Le joueur de Strasbourg Erving Walker à la lutte avec le Chalonnais Cameron Clark. | FREDERICK FLORIN / AFP

Ne prononcez plus ce mot en présence de Vincent Collet. Ou il vous en cuira. Dépité à l’issue du revers de son équipe, Strasbourg, face à Chalon, lors du troisième match des finales du championnat de France de basket, qui connaîtra son dénouement, vendredi 22 juin (20 h 30), l’entraîneur a fait une brève mais remarquée apparition en conférence de presse.

« Je vous laisse écrire toute la merde que vous voudrez. Vous êtes maîtres à bord, moi, je n’ai rien à dire. D’abord, j’ai mal à la gorge, je n’ai rien à dire… Donc vous pouvez écrire tout ce que vous voulez, vous en serez les responsables, c’est tout. Et je sais que vous ne vous gênerez pas, alors allez-y de bon cœur. »

« Malédiction ». Voilà, c’est écrit. Strasbourg, qui dispute sa cinquième finale d’affilée, a en effet perdu les quatre précédentes (contre Nanterre en 2013, Limoges en 2014 et 2015, Villeurbanne en 2016). Alors, forcément, comme pour Clermont en rugby, la question revient chaque année avec insistance : le SIG ( Strasbourg Illkirch-Graffenstaden) va-t-il enfin réussir à vaincre le signe indien ? « Je suis un des présidents les plus expérimentés en playoffs », s’amuse Martial Bellon, qui est arrivé à la tête du club en 2010. « Ce serait évidemment une énorme désillusion si nous perdions, mais je ne vais pas non plus me suicider ! »

Les Strasbourgeois toujours en vie

Les Strasbourgeois sont en tout cas bien en vie : l’Elan Chalon a laissé passer une première balle de match lundi dernier en Alsace, mais il aura l’avantage du terrain pour le match 5, dans son Colisée, que seules trois équipes ont réussi à prendre d’assaut en 33 matchs toutes compétitions confondues : Nancy et Monaco en saison régulière, et… Strasbourg en playoffs. « Notre équipe est inconstante… et insouciante. C’est peut-être un avantage pour nous de jouer ce match décisif à l’extérieur, la pression sera plus importante sur Chalon », tente de relativiser le président de la SIG.

Si Vincent Collet avait quitté Strasbourg l’été dernier, épuisé et meurtri par une nouvelle défaite en finale, si frustrante, contre l’Asvel, le début de saison raté de la SIG et de son remplaçant, Henrik Dettmann, ne laissait pas présager une telle issue. Mais le retour du coach de l’équipe de France « a tout changé », se félicite Martial Bellon. C’est un grand entraîneur, qui a su s’adapter à un effectif qu’il n’avait pas choisi ». Les Strasbourgeois sont donc revenus de nulle part et aspirent à conquérir un deuxième titre de champion de France après celui glané en 2005.

Ntilikina bien présent

Cette rencontre sera également spéciale pour Frank Ntilikina, le meneur de Strasbourg, tout juste rentré la nuit dernière de la draft, où il a été choisi en huitième position par les New York Knicks, après un aller-retour express entre la France et les Etats-Unis. « Je serai concentré sur la finale, parce que l’objectif, c’est vraiment d’aller chercher le titre. Il va falloir être très sérieux et savoir faire la part des choses », a assuré le phénomène d’origine rwandaise, toujours aussi étonnant de sérénité. Pour lui, la draft n’était qu’une « étape » tandis que le match 5 est « un titre, l’objectif d’un joueur ».

Le joueur de 18 ans a en effet été autorisé par son club à se rendre à New York. Un deal conclu depuis plusieurs semaines avec le club strasbourgeois, mais qui n’a pas manqué de susciter quelques critiques. Sera-t-il en pleine possession de ses moyens pour disputer le match le plus important de sa jeune carrière ? « Je pense que je vais ressentir la fatigue tout à l’heure dans l’avion. Je vais bien dormir. Je vais me concentrer sur le match. » Preuve de son implication dans la quête du titre, le jeune homme a loué une salle à New York pour travailler ses tirs, de bon matin.

En face, l’entraîneur de Chalon-sur-Saône, Jean-Denys Choulet, pourra compter sur son trident magique composé de Moustapha Fall et des Américains John Roberson et Cameron Clark. l’Elan a traversé ses playoffs en totale maîtrise, concédant ses deux seules défaites face à Strasbourg. Les prémices d’une rivalité naissante dans une finale désormais intense et tendue.

Le coach chalonnais avait ouvert les hostilités dès la fin du match 4, en mettant la pression sur le corps arbitral. « On savait que Matt Howard [ailier fort de la SIG] allait faire du Howard, c’est comme ça. Ce n’est pas ma conception du basket. Il ne lui manque plus que la hache et il pourra aller débiter des sapins, les Vosges ne sont pas loin… ». « Victimisation, provocation… On connaît », a rétorqué dans la foulée Collet. « Si lui est un bûcheron, que dire d’Ekene Ibekwe ! », en référence au pivot chalonnais, au style de jeu tout aussi rugueux. L’épilogue de cette confrontation s’annonce explosif.