche espagnole, que lui conteste Podemos.

Pourquoi le PSOE est-il en crise ?

Lors des élections législatives, l’émergence du parti de la gauche radicale Podemos conjuguée à la poussée des centristes de Ciudadanos ont balayé le bipartisme qui organisait la vie politique espagnole depuis le rétablissement de la démocratie. Ces deux nouveaux venus disposent, ensemble, de près d’un tiers des sièges au Congrès des députés (71 pour Podemos et 32 pour Ciudadanos), le PP en contrôle 137 et le PSOE 85. Depuis 2008, le PSOE a perdu 5,8 millions de voix.

Après une longue crise politique, lors de laquelle les groupes politiques n’ont pas réussi à former un gouvernement, le dirigeant du Parti populaire, Mariano Rajoy, a été finalement reconduit au pouvoir en octobre 2016 grâce à l’abstention de députés du PSOE, malgré les innombrables affaires de corruption qui ont touché son parti.

Pour Pedro Sanchez, cette abstention a été « la pire des erreurs ». « La plus grande fracture actuellement est entre les militants et une partie de la direction », a-t-il affirmé jeudi à la radio Cadena SER.

Qui sont les trois candidats à la direction du PSOE ?

  • Pedro Sanchez, hostile au maintien au pouvoir du dirigeant du Parti populaire (PP), avait été élu premier secrétaire du PSOE en 2014, mais il a démissionné en octobre 2016 après avoir été mis en minorité par les instances dirigeantes du parti. Cet économiste madrilène de 45 ans, qui fut conseiller municipal puis député, se prévaut du soutien de la base du parti et cherche à mener une opposition systématique au gouvernement Rajoy pour repositionner le parti « clairement à gauche » et conquérir les électeurs séduits par Podemos. Ses détracteurs rappellent que c’est sous sa direction que le PSOE a obtenu ses pires scores aux législatives de décembre 2015 et juin 2016. Il remet dimanche son mandat en jeu devant 188 000 adhérents.
  • Susana Diaz, 42 ans, présidente de la grande région d’Andalousie, se présente comme sa principale rivale. Elle avait plaidé pour sa part en octobre pour une abstention des députés socialistes sur le gouvernement Rajoy. Sa ligne l’a emporté, permettant à l’Espagne d’éviter de retourner une nouvelle fois aux urnes. Elle rejette tout rapprochement avec Podemos, et défend le « PSOE de toujours ». Sa candidature est soutenue par la vieille garde du parti dont les ex-chefs de gouvernement Felipe Gonzalez et José Luis Rodriguez Zapatero. Susana Diaz, si elle l’emporte, deviendra la première femme à diriger le parti en cent trente-huit ans d’existence.
  • Patxi Lopez, 57 ans, troisième candidat a des chances plus minimes de l’emporter. Avant de devenir l’éphémère président du Congrès des députés en 2016, il avait été le premier président du Pays basque élu sans être issu d’un parti nationaliste.

Quels sont les enjeux pour la gauche espagnole ?

Le PSOE craint de se faire « pasokiser » par Podemos, c’est-à-dire de finir comme le parti socialiste grec (Pasok), jadis très influent, qui a été doublé sur sa gauche par Syriza, le parti d’Alexis Tsipras désormais au pouvoir.

Podemos a d’ailleurs mis la pression sur les socialistes en annonçant le dépôt d’une motion de censure contre le gouvernement Mariano Rajoy vendredi 26 mai. Mais cette initiative est vouée à l’échec car les députés de Podemos ne sont pas assez nombreux, ni soutenus par les autres formations.

Si Pedro Sanchez gagne, il promet une opposition féroce à Mariano Rajoy, qui aura le plus grand mal à faire voter le budget 2017 et n’écarte pas la possibilité de déposer une motion de censure. Susana Diaz n’a quant à elle pas précisé de quelle manière elle comptait s’opposer aux conservateurs.

Ce qui se joue sur la gauche de l’échiquier politique espagnol reflète des batailles similaires engagées dans d’autres pays européens, comme la France où les Insoumis de Jean-Luc Mélenchon ont contribué au cuisant revers du Parti socialiste (PS), Benoît Hamon signant au premier tour de l’élection présidentielle le plus mauvais score d’un candidat PS depuis 1969.