De l’autre côté de la Manche, les publicités pour la lessive montrant une mère de famille qui nettoie les tee-shirts sales de ses enfants turbulents sont à deux pas d’appartenir au passé. Le 17 juillet, l’Advertising Standards Authority (ASA), l’organisme indépendant qui définit les règles de l’industrie de la publicité au Royaume-Uni, a publié le rapport Depictions, Perceptions and Harm (« représentations, perceptions et préjudice »).

Dans celui-ci, elle préconise un renforcement de la législation concernant les campagnes publicitaires qui reproduisent les stéréotypes de genre. Elle souhaite interdire les publicités qui « représentent des membres d’une famille mettant le désordre tandis qu’une femme est la seule responsable du nettoyage », celles qui « suggèrent qu’une activité est inappropriée pour une fille car stéréotypiquement associé aux garçons, et vice versa », ou encore celles dans lesquelles « un homme échoue à réaliser une tâche parentale ou domestique simple ».

L’ASA n’en est pas à son coup d’essai. Elle avait déjà fait interdire la diffusion de publicités accusées d’abus de Photoshop (logiciel de retouche photo), comme ce clip pour la marque Rimmel avec le mannequin Cara Delevingne, ou dont les modèles affichent une trop grande maigreur, comme cette campagne Gucci, en 2016.

Au-delà des normes de beauté

Mais avec ce rapport, un pas de plus est franchi. Il ne s’agit plus seulement de bannir les images qui objectivent la femme ou lui imposent des normes de beauté inatteignables. L’ASA inclut désormais celles qui enferment chaque sexe dans un rôle socialement prédéfini.

« Notre étude montre que certains stéréotypes présents dans la pub peuvent contribuer à nuire aux adultes et aux enfants, explique Ella Smillie, qui a coordonné l’enquête. Ces portraits répétés limitent la perception qu’ont les gens d’eux-mêmes et les choix qu’ils font dans la vie. (…) Nos recommandations permettront à la société moderne d’être mieux représentée. »

Ces avancées vers une représentation moins normée dans les publicités sont en partie le fruit d’un combat de longue haleine mené par Jo Swinson, membre du Parlement. L’élue du Parti libéral-démocrate bataille depuis 2009 pour mettre au centre du débat politique la question du sexisme dans le marketing.

Pétitions et dépôts de plainte

Le rapport arrive aussi après plusieurs polémiques qui ont mobilisé les Anglais sur les réseaux sociaux et ailleurs. En 2016, c’est une publicité d’habits pour enfants, Gap Kids, qui fait parler d’elle. Le montage photo en question présente un garçon comme le « petit étudiant » et une fille comme le « papillon social », accompagné de la phrase : « Votre futur commence ici. »

« Cette publicité résume assez bien tout ce que je méprise dans la façon dont on traite et valorise le corps des femmes. »

Un an plus tôt, une campagne de la marque de compléments alimentaires Protein World, dans le métro, a déclenché l’ire des Londoniens. On y voyait un top-modèle en bikini avec la mention « Votre corps est-il prêt pour la plage ? » Une pétition pour réclamer son retrait avait récolté plus de 70 000 signatures et près de 400 plaintes avaient été déposées, la jugeant notamment « socialement irresponsable ». L’ASA n’avait alors pris aucune mesure.