Des tampons photographiés à Londres, au Royaume-Uni, 18 mars 2016. | REUTERS/Stefan Wermuth

Les femmes utilisent en moyenne 11 000 tampons au cours de leur vie, mais le produit commence à soulever des craintes chez ses utilisateurs. Le documentaire Tampon, notre ennemi intime, diffusé sur France 5 le 25 avril, soulignait la présence de produits toxiques dans leur composition. En 2012, l’amputation du mannequin Lauren Wasser, victime du syndrome du choc toxique causé par son tampon, a permis la médiatisation de cette maladie infectieuse, qui touche une vingtaine de femmes par an en France.

Cette année, un nouveau type de protection hygiénique a fait son entrée en grandes surfaces : la coupe menstruelle. Alternative saine, écologique et économique aux tampons, la « cup » semblait être la protection idéale… Jusqu’à la publication, mardi 4 juillet, des résultats d’une première étude réalisée par les Hospices civils de Lyon (HCL), qui pose la question de sa nocivité.

Le professeur Gérard Lina, chef de service aux HCL, a dirigé cette étude en confrontant différentes marques de tampons et de coupes menstruelles à un milieu imitant l’intérieur du vagin. Il déplore les conclusions alarmistes parfois mises en avant par les médias et une mauvaise interprétation des résultats, qu’il considère au contraire comme rassurants. « Les résultats ont été mal interprétés. Coupes menstruelles ou tampons, les produits présents aujourd’hui sur le marché sont de bonne qualité », insiste-t-il.

Pourquoi avoir décidé de réaliser cette étude ?

Gérard Lina : Nous avons voulu mener cette étude car, depuis une vingtaine d’années, les protections périodiques ne sont plus analysées, alors que le syndrome du choc toxique existe toujours. Le nombre de victimes de ce syndrome n’a cependant pas augmenté. Les déclarations de malades, qui signalent davantage les chocs toxiques dont elles sont victimes, ont augmenté, mais cela ne signifie pas que plus de personnes ont été atteintes.

Qu’est-ce qu’un choc toxique ?

C’est une maladie infectieuse rarissime mais sévère, potentiellement mortelle. Depuis le début de l’année, 12 cas nous ont été rapportés.

Le choc est causé par la multiplication de staphylocoques dorés au niveau du vagin. Ils se développent en présence de nutriments, présents dans le sang menstruel s’il est « bloqué » au niveau du vagin. C’est ce qui arrive lorsque les protections ne sont pas changées assez régulièrement. Les staphylocoques, s’ils sont présents en grand nombre, se mettent à produire des toxines qui ont la capacité de traverser la paroi du vagin et de se retrouver dans le sang. Le système immunitaire est alors activé, ce qui provoque le choc toxique.

Les personnes les plus touchées sont les jeunes utilisateurs mal renseignés, qui n’ont par exemple pas les bons réflexes d’hygiène, et ceux qui ne changent pas assez régulièrement leurs protections périodiques.

Votre étude prouve toutefois que le développement de staphylocoques diffère selon les protections analysées. Comment l’expliquez-vous ?

Nous avons mené des expériences en essayant de recréer les conditions du vagin. Nous voulions étudier la réaction de l’entrée en contact de protections périodiques et de staphylocoques. Pour beaucoup de coupes menstruelles et de tampons, l’effet était neutre. Pour certaines marques, nous avons relevé une légère augmentation du nombre de staphylocoques. C’est ce que certains médias ont interprété comme étant des résultats révélateurs de risques. Mais ces variations de courbe ne sont pas significatives. Elles sont trop faibles et sûrement présentes car il est impossible de reproduire parfaitement les conditions de l’intérieur du vagin.

La conclusion à laquelle nous sommes arrivés est que les produits à disposition en France aujourd’hui sont de bonne qualité et qu’aucune protection testée ne favorise la croissance et la production de la toxine. Le risque de choc toxique est cependant toujours présent lors de l’utilisation de coupes menstruelles ou de tampons, même si la maladie est très rare.

Quelles sont les précautions à prendre pour éviter les chocs toxiques ?

Il faut que les utilisateurs aient une meilleure utilisation des protections, et surtout qu’ils en changent régulièrement. Un temps court d’utilisation ne laisse pas aux staphylocoques le temps de se multiplier et de produire la toxine responsable du choc toxique.

L’autoapprentissage, avec des tutoriels ou à l’aide de notices, ne semble pas suffire. Il faut qu’un agent de santé fasse office d’intermédiaire entre les fabriquants et les consommateurs. C’est le cas pour certains médicaments, dont le mode d’utilisation est expliqué par un pharmacien ou un médecin.

Vendredi dernier, nous avons lancé une étude sur les modes d’apprentissage en France afin d’analyser comment les jeunes sont formés à l’utilisation de tampons ou de coupes menstruelles. Le but est de découvrir quel support pédagogique ils utilisent en fonction de leur âge, et quelles informations ils en retirent. Les conclusions nous permettront d’envisager d’autres modes d’apprentissage.

Nous travaillons également sur une autre étude, pour laquelle nous avons récolté des tampons usagés. Le but est de comparer la composition du sang menstruel de personnes ayant développé un choc toxique menstruel et de personnes saines.