Les deux candidats avaient annoncé début juillet qu’ils ne participeraient pas à ce débat, organisé lundi soir du 24 juillet, évoquant notamment des désaccords sur le format. Mais finalement, après modification, M. Odinga, principal candidat d’opposition, avait accepté d’y participer. Le suspense est resté intact jusqu’à la dernière minute lundi quant à la participation de M. Kenyatta. Finalement, le président kényan a boudé le rendez-vous télévisé sans donner d’explications.

M. Odinga a donc eu quatre-vingt-dix minutes pour expliquer ses projets, attaquer le président et le gouvernement sortants et défendre le travail accompli lorsqu’il était premier ministre après les élections controversées de 2007 qui avaient abouti à un partage du pouvoir. Ce numéro de soliste s’est déroulé alors que plusieurs sondages prédisent un scrutin extrêmement serré.

« Vis-à-vis du pays, Uhuru Kenyatta se devait de participer, de répondre de ses cinq années » à la présidence, estimait lors d’une analyse après ce rendez-vous manqué Miguna Miguna, un ancien conseiller de M. Odinga et candidat indépendant pour être gouverneur de Nairobi. « Je pense que c’était une erreur monumentale. C’était un mauvais calcul, une incompréhension délibérée ou naïve de ce qu’être président signifie », a-t-il ajouté.

D’autres analystes jugeaient que cette absence donnait un coup de pouce à M. Odinga. Mais un responsable de la campagne de Kenyatta a répliqué : « Nous n’en voyons pas l’intérêt, c’est un débat qui n’affectera pas le scrutin du 8 août. »

La crainte du retour des troubles

Le 8 août, quelque 19 millions d’électeurs sur une population d’environ 46 millions d’habitants, sont appelés à élire leurs président, gouverneurs, députés, sénateurs et membres des assemblées locales. Les élections au Kenya se jouent rarement sur des programmes, beaucoup plus sur des sentiments d’appartenance ethnique et géographique.

La présidentielle du 8 août verra comme en 2013 s’affronter M. Odinga, 72 ans, ex-premier ministre (2008-2013) et trois fois candidat malheureux à la présidence (1997, 2007 et 2013), et Uhuru Kenyatta. La température électorale dans le pays est montée d’un cran ces dernières semaines, marquées par des accusations acrimonieuses émanant des deux camps.

Ces accusations croisées suscitent l’inquiétude de nombreux observateurs qui craignent qu’elles ne débouchent sur des troubles. Fin 2007-début 2008, le pays avait plongé pendant deux mois dans des violences post-électorales qui avaient fait plus de 1 100 morts, plusieurs centaines de milliers de déplacés et avaient traumatisé la population de ce pays réputé stable.