Le pianiste Herbie Hancock en concert au festival de jazz de Montreux Jazz Festival, le 2 juillet 2017. | Cyril Zingaro / AP

Les musiciens de jazz qui de nos jours peuvent mettre sur une affiche, avec leur nom, la mention « World Tour » (tournée mondiale), se comptent sur les doigts d’une main. C’est le cas pour le pianiste et compositeur américain Herbie Hancock. Et en plus celle-là, à la manière des vedettes du rock ou de la pop, dure plusieurs mois, dans plusieurs pays européens et aux Etats-Unis. Elle a débuté à l’Alfa Jazz Festival, en Ukraine, le 26 juin, et devrait se terminer à la Philharmonie de Munich, le 29 novembre.

Ce long périple mène Hancock et ses musiciens – le guitariste Lionel Loueke, le claviériste et saxophoniste Terrace Martin, le ­bassiste James Genus et le batteur Vinnie ­Colaiuta – dans des salles prestigieuses (dont la récente Seine musicale, à Boulogne-Billancourt) et des festivals de grande envergure (Montreux, North Sea, Jazz à Vienne, en Isère, Pori, Saint-Sébastien, Marciac…). Et puis, il y a ce passage, dimanche 9 juillet, au Saveurs jazz de Segré (Maine-et-Loire), au nord-ouest d’Angers. A Segré, le festival s’est déplacé pour sa 8édition, du 6 au 10 juillet, du Parc des expositions, structure en dur, façon hangar, pour les jardins du Parc de Bourg-Chevreau. Avec des arbres, de la pelouse, une petite scène pour les concerts dans l’après-midi et un chapiteau qui peut recevoir de 1 000 à 1 500 spectateurs.

Hancock, superstar du jazz, qui joue pour des foules de milliers de spectateurs à Vienne, Nice, Marciac, etc. est donc à Segré. On s’interroge. Il aurait des amis dans le coin ? Non. ­Segré serait située entre une précédente ville et la suivante dans sa tournée ? Encore moins. Le groupe était à Rotterdam le 8 juillet et repart pour Stuttgart le 10 juillet. Dans le genre traversée d’est en ouest, puis d’ouest en est, cela fait du kilométrage. « Nous sommes encore un festival modeste, c’est vrai, explique Nicolas Folmer, trompettiste, compositeur et programmateur du festival, mais qui s’est construit aussi avec une bonne réputation professionnelle. C’est quelque chose qui compte. » Même avec un public moins nombreux qu’ailleurs et un trajet a priori fatigant.

Herbie Hancock termine en sautant comme un cabri par l’interprétation de « Chameleon » avec son AX-Synth Roland

A priori, car Herbie Hancock, en provenance de Rotterdam, arrivé à Segré en début d’après-midi, 77 ans depuis le 12 avril, pourrait en remontrer à bien des jeunesses. A la sortie du bus, c’est le réglage des instruments et du son durant près d’une heure et demie. Concert à 20 heures… pendant près de deux heures. Avec des thèmes harmoniquement et rythmiquement pas de tout repos, prétextes à des improvisations, Actual Proof, Come Running to Me, Secret Sauce, une nouveauté, Cantaloupe Island, l’un de ses « tubes »…

Un concert que Hancock termine en sautant comme un cabri, par l’interprétation de Chameleon avec son AX-Synth Roland, clavier tenu en bandoulière comme une guitare. Tout du long, Hancock ne s’est pas économisé, en particulier dans des interventions solistes dynamiques au piano acoustique, avec ce toucher tout en attaque et délié. Un ­salut au public. Des remerciements aux organisateurs du festival. ll fait nuit. Le maître des claviers, homme du jazz et de ses alliances avec le funk, le hip-hop dès le début des ­années 1980, et les musiques du monde, est prêt. En route pour Stuttgart.