Le festival «  We love green » se tient au Bois de Vincennes, à l’est de Paris, les samedi 10 et dimanche 11 juin, l’occasion de parler des conséquences environnementales de la mode. | Photo : Universal Love

En enfilant simplement son jean et son t-shirt, on peut mettre à mal la planète, surtout s’ils ont été achetés sans label garantissant un minimum de préoccupations environnementale et sociale.

Pour produire un jean, il faut consommer quelque 11 000 litres d’eau, soit l’équivalent de près de 300 douches. Ce dernier peut parcourir, du champ de coton à la boutique, jusqu’à 65 000 km, soit une fois et demie le tour de la Terre. Et chaque année en France, sur les 700 000 tonnes de textiles arrivant sur le marché, on compte 90 millions de jeans.

S’agissant du haut, le bilan est aussi impressionnant. Un t-shirt va consommer, lui, 2 720 litres d’eau, soit ce qu’un individu boit, en principe, en trois ans. Pour le teindre, le rendre plus doux ou élastique, les techniques utilisées font appel à de nombreux produits chimiques, contenant des métaux lourds, souvent toxiques. Ces composés organiques volatiles peuvent polluer l’air et les eaux, altérer la santé des ouvriers qui les fabriquent, voire celle des consommateurs, ces substances se dégradant au contact de la sueur et de l’humidité.

« Le revers de mon look »

Pour faire prendre conscience de ces réalités, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) Ile-de-France, en partenariat avec l’association Universal Love, a investi le festival We Love Green qui se tient, samedi 10 juin et dimanche 11 juin au Bois de Vincennes, dans l’Est parisien. Lors du week-end, les jeunes, et les moins jeunes, peuvent découvrir une exposition « Le revers de mon look, quels impacts ont mes vêtements sur la planète ? », ludique et pédagogique. Par ailleurs, une table ronde a permis de réunir, samedi après-midi, des professionnels de la mode, des représentants de l’Ademe et de Universal Love, sur le thème « Mode pour le climat – Mode engagée – Mode d’emploi ».

« Alors que la conscience environnementale et sanitaire a progressé sur la problématique de l’alimentation, notamment chez les jeunes, la mode et le vêtement restent encore à l’écart de ce mouvement pour la durabilité, la mode est le parent pauvre de cette conscience environnementale », indique Joëlle Colosio, directrice régionale de l’Ademe Ile-de-France. Mais selon elle, une nouvelle étape est en train de voir le jour, avec des clients de plus en plus désireux d’être informés et des professionnels qui ont progressé sur ces questions et qui sont en capacité de produire des vêtements séduisants et éthiques tout à la fois.

Le textile est la deuxième industrie la plus polluante dans le monde, rappelle l’Ademe, consommant 25 % des produits chimiques produits chaque année dans le monde et émettant 10 % du total des gaz à effets de serre. Sur les 400 milliards de mètres carrés de tissus produits chaque année dans le monde, 15 % environ ne sont pas utilisés, devenant des déchets. S’agissant justement de la fin de vie des vêtements, l’agence, qui est un établissement public sous la tutelle conjointe du ministère de la transition écologique et solidaire et du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, émet quelques propositions à destination d’un public adolescent et jeune, fort consommateur de mode.

S’agissant par exemple du t-shirt, il faut le choisir solide et « qui ne se démode pas », en prendre soin au niveau des lavages, le choisir avec un coton bio, et un label – même s’il est parfois difficile de s’y retrouver dans les nombreux labels existants, 10 pour le textile (15 pour l’alimentation et les boissons) –, et, précise l’Ademe, « éviter de le jeter à la poubelle, [mais plutôt] le donner, le vendre ou le déposer dans un point de collecte des vêtements ».

La cible est clairement les jeunes, très consommateurs de produits considérés très vite comme « périssables », et à des prix de plus en plus bas, réalisés souvent dans des matières peu écologiques ni résistantes. Si l’opinion publique est encore peu concernée par cet aspect de la mode, l’effort des défenseurs de l’environnement ne date pourtant pas d’hier.

Panneau de l'exposition "le revers de mon look", conçu par l'Ademe et Universal Love, qui permet de prendre conscience du poids environnemental et social de chaque vêtement porté. | Photo : Universal Love

Manque de porte-parole

L’association Universal Love a été créée dès 1995, créant en 2004 l’Ethical Fashion Show. En avril 2013, la catastrophe du Rana Plaza, un immeuble s’effondrant dans le faubourg de Dacca, la capitale du Bangladesh et tuant quelque 1 130 morts, essentiellement des ouvrières de la confection, a relancé la nécessité d’imposer aux marques un code social et environnemental.

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« Il y a un net progrès, chez les grandes marques qui tirent l’ensemble de la profession, mais on n’en parle pas assez en France, note Isabelle Quéhé, d’Universal Love. Nous manquons de porte-parole, de personnalité visible, comme en Grande-Bretagne, Stella McCartney ou Vivian Westwood, cette dernière étant capable de dire à la princesse de mieux s’habiller en tenant compte des conditions de fabrication de ses robes ou en la conseillant de ne pas en changer tout le temps. » Avec 150 milliards de vêtements produits (en 2016), la marge de progression sur les questions environnementales des fabricants est importante.

Si en achetant son jean ou ses chaussures, il n’est pas toujours évident de réfléchir aux conditions de fabrication du produit, il faut encourager la prise de conscience. Comme dans l’alimentation, estime l’Ademe. « On ne peut pas se passer de l’habillement, insiste Joelle Colosio. Il faut donc rappeler quelques vérités, mais en évitant la culpabilisation, d’où notre exposition “Le revers de mon look”. » Sur le terrain, l’agence accompagne les projets, créateurs, recycleries, friperies, échanges ou location de vêtements. Le mot d’ordre est clair : « Achetez moins, achetez mieux, vous avez le pouvoir de choisir ce que vous voulez mettre », professe l’Ademe.