La Pinacothèque de Paris, dans 8e arrondissement de Paris, en 2011. | JACQUES DEMARTHON / AFP

A l’heure où certains dressent un tableau pessimiste sur l’avenir du commerce de centre-ville, le fonds de pension des professions libérales et des employés municipaux allemands BVK (Bayerische Versorgungskammer), qui gère environ 65 milliards d’euros d’actifs, croit, lui, en son potentiel. Selon nos informations, il a acquis l’immeuble du 28, place de la Madeleine dans le 8e arrondissement de Paris qui abritait jusqu’alors La Pinacothèque.

En vente par Crédit agricole assurances depuis le placement en redressement judiciaire du musée privé, le bâtiment sur trois étages et 1 452 m² surplombe la grande place de la Madeleine à Paris, en pleine transformation. Outre l’arrivée de nouvelles enseignes, elle fait partie du vaste projet de la Ville de Paris de rénovation et piétonisation de sept places dans Paris.

Signe de l’intérêt de BVK pour l’immobilier commercial, il a mandaté depuis 2015 le groupe américain privé Hines, qui gère 96,5 milliards de dollars (85 milliards d’euros) dans le monde. Objectif : gérer et investir à long terme 1,3 milliard d’euros en trois ans dans l’immobilier commercial haut de gamme de centre-ville en Europe, dont environ 300 millions d’euros en France.

BVK n’en est pas à son premier achat dans Paris. Déjà propriétaire d’un magasin boulevard des Capucines et d’un autre sur les Champs-Elysées, il a acquis, en novembre 2016, l’emblématique marché Saint-Germain, classé monument historique, situé dans le 6arrondissement, pour 130 millions d’euros. Ce centre commercial de ville de 4 602 m2, avait été repris en 2009 par la foncière Banimmo France qui l’a entièrement remis à neuf et commercialisé. Il abrite, depuis son inauguration fin 2016, quatre commerces d’envergure (Apple, Nespresso, M&S Food, Uniqlo).

Un segment moins risqué

« Des enseignes comme Apple ont besoin d’une expérience physique locale, même si l’essentiel du chiffre d’affaires se fait sur Internet, constate un spécialiste du secteur. Pour certaines marques, la boutique n’est pas forcément un lieu de vente, et le loyer peut parfois faire partie du budget communication ou marketing. »

Sur l’enveloppe de 1,3 milliard d’euros, 900 millions ont déjà été investis en un an en Europe. En France, le terrain de chasse porte sur Paris mais aussi dans cinq grandes villes (Lyon, Lille, Marseille, Bordeaux et Toulouse), principalement sur quelques rues très commerçantes et touristiques. Car le mandat de BVK est très précis : les acquisitions recherchées correspondent à des boutiques ou des immeubles entiers, où les revenus issus du commerce doivent être majoritaires et exclusivement situés dans des emplacements de grande affluence. Du « high street retail » dans le jargon des professionnels, qui exclut de facto les centres commerciaux situés en périphérie de ville. Le critère d’emplacement dans une zone touristique internationale, qui permet aux commerces d’ouvrir le dimanche et en soirée, est aussi un élément clé.

Si le fonds de pension allemand investit sur ce segment, c’est qu’il est moins risqué que l’immobilier de bureau et plus rentable. « Les loyers de bureau les plus élevés restent très en deçà de ceux constatés dans le commerce haut de gamme. 850 euros le m² pour des loyers premium de bureau, contre plus de 15 000 euros pour les meilleurs commerces, comme le bon côté du haut des Champs-Elysées ou l’avenue Montaigne », constate un expert. Pour l’ensemble du marché Saint-Germain, le montant des loyers perçus par an s’élèverait à 4,3 millions d’euros par an.