Plus de 300 000 euros, intérêts compris : c’est le montant de l’ardoise laissée par Marine Le Pen au Parlement européen, dont elle vient tout juste de démissionner pour occuper son siège de députée du Pas-de-Calais à l’Assemblée nationale. Ce montant substantiel est lié à l’affaire des emplois présumés fictifs d’assistants d’eurodéputés du Front national : il correspond aux salaires qui auraient été indûment versés à deux de ses assistants, Catherine Griset et Thierry Légier.

L’annonce de la démission de Mme Le Pen a été faite début juillet, en séance plénière, à Strasbourg, avec effet rétroactif au 19 juin (soit au lendemain de son élection au Palais-Bourbon). Elle est remplacée par une de ses suivantes de liste, Christelle Lechevalier-Letard.

Or, son départ interrompt de facto les retenues effectuées sur les indemnités et les autres rémunérations (frais généraux et indemnités journalières) qu’elle percevait. Cette mesure administrative de recouvrement avait été mise en place après qu’un rapport de l’OLAF, l’organisme anti-fraude de l’Union européenne, a conclu, en juillet 2016, à une fraude concernant notamment Mme Le Pen et ses deux assistants parlementaires. Une somme de près de 340 000 euros lui a été réclamée au total : seuls 39 000 euros ont été perçus à ce jour.

Le préjudice total est estimé à 5 millions d’euros

Le Parlement européen va donc devoir attendre l’issue de l’information judiciaire ouverte en France, en décembre 2016, sur cette affaire d’emplois fictifs présumés pour « abus de confiance », « recel d’abus de confiance », « escroquerie en bande organisée », « faux et usage de faux » et « travail dissimulé », afin de pouvoir recouvrer la totalité de l’argent public qui a été possiblement détourné. Mme Le Pen a été mise en examen dans ce dossier, le 30 juin, pour « abus de confiance ». Cette procédure est très large, puisqu’elle qui vise 17 eurodéputés FN, soupçonnés d’avoir salarié fictivement une quarantaine d’assistants, qui n’auraient travaillé que pour le compte du parti d’extrême droite, en France, et non pour l’institution européenne. Le préjudice total est estimé à 5 millions d’euros par le Parlement européen.

Dans le cas de la présidente du Front national, l’institution peut tout juste espérer, pour l’instant, récupérer quelques dizaines de milliers d’euros supplémentaires d’ici à la fin de l’enquête judiciaire. L’ex-eurodéputée peut en effet demander à toucher les indemnités transitoires auxquelles elle peut prétendre, comme tout eurodéputé sortant, un an durant. Une telle option permettrait, de fait, au Parlement d’en saisir une partie – sur un total de l’ordre de 30 000 euros –, ce qui allégerait d’autant la dette de la présidente frontiste, dont les intérêts de retard continuent à courir.