« Baahubali 2 » est en passe de devenir le plus grand succès du cinéma indien au box-office mondial. | Capture d'écran web

En Inde, le nationalisme se porte bien, y compris au cinéma. Baahubali 2 : la conclusion en est la preuve. Sur les écrans du pays depuis la fin du mois d’avril, la suite de Baahubali, film épique sorti en 2015, alimente les conversations. Encore une fois réalisé par S. S. Rajamouli, Baahubali 2 retrace l’histoire de Shivudu, un jeune villageois qui combat son cousin Bhalladeva, un despote qui terrorise les habitants d’un royaume imaginaire hindou. Au cours de son combat, il prend le nom de Baahubali.

La presse est unanime

Le film est un mélange de testostérone, d’hémoglobine et d’effets spéciaux comme les salles indiennes en ont rarement vu. Il est beaucoup question de batailles, la plus longue d’entre elles occupe près de trois quarts d’heure du film de 2 h 47. Les vaches (sacrées) ont les cornes en feu, le héros principal tire trois flèches à la fois en s’élançant dans les airs et, lorsqu’un guerrier meurt, transpercé par un sabre, ses hurlements résonnent grâce à un travail très élaboré de postproduction. Du point de vue technique, le film est réussi, à en croire les critiques parues dans la presse indienne qui ne tarissent pas d’éloges devant les effets spéciaux. Dans la foulée de son lancement indien, Baahubali 2 : la conclusion a connu une diffusion dans le monde entier, dont une sortie confidentielle en France. Et, après sept semaines d’exploitation, il est en passe de devenir le plus grand succès du cinéma indien au box-office mondial, avec plus de 150 millions de dollars de recettes.

« Baahubali 2 » est un mélange de testostérone, d’hémoglobine et d’effets spéciaux à la gloire des hindous. | Capture d'écran web

Ni le budget élevé de production (35 millions d’euros) ni la campagne de promotion, dont un poster géant de 4 500 m² à Kochi, dans le Kerala, ne peuvent expliquer la popularité du film depuis la fin du mois d’avril. En Inde comme ailleurs, tous les grands succès du cinéma expriment une aspiration sociétale. Dans les années 1980 et 1990, il y eut la lutte contre les injustices sociales, ou la question du pluralisme religieux. Les deux Baahubali célèbrent la grandeur de la civilisation hindoue, à l’heure où le nationalisme est en pleine expansion dans le pays.

Populiste ou démocrate ?

Dans les médias indiens, certains reprochent au film de recycler les clichés sur les populations tribales marginalisées. Des personnages du film ont le teint sombre, s’habillent avec des peaux de bêtes et parlent une langue incompréhensible. « Les tribus ont droit à la plus horrible des descriptions dans Baahubali : des brutes immondes aux dents pourries, des violeurs », s’est ému l’éditorialiste Shekhar Gupta sur Twitter. Cette remarque lui a valu d’être insulté par certains internautes, qui l’accusaient de ne pas respecter la culture hindoue en osant critiquer le film.

Bande-annonce de « Baahubali 2 » (en hindi)

Baahubali 2 - The Conclusion | Official Trailer (Hindi) | S.S. Rajamouli | Prabhas | Rana Daggubati

Baahubali 1 et 2 s’inspirent des grands récits du Mahabharata et du Ramayana. À la différence que, dans ces deux grandes épopées mythologiques, les héros sont tiraillés entre leur éthique et leur devoir guerrier. Dans les films de S. S. Rajamouli, personne ne se pose de question existentielle. « Pourtant, la gloire de la tradition est peut-être mieux comprise à travers ses codes éthiques et sa philosophie qu’à travers la sophistication de ses armes », remarque M. K. Raghavendra, un intellectuel spécialiste du cinéma indien. Mais Baahubali est aussi un héros sensible aux valeurs démocratiques. Il se soucie du peuple et le consulte. Populiste ou démocrate ? La question a disparu derrière les effets spéciaux du film. A la presse, le ministre de l’information, Venkaiah Naidu, a déclaré début mai que le « vrai Baahubali » était le premier ministre, Narendra Modi.