L’Aquarius, affrété par l’ONG SOS Méditerrannée, a dû parcourir plusieurs centaines de milles de plus que d’ordinaire afin de débarquer vendredi à Salerne (Campanie) les migrants secourus en mer mardi et mercredi dernier.  | CARLO HERMANN / AFP

Selon les autorités italiennes, la décision a été avant tout prise pour des raisons de sécurité. Pourtant, alors même que le site de Taormine avait été choisi par l’ancien premier ministre Matteo Renzi dans le but de mettre la question migratoire au centre des discussions du G7, il est difficile d’y voir autre chose qu’un symbole malheureux : depuis le 21 mai et au moins jusqu’à dimanche 28, en raison de la tenue du sommet, les débarquements de réfugiés en Sicile ont été interrompus.

En conséquence, les navires d’ONG opérant dans le canal de Sicile se voient contraints de débarquer dans des ports italiens plus lointains, dans des conditions de sécurité parfois très problématiques, alors même qu’ils sont confrontés depuis plusieurs semaines à une augmentation spectaculaire du nombre des opérations au large de la Libye (plus de 50 000 personnes secourues depuis le début de l’année, soit 40 % de plus que l’an passé à la même période).

« Nous avons navigué dans des conditions assez extrêmes »

Ainsi L’Aquarius, affrété par l’ONG SOS Méditerrannée, a-t-il dû parcourir plusieurs centaines de milles de plus que d’ordinaire afin de débarquer vendredi à Salerne (Campanie) les migrants secourus en mer mardi et mercredi dernier. « Le problème, c’est que nous avions 1 004 réfugiés à bord. Ça représente deux fois plus de personnes prises en charge que la limite que nous avions définie. Autrement dit, même si par chance la mer était très bonne, nous avons navigué dans des conditions assez extrêmes », raconte Mathilde Auvillain, chargée de la communication de l’ONG.

Dans le même temps, le Prudence de Médecins sans frontières était dirigé vers Naples, premier port disponible, qu’il ne devrait atteindre que dimanche. A son bord, 1 449 réfugiés, alors que la capacité du navire est de 600 personnes. « Dans ces conditions, il nous est impossible de leur fournir la nourriture et l’assistance médicale, a affirmé Michele Trainiti, coordinateur des opérations de secours pour Médecins sans frontières (MSF), avant d’ajouter : « pour l’instant, nous ne pouvons pas garantir leur sécurité. »

Un risque de catastrophe de plus

Les navires d’autres ONG ont été dirigés vers la Calabre, notamment vers Crotone, où le Phoenix a débarqué 600 personnes ainsi qu’une trentaine de cadavres, des jeunes enfants pour la plupart.

« Nous n’avons pas le choix : comme les autres bateaux concernés par les opérations de secours, nous ne faisons que suivre les directives de Rome, qui nous dit vers quel port nous diriger, poursuit Mathilde Auvillain. Mais cet éloignement représente une journée de plus en mer pour les personnes secourues, et deux journées de présence en moins pour nous dans la zone des opérations. » Un risque de catastrophe de plus, alors que le nombre de morts en mer a dramatiquement crû ces dernières semaines. En début de semaine dernière, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) évoquait le chiffre de 1254 morts depuis le début de l’année.