Face aux sujets de discorde avec Washington, la chancelière allemande réunit plusieurs dirigeants européens, dont le président français Emmanuel Macron et la première ministre britannique, Theresa May – ici le 29 juin. | MICHAEL SOHN / AP

Un peu plus d’une semaine avant le sommet du G20, la réunion des dirigeants des principales économies mondiales, qui se tiendra les 7 et 8 juillet à Hambourg, la chancelière allemande, Angela Merkel, s’est livrée, jeudi 29 juin, devant le Bundestag, à une charge en règle contre Donald Trump.

Dans sa déclaration devant les députés allemands sur les objectifs du G20, la chancelière allemande s’est gardée de citer le nom du président américain. Mais elle n’a pas laissé de doute sur la cible qu’elle visait.

Le réchauffement climatique mondial est « un défi existentiel » pour l’humanité et l’accord de Paris n’est « pas négociable », a-t-elle lancé, ajoutant qu’il fallait que « les dirigeants [du G20] montrent qu’ils comprennent leur responsabilité [pour la planète toute entière] et l’assument ». « On ne peut attendre des discussions faciles sur les changements climatiques lors du sommet du G20. Nos divergences avec les Etats-Unis sont évidentes. »

Elle a aussi mis en garde contre les tendances au « protectionnisme » et à l’« isolationnisme. Aucun des défis auxquels est confronté le monde « ne connaît de frontière », a poursuivi la chancelière allemande. « C’est pourquoi, plus que jamais aujourd’hui, ceux qui croient pouvoir régler les problèmes du monde par le protectionnisme et l’isolationnisme commettent une énorme erreur », a-t-elle ajouté.

« Nous avons plus que jamais besoin du G20 » car le multilatéralisme permet de résoudre les problèmes communs « bien plus que ne pourra jamais le faire le chacun pour soi national », a encore dit Mme Merkel.

Travaux préparatoires « très difficiles »

Lorsque Berlin a pris la présidence du G20, à la fin de novembre 2016, le slogan choisi par l’Allemagne pour sa présidence du Groupe des vingt (G20), était « Shaping an Interconnected World » (« Formons un monde interconnecté »).

Sous les termes généraux de stabilité, durabilité et responsabilité, l’Allemagne entendait rendre l’économie mondiale plus résistante, rapprocher les enjeux climatiques des politiques énergétiques, et contribuer au développement de l’Afrique pour enrayer de nouvelles vagues migratoires.

Mais, avec Donald Trump à la Maison Blanche, le sommet du G20 des principales économies mondiales (elles représentent trois quarts du commerce mondial) s’annonce comme une des réunions internationales les plus conflictuelles de ces dernières années.

Selon plusieurs sources diplomatiques, les travaux préparatoires du G20 pour aboutir à une déclaration commune se révèlent jusqu’ici « très difficiles ».

L’Allemagne, cible des critiques de Trump

Les relations entre Berlin et Washington, au beau fixe sous l’ère Barack Obama, sont particulièrement tendues depuis que Donald Trump a annoncé le retrait de son pays de l’accord de Paris sur la lutte contre le réchauffement climatique et tient un discours protectionniste en matière commerciale.

Donald Trump vise en particulier l’Allemagne et ses exportations automobiles vers les Etats-Unis, qu’il juge excessives, et a laissé planer la menace de taxes douanières.

Sur le climat, « Le désaccord [avec les Etats-Unis] est notoire et il ne serait pas honnête de le masquer. En tous les cas, moi, je ne le ferai pas », a assuré Angela Merkel.

L’Europe est « plus déterminée que jamais » à combattre le changement climatique après le retrait des Etats-Unis de l’accord de Paris et l’accord de Paris n’est « pas négociable », a-t-elle encore affirmé, rejetant l’offre d’une nouvelle discussion de l’administration américaine.

Le chef de la diplomatie allemande, Sigmar Gabriel, accuse, lui, Washington de volonté de sabotage. « Il n’y a pas de stratégie antiaméricaine, et certainement pas de la part du gouvernement allemand, mais il y a des stratèges américains qui planifient une politique anti-Europe et anti-Allemagne », a-t-il affirmé mardi.

Les autorités allemandes ont relevé avec une certaine surprise que Donald Trump avait choisi, la veille du G20, de se rendre en Pologne à une réunion de pays d’Europe de l’Est dont beaucoup, comme la Hongrie, contestent la ligne Merkel en Europe.

Réunion avec les partenaires européens

Face aux sujets de discorde avec Washington, la chancelière allemande réunit, jeudi en milieu de journée à Berlin, plusieurs dirigeants européens, dont le président français, Emmanuel Macron, et la première ministre britannique, Theresa May, afin de constituer un front uni.

Angela Merkel compte notamment sur la dynamique retrouvée dans la relation avec la France depuis l’élection d’Emmanuel Macron, même si une forme de compétition de leadership en Europe commence à se dessiner entre les deux dirigeants. Le chef de l’Etat français vient de réussir deux « coups » diplomatiques, en faisant venir le président russe, Vladimir Poutine, à Paris et en obtenant la venue de Donald Trump pour le 14 juillet.