Droit et justice et liberté et culture au menu 2017 des sujets de philo | FREDERICK FLORIN / AFP

Jeudi 15 juin, après que les sujets de philosophie du bac 2017 ont été rendus publics, Emilie Bathier, professeuse en Eure-et-Loir, a répondu aux questions des internautes lors d’un chat sur Le Monde. fr. Approche et difficulté des sujets, problématique, lien avec le programme… Voici le compte rendu de ce riche échange, qui a concerné les sujets choisis par les candidats du bac S, du bac ES et du bac L (les sujets du bac technologique n’avaient pas encore été rendus publics).

Le « Monde » Campus : Quelle est votre première réaction en voyant les sujets de philosophie du bac 2017 ?

Emilie Bathier. D’une série à une autre, les sujets de dissertation sont soit très classiques (séries ES et L), soit plus originaux (série S). Pour cette dernière, les problématiques sont cette année encore à la marge du traitement classique des notions et demandent vraiment aux élèves de se questionner.

Le commentaire de texte pour la série S n’est-il pas trop complexe par rapport au niveau attendu des élèves ?

C’est un texte de Foucault qui prend exemple sur le vivant pour montrer le rôle positif de l’erreur dans l’histoire humaine et l’histoire des sciences. Les élèves ont eu un cours sur le vivant, sur la vérité, ont abordé l’histoire des sciences. Ils sont donc outillés pour cette épreuve qui là aussi leur demande de réfléchir. Mais la compréhension littérale du texte ne pose pas de difficultés majeures.

Ce qui n’est pas forcément le cas pour l’explication de texte en ES…

Ce texte d’Hobbes n’aborde pas la partie la mieux connue de sa conception politique, les élèves peuvent être surpris. De plus la formulation du texte assez complexe dans son milieu demande une lecture fine.

Quelles sont précisément les notions soulevées par les différents sujets de cette année ?

Certains sujets sont centrés sur une seule notion, par exemple « l’art » en ES. D’autres sur plusieurs notions : en S, « liberté et culture ». En L, « droit et justice ». Il n’y a pas de surprises majeures. Les thématiques dans chaque série et les sujets sont conformes à l’esprit des programmes qui veut faire réfléchir les candidats et non réciter un cours.

Quel plan est adapté pour le sujet 1 des ES ?

Il n’y a pas une seule manière de bien traiter un sujet. Et un candidat peut avoir suivi le plan proposé par un corrigé sans pour autant faire un bon devoir. Le sujet « La raison peut-elle rendre raison de tout ? » demande d’élaborer précisément le terme de « raison » employé ici en deux sens. Le premier étant la raison en tant que « faculté ». Le second l’explication ou la compréhension du monde comme de nous-mêmes.

Pour le sujet sur droit et intérêts (sujet 1 de S) quels auraient été les axes que vous auriez développés ? Parler de la Justice serait-il hors sujet ?

Ce sujet demande à réfléchir sur l’articulation entre intérêts particuliers et intérêt général, en se posant la question de la fonction du droit. L’idée de justice peut faire partie de son traitement si on s’interroge sur l’égalité ou l’équité du droit.

Peut-on donner des exemples d’actualité politique récents dans les sujets de philosophie ?
Il n’est pas du tout interdit de s’appuyer sur des exemples d’actualité, à condition néanmoins de rester neutre dans leur traitement et de ne s’en servir que pour illustrer une approche philosophique et conceptuelle.
Les sujets ne sont pas choisis en fonction de l’actualité, mais tout sujet de philosophie pose un problème qui a un sens et des enjeux dans le réel. Il n’est donc pas surprenant que les traiter amène à réfléchir des problèmes qui se posent concrètement.

Quels sont les attendus formels d’une copie (nombre de pages, organisation de la copie…) Y a-t-il de la place pour de l’originalité ?

Les meilleures copies ne se ressemblent jamais, parce qu’elles produisent une pensée originale du sujet. Les attentes de méthode ne sont pas des recettes stéréotypées mais une exigence de rigueur, de précision et de réflexion structurée.

Comment expliquez-vous que la philosophie soit une matière obligatoire en France pour toutes les filières alors que dans beaucoup de pays, la philo est souvent une matière facultative et plutôt réservée aux études universitaires ?

L’enseignement de la philosophie au lycée est différent de celui du supérieur, et sa finalité n’est pas la même. En terminale, il s’agit d’acquérir des outils intellectuels favorisant le sens critique et l’autonomie de la pensée, là ou la philosophie universitaire approfondit surtout les auteurs et les doctrines. A l’étranger la philosophie est surtout conçue comme étant de l’histoire des idées et des auteurs.

Les sujets sont différents pour chaque filière. Je comprends la différence lorsqu’il s’agit de mathématiques ou de sciences car les programmes sont différents mais pourquoi sont-ils différents en philosophie ? Comment la philosophie est-elle enseignée différemment suivant le type de bac suivi ?

Les programmes de notions varient d’une série à une autre sans pour autant être en philosophie spécialisés en fonction de l’orientation de la série. Par exemple la démonstration est au programme de la série L, l’art au programme de la série S. Le choix des sujets donnés au bac tient compte des sujets précédemment tombés, sans forcément qu’il y ait des sujets « scientifiques » en S ni « sociaux » ou « économiques » en ES.