Euclide Tsakalotos, ministre des finances grec et Pierre Moscovici, commissaire européen aux affaires économiques, le 20 mars à Bruxelles. | EMMANUEL DUNAND / AFP

A un an de la fin du troisième plan d’aide à la Grèce, les créanciers et le gouvernement hellène commencent déjà, au cœur de l’été, à travailler à un futur « retour à la normale » pour le pays. Après sept longues années de mise sous tutelle financière, cette étape nécessite forcément d’être anticipée, et reste très délicate.

Mardi 25 juillet, le commissaire européen Pierre Moscovici devrait faire le voyage à Athènes, pour rencontrer le premier ministre de la gauche radicale Alexis Tsipras et son ministre des finances Euclide Tsakalotos. Le Français qui depuis début 2017, ose qualifier le lent redressement macroéconomique grec de « success story », veut profiter du déplacement pour envoyer de nouveaux messages positifs. Aux Grecs et aux marchés financiers.

Dès vendredi, il a déclaré que l’accord du FMI constitue un « signal très positif pour les marchés ». « La décision prise par le FMI est une très bonne nouvelle. Il s’agit là d’un nouvel indicateur positif de retour de la confiance des partenaires internationaux de la Grèce », a-t-il ajouté, dans une déclaration à l’AFP.

A Athènes, la semaine prochaine, il devrait se féliciter que le pays ait bénéficié tout récemment d’une nouvelle tranche de prêts de 7,7 milliards d’euros du Mécanisme européen de stabilité (MES). Ces sommes sont déboursées dans le cadre du troisième plan d’aide, qui prévoyait initialement jusqu’à 86 milliards d’aides pour Athènes, et dont à ce jour 37 milliards ont été alloués.

Une quatorzième réforme des retraites

M. Moscovici a aussi prévu d’aborder les futures réformes souhaitées par les créanciers, dans le cadre de la « troisième revue » du plan d’aide, devant déboucher, aux alentours de fin 2017, sur le déboursement d’un autre très gros chèque pour Athènes. Le gouvernement Tsipras a déjà accepté de multiples mesures fiscales, une quatorzième réforme des retraites et une libéralisation du marché du travail hellène.

L’ex-ministre de l’économie du gouvernement Ayrault devrait aussi saluer la validation formelle, vendredi 21 juillet, par le Fonds monétaire international (FMI) d’un plan d’aide « de principe » de 1,6 milliard d’euros pour Athènes, conditionné à une évaluation, dans les mois qui viennent, de la soutenabilité de la dette grecque. Cette décision, complètement politique (« la Grèce n’a absolument pas besoin de ces prêts supplémentaires », soulignent deux sources proches des créanciers), met fin à un long bras de fer entre les Européens et le FMI.

Les Néerlandais, les Finlandais et surtout les Allemands réclamaient depuis deux ans que le Fonds participe au troisième plan d’aide, considérant que sa présence est un gage de sérieux pour surveiller la mise en place des réformes en Grèce. Mais le FMI était divisé et exigeait au préalable un allégement conséquent de l’énorme dette publique grecque (environ 180 % de son produit intérieur brut) que les Allemands leur refusaient. Le prêt « en principe » permet à tout le monde de sauver les apparences.

Avant goût des difficultés

La question de l’allégement de la dette hellène, réclamé par le gouvernement Tsipras depuis deux ans, reviendra à l’agenda, mais après les élections allemandes (fin septembre), Berlin ayant tout fait pour éluder le sujet ces derniers mois. Elle est encore très loin de faire consensus, même si certains, à la Commission, considèrent qu’un allongement des « maturités » (durée des remboursements) et une baisse supplémentaire des taux sont indispensables au pays pour parvenir à se refinancer seul à partir de l’été 2018.

La Grèce a tenté ces derniers jours un retour en forme de « test » sur le marché obligataire. Elle a dû remettre l’expérience pour un problème apparu au dernier moment : si elle levait de nouvelles obligations, elle augmentait à la marge son endettement et risquait de crever le plafond sur lequel s’est basé le FMI pour valider son prêt « de principe ».

Ce n’est que partie remise mais donne un avant-goût des difficultés liées à la « sortie de crise » grecque. Personne côté créanciers n’envisage un quatrième plan d’aide au pays : cela parait politiquement irréaliste. M. Tsipras n’avait t-il été élu, début 2015, pour en finir avec la tutelle des créanciers ? Certains à Bruxelles planchent pourtant sur une sortie « accompagnée » pour Athènes, des fonds additionnels (pourquoi pas les profits réalisés par la BCE dans le cadre de ses rachats d’obligations grecques) disponibles pour le pays à condition qu’il avance encore un peu dans les réformes.

« Athènes doit poursuive la modernisation de l’administration, de la justice, pour se doter enfin, d’un vrai cadastre, toujours partiel », souligne un diplomate bruxellois, « [si le gouvernement] s’arrête à mi-chemin, [la Grèce] risque de rechuter. » Quelle que soit la forme que prendra le plan d’aide à l’avenir, les Européens n’ont pas le choix, ils vont devoir poursuivre en ce sens. Une décision a été prise au sommet, en juillet 2015, entre Angela Merkel, François Hollande et les autres dirigeants de l’époque, de garder le pays dans la zone euro. Maintenant, ils doivent assumer.