Modules photovoltaïques dans un village près de Chuzhou, à l’est de la province chinoise de l’Anhui, en avril 2017. La Chine, leader dans le photovoltaïque, est à l’origine de près de la moitié des capacités supplémentaires, selon le rapport annuel du réseau international REN21. | STR / AFP

Beau fixe pour les énergies vertes ? Publié mercredi 7 juin, le rapport annuel du réseau international REN21, qui brosse le panorama le plus complet des filières renouvelables dans le monde, apporte une réponse contrastée. Un nouveau record de puissance installée a en effet été établi en 2016, confirmant l’essor continu de ce secteur. Mais les investissements qui y ont été consacrés ont fortement diminué.

Fin 2106, la capacité totale d’énergie renouvelable a franchi pour la première fois la barre de 2 000 gigawatts (GW), à 2 017 GW, soit une progression de 8,7 % sur un an, de même niveau que celle enregistrée en 2015. Si un peu plus de la moitié de ce potentiel reste assuré par les ouvrages hydrauliques, le développement du secteur est tiré par le solaire photovoltaïque (303 GW, + 33 %) et par l’éolien (487 GW, + 12,5 %), qui comptent à eux deux pour plus de 80 % dans cette croissance.

Evolution de la capacité mondiale d’énergie solaire photovoltaïque de 2006 à 2016. | REN21

Capacité mondiale d’énergie éolienne de 2006 à 2016. | REN21

Le Petit Poucet français

La Chine conforte sa place de chef de file incontesté, dans le solaire photovoltaïque, où elle est à l’origine de près de la moitié des capacités supplémentaires, comme dans l’éolien, où plus de 40 % des nouvelles installations sont à mettre à son actif. En comparaison du géant asiatique, le Japon, les Etats-Unis, l’Allemagne ou l’Inde font désormais, dans ce domaine, figure de nains. La France se classe, pour sa part, dans le groupe des dix pays les plus équipés, mais avec un rang de Petit Poucet et une progression modeste (+ 0,6 GW en 2016 dans le solaire et + 1,6 GW dans l’éolien).

La Chine compte pour 46 % dans les nouvelles capacités photovoltaïques installées en 2016. | REN21

La course en tête de la Chine dans l’éolien. | REN21

« Le monde ajoute chaque année davantage de capacité renouvelable qu’il n’ajoute de capacité dans les différentes ressources fossiles », commente le président de REN21, Arthouros Zervos, professeur à l’Université polytechnique nationale d’Athènes. A l’échelle de la planète, les filières vertes représentent aujourd’hui près de 10 millions d’emplois directs et indirects, majoritairement dans le solaire (3,9 millions de postes) et les bioénergies (2,8 millions).

Baisse des coûts des technologies

Paradoxalement, les énergies tirées du soleil, du vent ou de la biomasse continuent de gagner du terrain, alors même que les investissements qui leur sont consacrés sont en chute libre. Ceux-ci ont en effet diminué de 23 % en 2016, pour tomber à 242 milliards de dollars (215 milliards d’euros), soit leur niveau de 2010. Le recul est très significatif pour les pays développés (– 14 %), mais il est particulièrement prononcé pour les pays émergents et en développement (– 30 %). Alors qu’en 2015 ces derniers avaient pour la première fois investi davantage que les nations « avancées » dans les renouvelables, ils ont considérablement réduit la voilure.

Des investissements en forte baisse dans le monde. | REN21

On peut, dans une approche positive, y voir le résultat de la baisse des coûts des technologies renouvelables qui, note REN21, permet d’avoir « plus de capacité pour moins cher ». De fait, le rapport met en avant les exemples de l’Argentine, du Chili, de l’Inde, de la Jordanie, de l’Arabie saoudite ou des Emirats arabes unis, où, pour certains projets solaires, le prix du kilowattheure est descendu à 0,03 dollar, un tarif défiant toute concurrence.

Mais on peut aussi craindre que ce désinvestissement se traduise, à court terme, par une moindre croissance du secteur. Le marché chinois, si dynamique qu’il soit, avec un tiers des dépenses mondiales dans les renouvelables, connaît lui-même un ralentissement, ce qui est aussi le cas de l’Inde, du Japon et de l’Afrique du Sud.

Déséquilibre en matière de subventions publiques

En tout état de cause, soulignent les auteurs du rapport, ce désengagement financier montre que « la transition énergétique ne s’effectue pas assez vite pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris », qui sont de limiter la hausse des températures à 2 °C, et si possible 1,5 °C, par rapport à la période préindustrielle.

« Le monde est engagé dans une course contre la montre, rappelle Christine Lins, secrétaire exécutive de REN21. La seule mesure importante à prendre pour réduire de façon rapide et rentable les émissions de CO2 est d’éliminer le charbon et d’accélérer les investissements dans l’efficacité énergétique et les renouvelables. »

Or, si les investissements mondiaux dans les renouvelables sont désormais environ deux fois plus élevés que ceux alloués aux fossiles (charbon, gaz et pétrole), le déséquilibre demeure très important en matière de subventions publiques. Les derniers chiffres harmonisés, qui remontent à 2014, font état de 490 milliards de dollars d’aides publiques alloués par les Etats au secteur fossile, contre seulement 135 milliards pour les renouvelables. Un ratio de presque quatre pour un, qui continue de pénaliser lourdement les énergies alternatives.