Cent sapeurs-pompiers ont été déployés pour éteindre l’incendie survenu dans la nuit de lundi à mardi à l’école d’ingénieurs Supélec Rennes. | THOMAS BREGARDIS / AFP

Un cordon de sécurité a été déployé autour du bâtiment de trois étages désormais désert. A travers les fenêtres grandes ouvertes, on entrevoit ce qu’il reste de la décoration. Sur un rebord, une basket abandonnée, sur un autre, un bout de chiffon oublié. Au pied de l’immeuble, du mobilier carbonisé, quelques extincteurs et un siège en cuir ont été abandonnés. Sur les façades, de grosses traces de suie subsistent.

Il y a encore quelques heures, cent sapeurs-pompiers ainsi que plusieurs jeunes ont évacué cinquante-trois étudiants de Supélec, une prestigieuse école d’ingénieurs située à Cesson-Sévigné, dans la périphérie de Rennes (Ille-et-Vilaine). Ils logeaient tous dans cette résidence universitaire – baptisée Pascal – lorsqu’un incendie s’est déclaré dans la nuit du lundi 22 au mardi 23 mai, dans une pièce commune située au premier étage. En tout, vingt-six personnes ont été hospitalisées. Mardi soir, cinq l’étaient encore. Parmi elles, deux sont toujours en réanimation. De son côté, la police a ouvert une enquête pour déterminer les causes de l’incendie.

Antoine, hébergé dans une autre résidence, est arrivé rapidement sur les lieux. Il commençait à s’endormir lorsqu’il a entendu, vers 2 h 50, ses camarades crier « y a le feu ! ». « On a apporté des matelas pour aider les gens car dans la panique certains ont sauté sans rien pour les réceptionner. Il y avait beaucoup de flammes, beaucoup de fumée », se remémore l’étudiant de première année malgré le « choc » ressenti. « On s’est mobilisé, on a fait de notre mieux. Il fallait aussi gérer ceux qui paniquaient », poursuit-il face au foyer où ont été accueillis les étudiants secourus.

« Beaucoup de fumée »

A l’intérieur, plusieurs matelas sont posés au sol, une couverture de survie traîne encore sur le billard. C’est dans cette pièce que les pompiers et le SAMU ont donné les premiers soins. « Il y avait une cinquantaine d’étudiants, explique le médecin-chef des sapeurs-pompiers du département. On a trié ceux qui avaient respiré le plus de dioxyde de carbone. » D’autres se sont blessés en sautant par les fenêtres. Ceux qui n’ont pas été hospitalisés sont restés pour se reposer, puis pour « débriefer ». « Ils se sont réconfortés mutuellement », explique le médecin-chef.

Le foyer dans lequel une cinquantaine d’étudiants ont trouvé refuge après l’incendie. | THOMAS BREGARDIS / AFP

C’est le cas de Cyril (le prénom a été modifié), 22 ans, étudiant en deuxième année. Il dormait au deuxième étage de la résidence Pascal lorsque le feu s’est déclaré. « J’ai été réveillé par mon coloc », dit-il, encore hagard. « Il a voulu passer par la fenêtre mais moi je suis descendu par l’escalier. J’ai coupé ma respiration et j’ai couru. Il n’y avait pas de flammes mais beaucoup de fumée », raconte-t-il, tout en précisant que ses souvenirs sont flous. Une fois arrivé en bas du bâtiment, il a « récupéré les élèves qui ont sauté au sol et qui sont maintenant à l’hôpital ».

Il évoque aussi cette amie qui dormait au premier étage. Comme elle ne se réveillait pas, avec d’autres, il a fait la courte échelle à un de ses copains, qui n’a pas hésité à briser la fenêtre pour tirer la jeune fille du lit. « Elle n’a rien eu » mais, « lui, il s’est blessé au bras », dit-il.

« Solidarité » et « sang-froid »

C’est pour « être au plus près des étudiants » que la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, Frédérique Vidal, s’est rendue sur place. Arrivée en début d’après-midi, Mme Vidal, accompagnée notamment du préfet, Christophe Mirmand, et du président de Supélec Rennes, Philippe Martin, a rencontré les étudiants ainsi que les équipes de secours.

Face aux journalistes, la ministre a salué la « solidarité » et le « sang-froid » dont ont fait preuve les étudiants. « L’incendie aurait pu être bien plus grave », n’a-t-elle pas manqué de relever. Avant d’ajouter :

« Ils sont dans un état de choc, de révolte, certains dans un état apathique, mais je suis sûre que ça va aller pour la majorité d’entre eux. »

La ministre de l’enseignement supérieur, Frédérique Vidal, accompagnée du directeur de supélec Rennes, Philippe Martin, le 23 mai 2017 à Cesson-Sévigné. | THOMAS BREGARDIS / AFP

Dès le matin, une cellule d’urgence médico-psychologique a été activée pour prendre en charge les victimes sur place. Mais ni Antoine, ni Cyril n’ont souhaité, pour le moment, s’y rendre.