Le PDG de Ford Mark Fields, dont le départ a été annoncé par le  constructeur automobile américain lundi 22 mai, en novembre 2014 à l’usine de Dearborn dans le Michigan. | Paul Sancya / AP

Il voulait transformer Ford en fournisseur de mobilité. Mark Fields, 56 ans, dont vingt-huit ans passés dans le groupe, est finalement remercié trois ans après son intronisation à la tête du numéro deux américain de l’automobile. Lundi 22 mai, l’entreprise devait officialiser le départ de son PDG et son remplacement par Jim Hackett, l’ancien patron de Steelcase et actuel responsable de la division « mobilité intelligente ».

Une page se tourne pour Ford. Depuis quinze ans, M. Fields était l’un de ses hommes-clés. Il a secondé les PDG Bill Ford et Alan Mulally entre 2002 et 2014. En 2006, il a été au cœur du sauvetage de l’entreprise. Il était de toutes les décisions lors de la lourde restructuration du géant américain. Il a également accompagné la redynamisation de la gamme de véhicules du groupe, et sa montée en qualité.

Grâce à des suppressions d’emplois massives, Ford avait réussi à résister à la crise financière de 2007 alors que General Motors et Chrysler étaient sauvés in extremis par l’Etat fédéral américain. Avec la reprise progressive du marché, le constructeur est devenu rapidement le premier groupe automobile américain en termes de bénéfices, loin devant GM.

Saturation du marché nord-américain

En 2014, après huit ans d’attente, l’heure de M. Fields semblait enfin venue. Lui qui partageait avec Bill Ford, le président du conseil d’administration, l’ambition de préparer le groupe à la mobilité partagée et autonome de demain. Est-il parti trop vite dans cette direction ? C’est ce que pensent les actionnaires de la société qui l’ont accablé lors de l’assemblée générale annuelle fin avril. En trois ans, le cours de Bourse de Ford s’est effondré de 40 %, tandis que les bénéfices jouaient au yo-yo. Au premier trimestre, ils ont dérapé d’un tiers.

La faute à la saturation du marché nord-américain après sept ans de croissance ininterrompue. Les ventes de la marque à l’ovale bleu ont chuté de 5 %, mais de 22 % pour les seules berlines et citadines, délaissées du fait du pétrole abordable.

Ce n’est pas la seule critique. L’incapacité de M. Fields à réduire les coûts et à élargir la gamme de SUV et de pick-up a également été critiquée. Il faut dire que le dirigeant n’a pas été beaucoup aidé par le nouveau président américain. Sous la pression de Donald Trump, fin 2016, le PDG de Ford avait été obligé d’abandonner son projet d’investissement de 1,4 milliard d’euros pour créer une usine au Mexique dévolue aux citadines. Le groupe a finalement décidé de localiser sa production dans ses usines du nord des Etats-Unis, beaucoup moins rentables.

La suppression de 1 400 emplois annoncée

Par ailleurs, M. Fields réservait l’essentiel de ses investissements aux nouvelles formes de mobilité. Fin 2016, le constructeur a ainsi annoncé sa volonté de dépenser plus de 2,5 milliards d’euros dans le domaine de la mobilité, autonome, électrique et partagée. Et ce, alors que Google, General Motors, voire Tesla, sont aujourd’hui jugés bien plus avancés dans ces secteurs.

Mi-mai, pour répondre aux critiques, M. Fields a annoncé la suppression de 1 400 emplois dans les fonctions administratives en Amérique du Nord et en Asie, afin de réduire les coûts et d’améliorer la rentabilité. Cela n’a pas suffi à rassurer Bill Ford et le conseil d’administration, qui en profitent pour organiser une large redistribution des postes.

Outre la promotion de M. Hackett, le conseil d’administration du constructeur devait promouvoir Joseph Hinrichs, le patron des zones Amérique, qui prendra la responsabilité des opérations industrielles au niveau mondial. Jim Farley, le patron de la zone Europe, sera chargé des ventes au niveau mondial, tandis que Marcy Klevorn, le directeur de la recherche et développement, sera responsable de la mobilité intelligente.