Le parquet de Paris a demandé, mercredi 24 mai, le renvoi devant le tribunal correctionnel des laboratoires Servier et de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) dans le volet principal du scandale du Mediator.

Le parquet a annoncé avoir requis un renvoi du groupe pharmaceutique pour « tromperie aggravée, escroquerie, blessures et homicides involontaires et trafic d’influence ». Il demande aussi un procès pour l’ANSM pour « blessures et homicides involontaires ». L’agence est soupçonnée d’avoir négligé les alertes sur la dangerosité du produit de 1995 à 2009.

Le ministère public requiert le renvoi en correctionnelle de onze personnes morales (dont les laboratoires Servier et l’ANSM) et quatorze personnes physiques.

Ces réquisitions font suite au rejet par la cour d’appel de Paris, mercredi, des derniers recours déposés par les laboratoires Servier, qui avaient notamment demandé l’annulation de leur mise en examen. Leur avocat a immédiatement annoncé que le groupe pharmaceutique allait former un pourvoi en cassation, qui n’est toutefois pas suspensif.

« Enfin, le procès va avoir lieu », avait réagi avant les réquisitions Charles Joseph-Oudin, avocat de parties civiles, rappelant que « la première plainte [avait] été déposée en décembre 2010 par une victime aujourd’hui décédée des suites de sa valvulopathie imputable au Mediator ».

Consommé pendant plus de trente ans par 5 millions de personnes en France, l’antidiabétique, largement détourné comme coupe-faim, a été retiré du marché en novembre 2009. Selon différentes études, il pourrait être responsable à long terme de la mort de 500 à 2 100 personnes.

Six ans d’instruction

Nullités d’actes d’enquête, de mises en examen, demandes d’auditions : Servier se livre depuis le début de l’enquête à un bras de fer avec la justice, une attitude qualifiée de « manifestement dilatoire » par les juges d’instruction parisiens qui enquêtent depuis février 2011 sur ce scandale sanitaire.

Sur six ans d’instruction, trois ont été « exclusivement consacrés à la procédure à la suite de multiples demandes et recours faits par la défense des mis en cause », avait déploré en janvier le procureur de la République de Paris, François Molins.

Dans cette information judiciaire pour « tromperie, escroquerie, prise illégale d’intérêt » ou encore « trafic d’influence », 26 personnes sont mises en examen : des sociétés de la galaxie Servier, des dirigeants du groupe, des fonctionnaires, des médecins ou encore une ex-sénatrice, soupçonnée d’avoir été en lien avec la société.

S’il a lieu, le procès se tiendra en l’absence du principal protagoniste, Jacques Servier, fondateur du groupe, mort en 2014 à 92 ans.