En 2017, après la chute des cours du prix du pétrole, de nombreux chantiers de batiments publics et privés se sont interronpus dans à N'Djamena, la capitale du Tchad. | MICHAEL ZUMSTEIN/VU POUR "LE MONDE"

Un an après la réélection d’Idriss Déby Itno à un cinquième mandat, en avril 2016, le Tchad continue de s’enfoncer dans la crise. Crise économique, d’abord, provoquée par le retournement des cours du pétrole, dont l’Etat tire l’essentiel de ses revenus. Crise politique et sociale, ensuite, dans un climat de répression accrue. Crise humanitaire et sécuritaire, enfin, dans la région du lac Tchad, liée au débordement de l’insurrection de Boko Haram au Nigeria voisin.

Face aux difficultés de leur allié dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, les Occidentaux ont mis de côté leurs réserves sur l’autoritarisme du régime en place depuis 1990 et ont sorti le carnet de chèques, trop inquiets à l’idée qu’un des derniers pays « stables » dans le chaos régional puisse à son tour basculer.

Le soutien budgétaire, qui avait quasiment disparu avec l’arrivée des premiers dividendes de l’exploitation pétrolière, est ainsi redevenu incontournable pour boucler les fins de mois et payer le traitement des fonctionnaires. Même si ces derniers ont eu à supporter un remède de cheval : la dépense publique a été divisée par deux en deux ans.

Les institutions financières internationales sont à la manœuvre pour boucler le financement du prochain plan quinquennal de développement (2017-2021), dont le maître mot est la diversification de l’économie, après avoir tout misé sur le pétrole.

« Comme des animaux »

Jusqu’où la population supportera-t-elle ces sacrifices, alors que les nantis du régime n’ont en rien réduit leur train de vie ? La faim n’est plus un fléau réservé aux campagnes. Les familles affluent avec leurs enfants dans le premier centre de prise en charge de la malnutrition, ouvert récemment dans l’hôpital de l’Amitié Tchad-Chine, à N’Djamena.

Au bord du lac Tchad, où se joue la plus grave crise humanitaire du continent avec plus de 2,6 millions de déplacés entre les quatre pays riverains (Cameroun, Niger, Nigeria, Tchad), les ONG découvrent une région depuis toujours abandonnée. Pas d’écoles, pas de santé, pas de routes… Le commerce est paralysé par la fermeture des frontières.

Le sommaire de notre série « Tchad : la fin du mirage »

L’appel à la solidarité internationale pour venir en aide aux 130 000 personnes ayant fui les exactions de Boko Haram de ce côté-ci du lac ne couvre jusqu’à présent que 7 % des besoins recensés par les Nations unies. Partout, le message est le même. Le préfet de Fouli, Mahamat Djibro, en fait un bon résumé : « Ici, les gens vivent comme des animaux, il n’y a rien pour eux. Il n’y aura jamais de solution au terrorisme et à l’insécurité tant qu’il n’y aura pas de travail et de quoi manger. »