Un membre des milices paramilitaires progouvernementales Hachd Al-Chaabi à proximité du gouffre appelé Khasfah, à proximité du village d’Athbah, au sud de Mossoul, le 26 février 2017. | ARIS MESSINIS / AFP

Des forces irakiennes ont découvert à proximité du village d’Athbah, au sud-ouest de Mossoul, un endroit connu sous le nom de Khasafa (« gouffre », en arabe) utilisé par l’organisation Etat islamique (EI) comme site d’exécution de ses victimes. Selon des habitants de la région, la plupart des personnes qui y auraient été tuées seraient des policiers, des soldats ou des fonctionnaires accusés de liens avec le pouvoir irakien.

Belkis Wille, une enquêtrice de l’ONG de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW), a collecté des témoignages semblant corroborer les faits. « J’ai commencé à entendre parler de ce lieu il y a à peu près un an, quand j’ai parlé à des gens fuyant les zones encore sous contrôle de l’EI », dit-elle.

« Chaque habitant de Mossoul connaît ce lieu. Il y a beaucoup de charniers autour de Mossoul mais Khasafa est le plus horrible de tous. J’estime que des milliers de personnes ont été tuées et enterrées là. Khasafa est ce qui traduit le plus la brutalité de l’EI », a aussi indiqué au Monde le fondateur du blog Mosul eyes, un historien de Mossoul qui chronique depuis juin 2014 la vie sous l’Etat islamique dans la grande cité du nord de l’Irak.

HRW demande une enquête

HRW a pu obtenir des images par satellite suggérant que le gouffre s’était rempli. Des habitants ont dit que l’EI y avait jeté des épaves de voitures et des conteneurs avant de les recouvrir de terre à l’aide de bulldozers dans une tentative de dissimuler ses crimes. L’ONG souhaite que le gouvernement irakien, qui dispose d’une équipe d’enquête spéciale pour les charniers, sécurise le site et commence les excavations.

Aucune estimation n’existe pour l’instant du nombre de cadavres qui pourraient s’y trouver. « Les gens que nous avons interviewés parlent en général de 4 000 », un chiffre pour l’instant impossible à vérifier, selon Mme Wille. Un mois environ après le départ des djihadistes face à l’avancée des forces irakiennes, le gouffre est quasi rempli jusqu’à la surface. Un trou plus profond se distingue en son centre.

La région, où patrouillent les unités de la mobilisation populaire, Hachd Al-Chaabi, composées en majorité de volontaires et milices chiites, est truffée d’engins explosifs laissés intentionnellement par l’EI. Samedi, la reportrice de guerre et journaliste kurde irakienne Shifa Gardi, de la chaîne de télévision Rudaw, qui couvrait la bataille de Mossoul et enquêtait sur le gouffre, ainsi que trois miliciens du Hachd, ont été tués par l’explosion d’un engin piégé.

Des dizaines de charniers ont été découverts dans les zones qui étaient contrôlées par les djihadistes quand elles ont été reprises par les forces de sécurité irakiennes.

« Mossoul tombera, la question c’est en combien de temps et avec combien de pertes »
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