Le vice-président du Parlement vénézuélien, Freddy Guevara, lors d’une conférence de presse à Caracas, le 17 juillet. | Ariana Cubillos / AP

Au lendemain d’un référendum informel contre le régime marqué par une participation massive, l’opposition vénézuélienne a appelé, lundi 17 juillet, à une grève générale de 24 heures jeudi, accentuant sa pression sur le président Nicolas Maduro.

Après trois mois et demi de manifestations quasi quotidiennes, dont certaines ont été violemment réprimées par les forces de l’ordre, la coalition de la Table de l’unité démocratique (MUD) a annoncé une « heure H » pour marquer le début d’une nouvelle vague de protestation. Celle-ci pourrait se traduire par des barrages routiers, des sit-in, voire une marche sur le palais de Miraflores, siège de la présidence, comme lors du bref coup d’Etat contre le prédécesseur et mentor de Nicolas Maduro, Hugo Chavez, en 2002.

Dans un premier temps, c’est l’option d’une grève générale « pacifique » qui a été choisie. Freddy Guevara, un des chefs de file de l’opposition, l’a présentée comme un « mécanisme de pression et de préparation en vue de l’escalade finale, qui sera la semaine prochaine ». L’opposition, a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse, entend en outre nommer un « gouvernement d’unité nationale », en parallèle semble-t-il à l’administration officielle.

Possibilité de dialogue

Le président Maduro, dont le mandat prend fin début 2019, propose aux 30 millions de Vénézuéliens la création d’une assemblée constituante, chargée en principe de rédiger une nouvelle Constitution et qui pourrait abroger l’actuelle législature, où l’opposition est majoritaire. Son élection est prévue le 30 juillet.

« On ne veut pas devenir Cuba. On ne veut pas être un pays privé de libertés », a estimé le leader de l’Assemblée nationale, Julio Borges. Pour Freddy Guevara, maintenir ce projet empêche toute possibilité de dialogue. Un dialogue, affirme-t-il, que l’opposition serait disposée à avoir avec le gouvernement, « mais sans manipulations ni tromperies ».

Trois questions étaient posées dimanche à la population dans le cadre de la consultation populaire informelle mise en place par les antichavistes. A une large majorité (98 %), les votants ont rejeté la Constituante voulue par le pouvoir, se sont prononcés pour que l’armée défende la Constitution en vigueur et pour la tenue d’élections avant la fin du mandat de Nicolas Maduro, ont rapporté les universitaires convoqués en tant qu’observateurs.

« Gestes politiques »

Freddy Guevara, le vice-président du Parlement vénézuélien lors d’une conférence de presse à Caracas, le 17 juillet. | CARLOS GARCIA RAWLINS / REUTERS

Près d’un quart de la population du Venezuela a participé au référendum. Une proportion qui se rapproche sensiblement des 7,7 millions de suffrages obtenus par l’opposition aux élections législatives de décembre 2015, et des 7,3 millions de voix rassemblées à l’élection présidentielle de 2013, remportée de justesse par Nicolas Maduro.

La consultation symbolique a reçu le soutien des Nations unies, des Etats-Unis et de plusieurs gouvernements d’Amérique latine et d’Europe. La chef de la diplomatie de l’UE Federica Mogherini a appelé Caracas à des « gestes politiques » pour « faire retomber la tension ».

Washington a estimé qu’il s’agissait d’une « déclaration sans ambiguïté » de condamnation du régime. Le président Donald Trump a même menacé de prendre des mesures « économiques fortes et rapides » contre le gouvernement s’il mettait à bien son projet d’Assemblée constituante.

L’opposition accuse le gouvernement d’être responsable de la crise économique qui étouffe le Venezuela, frappé de plein fouet par la chute des cours du pétrole alors que 95 % des devises proviennent de l’or noir. L’inflation est à trois chiffres. Aliments et médicaments sont soumis à des pénuries.

Les violences qui secouent le pays ont fait 95 morts depuis avril, et plusieurs milliers de blessés. Le dernier décès est survenu dimanche à Caracas : une femme de 61 ans qui se trouvait parmi un groupe d’électeurs à Catia, un quartier pauvre de la capitale, a été tuée par arme à feu.