Un opposant à Caracas, mercredi 19 juillet. | RONALDO SCHEMIDT / AFP

La journée de jeudi 20 juillet au Venezuela sera marquée par une grève générale de 24 heures à l’appel de l’opposition, portée par le vote massif de 7,6 millions de personnes lors de la récente consultation symbolique contre le président Nicolas Maduro et son projet de modifier la Constitution.

Le pays est perturbé depuis bientôt quatre mois par une vague de manifestations violentes qui ont fait près d’une centaine de morts, accompagnées de blocages de rue dans une économie au ralenti.

La grève, qui devait commencer à 6 heures locales (12 heures en France) entend symboliser la montée en puissance des protestations qui ont débuté le 1er avril.

Les antichavistes – du nom d’Hugo Chavez, président de 1999 à sa mort en 2013, dont M. Maduro est l’héritier – sont lancés dans un contre-la-montre : dans dix jours, les 545 membres de l’assemblée constituante seront élus avec pour mission de réécrire la Constitution.

« J’ai sept ouvriers et je vais leur payer la journée. Peu importe de perdre une journée de travail quand on est en train de perdre un pays. Je rejoins la mobilisation pour essayer de sauver le peu qui nous reste, pour accroître la pression », a expliqué Omar, 34 ans, patron d’une petite entreprise de bâtiment au sud-est de Caracas. Outre la grève générale, l’opposition a appelé à des blocages de rue.

Maduro droit dans ses bottes

Confronté à une intense pression diplomatique, le chef de l’Etat socialiste assure que la Constituante continuera contre vents et marées « pour la paix et le redressement économique » du pays.

« Elle continue, plus que jamais », a souligné mardi M. Maduro, en rejetant les menaces de sanctions économiques « fortes » de Donald Trump en cas de maintien du projet.

La grève générale est soutenue par le patronat, les chambres de commerce et d’industrie, une partie des syndicats, les étudiants et les entreprises de transport.

Certains secteurs économiques, accusés par le président de mener une « guerre économique » contre le pays, craignent l’instauration, via la Constituante, d’un modèle économique « à la cubaine » qui aggraverait la situation économique du pays, selon eux.

Entreprises menacées de sanctions

Mais le gouvernement, qui a menacé de sanctions les entreprises qui rejoindront la grève, dispose de son côté de la très stratégique industrie pétrolière et la fonction publique qui compte près de trois millions d’employés.

« Une grève dans un pays pétrolier où le gouvernement contrôle cette production revient à un bras de fer financier opposant l’entrepreneuriat et une population affamée et appauvrie à un gouvernement également ruiné, mais qui contrôle les maigres ressources du pays », estime Luis Vicente Leon, de l’institut Datanalisis.

Marcela Maspero, coordinatrice de l’Union des travailleurs du Venezuela (Unete), une des principales du pays, a assuré qu’un grand nombre de travailleurs « sont soumis à des pressions », mais participeront néanmoins à la grève générale.

« Ces jours-ci sont déterminants pour savoir si le gouvernement comprend qu’une sortie pacifique et démocratique de la crise, pour les travailleurs, cela signifie retirer la Constituante », a déclaré le dirigeant syndical Froilan Barrios.

Sévère pénurie

Frappé par une sévère pénurie d’aliments et de médicaments et une inflation galopante, le Venezuela, autrefois riche pays pétrolier, a perdu 70 % des ses entreprises ces dix dernières années et celles qui restent fonctionnent à 30 % de leurs capacités, selon le syndicat patronal Fedecamaras.

« L’assemblée constituante n’est rien d’autre qu’une manière de déguiser la transformation du Venezuela en un Etat communiste », assure le président de Fedecamaras, Carlos Larrazabal.

Des blocages de rue spontanés ont eu lieu mercredi, à la veille de la mobilisation. Alors que 70 % des Vénézuéliens rejettent l’assemblée constituante, selon l’institut Datanalisis, les analystes estiment que des actions comme celle de jeudi sont « nécessaires mais insuffisantes ». Seule l’armée, soutien inconditionnel de Maduro, pourrait faire pencher la balance, juge le politologue Luis Salamanca.

Mais cela semble peu probable : mercredi encore, en écartant les menaces de Donald Trump, le ministre de la défense, le général Vladimir Padrino Lopez, a promis de défendre l’élection de l’assemblée constituante.

La crise au Venezuela expliquée en quatre minutes
Durée : 03:58