Donal Trump à Washington, le 30 juin. | JIM BOURG / REUTERS

Rien ni personne ne semble pouvoir l’arrêter. Donald Trump a de nouveau lancé une salve de tweets hostiles à la presse, au réveil, samedi 1er juillet, peu avant de s’envoler pour le week-end à son club de golf dans le New Jersey. Ce faisant, il a réactivé une polémique qu’il avait lui-même provoquée, jeudi, en deux messages rageurs, publiés sur son compte officiel de président des États-Unis et qui lui ont valu, de manière assez inédite, les critiques de personnalités de son propre camp.

Quelques heures avant de recevoir le président sud-coréen, M. Trump s’en était pris aux deux animateurs de Morning Joe, l’émission matinale de la chaîne MSNBC, Joe Scarborough et Mika Brzezinski. Se moquant de leurs « mauvaises audiences » et s’indignant de leurs critiques à son égard, M. Trump avait brutalement mis en cause l’intelligence et le physique du couple qu’ils forment à l’antenne et à la ville. Et d’évoquer un épisode remontant au mois de décembre au cours duquel « la folle Mika au QI très bas » et « Joe le psycho » auraient fait le siège de sa résidence de Mar-a-Lago en Floride pour passer les fêtes de fin d’année avec lui. Mais « Mika avait le visage en sang à cause d’un lifting » et il leur aurait fermé leur porte.

« Donald Trump ne va pas bien »

Voilà pour la version et les termes présidentiels, immédiatement démentis par les intéressés, photos à l’appui. Le couple a aussi publié vendredi une tribune dans le Washington Post, intitulée « Donald Trump ne va pas bien ». Les deux journalistes y reconnaissent avoir eu des liens amicaux par le passé avec M. Trump, avant que leurs relations ne se relâchent puis deviennent carrément hostiles depuis l’accession du milliardaire à la Maison Blanche. Selon eux, c’est M. Trump qui les a invités personnellement à Mar-a-Lago où ils se sont rendus pour ce qu’ils décrivent comme une « plaisante conversation » en présence de son épouse Melania. Mais ils s’interrogent surtout sur la santé psychique de M. Trump.

« L’obsession malsaine du président pour Morning Joe ne sert pas l’intérêt de son état mental, ni du pays qu’il dirige. Les dirigeants et les alliés de l’Amérique se demandent une nouvelle fois si cet homme a les capacités requises pour être président ».

Le tweet de samedi ne les aura pas rassurés. Le président américain y affirme cette fois que « Joe le fou et Mika bête comme ses pieds ne sont pas de mauvaises gens mais que leurs mauvaises audiences sont dues à leurs patrons de NBC », dont il dénonce régulièrement la couverture qu’il juge partiale.

Sur sa lancée matinale, M. Trump a regretté le départ d’une autre journaliste, Greta Van Susteren, de la chaîne, estimant qu’elle avait été lâchée par ses patrons car elle refusait de promouvoir la « haine anti-Trump ». Le New York Times rappelle de son côté que l’émission de la journaliste en question enregistre de mauvaises audiences depuis son démarrage il y a six mois. Enfin dans un troisième tweet, le président américain s’en est une nouvelle fois pris à CNN, qualifiée de « Fakenews et de journalisme de caniveau ». Il avait déjà réagi mardi, après l’annonce par la chaîne du licenciement de trois journalistes responsables d’une information insuffisamment étayée sur un proche de M. Trump.

« Indigne d’un président »

Cette obsession pour les médias et surtout le ton adopté ces derniers jours ont inquiété jusque dans les rangs républicains. « Évidemment, je ne considère pas cela comme des commentaires appropriés », a déclaré Paul Ryan le « speaker » républicain de la chambre des représentants. « Inapproprié. Indigne. Pas présidentiel », a tweeté l’ancien candidat à la primaire républicaine Jeb Bush. Le sénateur républicain de l’Oklahoma, James Lankford a pour sa part estimé que ces tweets « n’aidaient pas le discours politique et ne donnaient pas un modèle positif pour notre dialogue national ». « C’est indigne d’un président et il faut que cela cesse », s’est aussi exclamée sa collègue du Maine Susan Collins.

Depuis jeudi, les éditoriaux et les débats sur ces commentaires présidentiels ont quasiment éclipsé toute autre actualité. Samedi le New York Times y a encore consacré son éditorial, revenant sur le caractère misogyne et insultant des attaques. « Apparemment, il ne se rend pas compte qu’il est une gêne pour lui-même », écrit le quotidien, qui se demande si la « vulgarité » de M. Trump servira désormais de modèle pour les futurs présidents. Seule la garde rapprochée de M. Trump et ses partisans sur Twitter ont défendu cette attitude vindicative. « Les Américains ont élu un combattant. Il combat le feu avec le feu », a affirmé la porte-parole de la Maison Blanche, Sarah Huckabee. Même sa femme, Melania, qui s’est engagée à combattre le harcèlement sur internet, a cru bon de rappeler dans un communiqué que « quand son mari est attaqué il rend les coups au centuple ».

Pour ses plus fidèles partisans, la guerre que l’administration Trump a déclenchée avec la presse relève d’une stratégie. Elle aurait pour objectif de conforter la base trumpiste dans l’idée que les médias généralistes ont une couverture partiale du président. Et qu’il est donc en droit de les critiquer.