Reynald Pedros participe en 2012 à un stage pour les entraîneurs sans emploi. | PHILIPPE DESMAZES / AFP

Reynald Pedros est le nouvel entraîneur de l’Olympique lyonnais. Nul affolement, ou au contraire nul soulagement, le président du club, Jean-Michel Aulas, n’a pas cédé à la pression de l’opinion publique en remplaçant Bruno Génésio, l’entraîneur controversé de la section masculine, récente demi-finaliste de la Ligue Europa.

L’ancien Nantais, champion de France 1995, arrive à la tête de l’équipe féminine, triple championne d’Europe et onze fois championne de France consécutivement. Cette saison, sous les ordres de Gérard Prêcheur, les Lyonnaises sont d’ailleurs en lice pour un triplé, puisqu’elles viennent de battre le PSG en finale de la Coupe de France et qu’elles défient à nouveau les Parisiennes, le 1er juin, en finale de la Ligue des champions.

Alors que la relation médiocre entre Aulas et l’actuel coach ne pouvait que s’achever, on attendait la nomination d’un entraîneur ou d’une entraîneuse à la réputation mondiale à la place du très inexpérimenté Pedros. Les noms de l’Allemand Ralf Kellermann, en poste à Wolfsburg depuis 2008, ou de la Suédoise Pia Sundaghe, ex-sélectionneuse des Etats-Unis et qui dirige la Suède depuis 2012, étaient les plus cités.

C’est finalement Reynald Pedros, au CV d’entraîneur plutôt ténu, qui a obtenu le privilège de diriger ce qui est peut-être le meilleur club féminin au monde. Jusqu’à présent, il avait entraîné exclusivement dans le football amateur masculin : Saint-Jean-de-la-Ruelle en 2008-2009 (CFA 2) et Saint-Pryvé-Saint-Hilaire de 2009 à 2012. Il avait obtenu avec ce club la montée en CFA avant de redescendre en CFA 2. Sans club depuis cinq ans, l’ancien milieu de terrain était devenu consultant pour le groupe Canal+ en 2013.

Reynald Pedros a porté à 21 reprises le maillot lyonnais lors de la saison 1997-1998. | PHILIPPE DESMAZES / AFP

Agé de 45 ans, formé à Nantes, cet ancien international aux 25 sélections en bleu (1993 à 1997), qui a disputé la demi-finale de l’Euro 1996 (il a manqué le dernier penalty face aux Tchèques), a joué à Marseille, Parme, Naples, Montpellier, Toulouse, Bastia, en Israël et au Qatar… Facteur essentiel pour être estampillé « ancien de la maison », élément crucial dans un club comme l’Olympique lyonnais, il a également porté durant six mois et 21 rencontres le maillot de l’OL (1997-1998).

Sans préjuger des qualités d’entraîneur de l’homme, le choix du président lyonnais laisse perplexe plus d’un observateur. C’est également sur le label « beau jeu à la nantaise », qui doit beaucoup à Jean-Claude Suaudeau, que l’ancien coéquipier de Nicolas Ouédec et Patrice Loko a été retenu. Jean-Michel Aulas souhaite en effet améliorer la qualité de jeu de son équipe, qui n’en finit pourtant pas de gagner.

En septembre 2016, la Fédération française de football, par l’intermédiaire de son président, Noël Le Graët, avait surpris son monde en nommant un autre ancien professionnel à l’expérience très limitée à la tête des Bleues, Olivier Echouafni. Avant de disputer l’Euro 2017 en juillet aux Pays-Bas, il faut reconnaître que ce dernier s’en sort plutôt bien pour le moment.

Pour Sandrine Mathivet, actuellement en lice pour la montée en Division 1 avec Dijon, cette décision n’est pas une surprise. « Je m’attendais à l’intronisation d’un ancien pro de l’OL. Sans entrer dans la question de la compétence, c’est aussi une histoire de communication », réagit l’ancienne entraîneuse de Juvisy.

Demi-finaliste de la Ligue des champions avec le club essonnien en 2013, la technicienne de 48 ans refuse tout procès d’intention à Reynald Pedros : « Je ne peux pas le juger avant qu’il ait mis son habit d’entraîneur. Certains entraînent pendant des années et ce n’est pas pour autant qu’ils sont compétents. Le fait d’avoir quand même un peu entraîné, d’avoir été joueur pro, bien que cela ne suffise pas, ça peut l’aider. Et s’il est entouré par un staff de qualité, je ne vois pas pourquoi il ne réussirait pas. »

Mais Sandrine Mathivet, qui refuse « d’être sectaire », espère par contre que les portes seront ouvertes des deux côtés, c’est-à-dire que les femmes pourront également accéder à des postes d’entraîneuse en plus grand nombre dans le football masculin. « Il faut permettre à toutes les femmes et à tous les hommes d’entraîner qui ils veulent, quel que soit le niveau. Ça bougera vraiment quand il y aura plus de Corinne Diacre (entraîneuse de l’équipe masculine de Clermont depuis 2014) en Ligue 1 ou en Ligue 2 », dit-elle. En attendant, Reynald Pedros devra se montrer à la hauteur de la tâche qui lui est confiée à la tête d’une équipe qui a tout remporté ces dernières années.