Le Congrès américain a commencé, lundi 24 juillet, à interroger à huis clos Jared Kushner, gendre et très proche conseiller de Donald Trump, sur ses liens avec le Kremlin avant et après l’élection présidentielle de 2016.

Après plus de deux heures passées lundi devant la commission du renseignement du Sénat, l’intéressé devait se rendre, mardi, devant la commission équivalente de la Chambre des représentants, qui enquête pour déterminer si la campagne russe présumée de désinformation et de piratage contre la candidate démocrate Hillary Clinton a reçu des appuis au sein de l’équipe de son rival républicain.

Le mari d’Ivanka Trump est le premier membre de la garde rapprochée du président à s’expliquer devant les parlementaires. Lundi, il a nié en bloc toute connivence. « Tous mes actes ont été appropriés, dans le cadre normal d’une campagne sans équivalent, a-t-il déclaré devant les caméras à son retour à la Maison Blanche. Je n’ai pas commis de collusion avec la Russie, et je ne connais personne au sein de l’équipe de campagne qui l’a fait. Je n’ai eu aucun contact inapproprié. »

Quatre rencontres

Jared Kushner avait auparavant publié une déclaration écrite de onze pages à l’attention du Congrès détaillant ses interactions, en 2016, avec plusieurs ressortissants russes. Il a ainsi confirmé qu’il avait bien vu deux fois l’ambassadeur de Russie à Washington, Sergueï Kislyak, ainsi qu’un grand banquier proche du président Vladimir Poutine, Sergueï Gorkov, à sa demande. Il s’est aussi souvenu avoir participé durant quelques minutes, en juin 2016, à une réunion organisée par son beau-frère Donald Trump Jr. avec une avocate russe. Soit un total de quatre rencontres.

Mais Jared Kushner a replacé ces réunions dans le contexte de milliers de rendez-vous, de coups de fils et de messages échangés dans une période frénétique. Il raconte par ailleurs que son beau-père lui a demandé d’être le point de contact de la campagne pour les gouvernements étrangers et qu’à ce titre, il a eu plus d’une centaine d’intercations avec des responsables de plus de vingt pays avant et après l’élection.

Et jamais, assure-t-il, la question des sanctions américaines contre Moscou n’a été évoquée. Son message, à chaque fois, a été de proposer un nouveau départ dans la relation bilatérale.

Trump Jr. dans le viseur

« Je ne dépendais pas de fonds russes pour financer mes affaires dans le secteur privé », a-t-il également martelé. Une phrase « à l’évidence élaborée par un avocat malin tentant de protéger son client », a ironisé le sénateur démocrate de l’Oregon Ron Wyden. Ce dernier a affirmé que Jared Kushner jouait sur les mots et qu’il n’a pas tout dit sur ses liens financiers avec des personnes et des entités liées à la Russie. « Les déclarations de M. Kushner n’ont que peu de poids, étant donné son refus de témoigner en public et sous serment », a aussi tancé l’élu démocrate de l’Arizona Raul Grijalva.

Le gendre de Donald Trump n’est pas le seul à intéresser les élus, dont les enquêtes s’ajoutent à celle du procureur spécial Robert Mueller. Le fils aîné du milliardaire, Donald Jr., est actuellement en négociation avec le Congrès pour donner sa version des faits. Pour l’instant, il a réussi à éviter une audition publique, mais c’est bien l’objectif de nombreux parlementaires, démocrates comme républicains.

Il lui est reproché d’avoir invité à la Trump Tower l’avocate russe Natalia Veselnitskaya. Elle lui avait été présentée par un intermédiaire comme une personne porteuse d’informations compromettantes du Kremlin sur Hillary Clinton.

Paul Manafort, l’ancien chef de la campagne de M. Trump est également appelé à témoigner, mais aucune date n’a encore été négociée.

« Des assignations seront sans doute nécessaires pour forcer Trump Jr. et Paul Manafort à témoigner », a averti le sénateur démocrate du Connecticut Richard Blumenthal, membre de la commission de la justice, lundi sur la chaîne MSNBC.

La « chasse aux sorcières » dénoncée par Donald Trump se poursuit donc malgré ses admonestations. Le président a tweeté, lundi, que les commissions feraient mieux d’enquêter sur sa rivale malheureuse à la présidentielle.

Le cas Jeff Sessions

Mais au Congrès, les élus n’ont aucune tolérance pour la Russie. Mardi 25 juillet, la Chambre des représentants votera ainsi – entre autres – pour imposer un nouveau train de sanctions contre Moscou. Pendant ce temps, le président a continué de critiquer son ministre de la justice, Jeff Sessions, auquel il a récemment reproché de s’être récusé dans l’enquête sur l’affaire russe. Lundi matin, il a même évoqué un ministre « assiégé » dans un tweet.

Le Washington Post a affirmé, lundi soir, que cet ancien soutien de la première heure pourrait être renvoyé, et des noms circulent déjà pour le remplacer comme le sénateur texan Ted Cruz ou l’ancien maire de New York, Rudy Giuliani. Ce dernier a démenti cette information et il a déclaré que M. Sessions avait pris « la bonne décision » lorsqu’il s’était récusé, selon la chaîne de télévision CNN.