Depuis le début de l’année 2017, 197 signalements de femmes disparues ont été recensés dans l’Etat du Chiahuahua. 19 d’entre elles n’ont pas été retrouvés, selon les statistiques officielles. | OMAR TORRES / AFP

Depuis les années 1990, Ciudad Juarez, située dans l’Etat du Chihuahua, au nord du Mexique, a hérité du triste surnom de ville « où disparaissaient les femmes ». Les chiffres qui permettent de comprendre le niveau de violence dans cette localité frontalière des Etats-Unis s’étaient éloignés, ces dernières années, des niveaux critiques atteints entre 2006 et 2010.

Depuis 2016, ils explosent à nouveau, dans la région et dans le reste du pays, conséquence de la guerre renouvelée entre cartels de narcotrafiquants, du fonctionnement toujours précaire des institutions et de la corruption. A Juarez, les meurtres et les kidnappings touchent tous les pans de la société, mais les femmes en sont victimes de façon dispropotionnée en comparaison avec le reste du pays.

Pour tenter d’endiguer à nouveau ce cycle de violences, chaque initiative compte pour les autorités locales. Elles en ont dévoilé une, le 6 juillet, dans le cadre d’un projet baptisé « Corredor Seguro » (« Corridor sûr »). Celle-ci n’aurait pas pu exister il y a dix ans quand la sombre renommée de Ciudad Juarez devenait mondiale.

Imaginée par l’Institut municipal des femmes, un organisme crée par la municipalité, l’application « Nos Estoy Sola » (« Je ne suis pas seule ») permet aux femmes qui se retrouveraient en danger de pouvoir immédiatement appeler leurs proches. « C’est un outil de prévention et de réduction des risques destiné particulièrement aux jeunes », dit l’organisme.

Secouer le portable pour que des SMS soient envoyés

L’application est faite pour être utilisée dans des situations extrêmes où chaque seconde compte. Après l’avoir installée et y avoir ajouté cinq contacts, il suffit de secouer le portable pour que des SMS soient envoyés ainsi que la localisation, s’il y a le réseau nécessaire. « Nous ne cherchons pas à inquiéter notre communauté », a dit lors du lancement le maire de Juarez, Armando Cabada.

« Nous voulons que les jeunes filles puissent immédiatement nous donner des informations si elles se sentent en danger (…). C’est important qu’elles comprennent qu’elles ne sont pas seules. »

L’application, gratuite, est testée depuis plusieurs années dans d’autres pays où le taux de « féminicide » (l’homicide d’une femme parce qu’elle est une femme) est élevé, comme l’Argentine. La particularité de la version lancée à Juarez est qu’elle court-circuite les services de police. Veronica Corchado, directrice de l’Institut municipal des femmes, explique cela par le manque de confiance de la population en général, et des femmes en particulier, envers les policiers.