Paris et Berlin, accompagnés de nombreux partenaires, ont lancé, jeudi 13 juillet, l’Alliance pour le Sahel, une initiative visant à faciliter les échanges entre les principaux bailleurs de fonds de l’aide au développement dans cette région. C’est l’Agence française de développement (AFD, partenaire du Monde Afrique) qui est chargée de l’utilisation des fonds français pour ce type de projet. Trois questions à Rémy Rioux, son directeur.

Qui sont les partenaires de l’Alliance pour le Sahel ? Donald Trump, en visite aujourd’hui à Paris, pourrait-il être l’un d’eux ?

Rémy Rioux Il y a bien sûr la France et l’Allemagne, mais aussi l’Union européenne, représentée par la Commission européenne, l’équipe de Federica Mogherini [cheffe de la diplomatie européenne], la Banque Mondiale, la Banque africaine de développement (BAD), et le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Le président Macron s’est engagé à verser 200 millions d’euros dans une initiative qui s’appelle Tiwara. Tiwara, c’est la petite gazelle qui court dans le Sahel. Pour nous, c’est elle qui protège la force française « Barkhane ».

Mais nous ne sommes pas dans « Barkhane », la partie militaire, notre initiative est distincte. On lui a donné des noms qui correspondent afin de montrer que les deux efforts sont coordonnés au sein d’un même objectif : la sécurisation du Sahel. Concernant Donald Trump, l’initiative n’est évidemment pas fermée ! S’il y a d’autres contributeurs, d’autres forces qui veulent se préoccuper du Sahel, elles sont les bienvenues. Je sais que les Américains se préoccupent du Sahel, mais seulement d’un point de vue militaire. J’ignore si la position du président est très favorable au développement…

Quelles sont les priorités de l’Alliance pour le Sahel ?

On a établi un calendrier sur cinq ans, et identifié des secteurs prioritaires : l’emploi des jeunes, donc l’éducation et la formation, le développement rural et l’agriculture, domaine qui a le plus grand potentiel dans le Sahel, le climat et l’énergie, la gouvernance, c’est-à-dire un soutien aux systèmes judiciaires, à la société civile et à la décentralisation. On va se fixer des objectifs sur chacune des priorités, à atteindre collectivement, dans une forme de mise en œuvre qui nous associe tous. Et puis on va se pencher sur des schémas de développement innovant, puisque la difficulté dans le Sahel, c’est qu’il faut intervenir dans des zones où souvent l’Etat est affaibli, voire a disparu. La question c’est : par quels canaux, par quels suivis, par quels opérateurs, est-on capable d’atteindre les populations de ces zones « en stress » et leur montrer qu’il y a une action publique qui les concerne ?

Les Africains étaient-ils dans le processus de décision ?

Tout a commencé chez eux, à Bamako, le 2 juillet. Le président Macron a parlé avec les chefs d’Etat du G5 – Mauritanie, Mali, Tchad, Burkina Faso et Niger –, et ce n’est qu’avec leur accord, évidemment, qu’il s’est exprimé et rapproché de la chancelière allemande et de la Commission européenne. Maintenant, on a constitué un groupe des institutions concernées qui ont beaucoup de moyens. Reste à savoir si l’Alliance pour le Sahel dans sa forme actuelle obtiendra l’assentiment des cinq pays, et du secrétariat du G5. Dans ce cas, on pourra commencer la mise en œuvre les étapes que l’on a définies pour aboutir à quelque chose de consistant et de convaincant d’ici à la fin de l’année. Mais l’idée est de tout faire avec les Africains, surtout pas à leur place.