En 1999, David Fincher adapte à l’écran Fight Club, le roman de Chuck Palahniuk, paru trois ans plus tôt. Le cinéaste vient de signer deux films qui mettent en scène la noirceur de l’Amérique : la déconnexion de la haute société dans The Game, et celle des bas-fonds dans Seven, qui raconte la traque d’un tueur en série. Avec le roman de Palahniuk, il s’attaque à la société de consommation, aux marques qui, grâce à leurs stratégies mondialisées, sont devenues des totems culturels comme les autres. Fight Club est le récit d’une amitié violente entre deux hommes, un narrateur anonyme (Edward Norton) et un représentant en savon (Brad Pitt). La trajectoire de ce duo est truffée de références à des griffes.

Brad Pitt déteste la New Beetle

Ainsi de l’appartement du narrateur qui se transforme en catalogue Ikea, avec des inserts à l’écran qui reprennent la typographie et les noms des modèles du fabricant de meubles suédois. Mais les marques sont aussi présentes de manière plus subtile. Fincher révélera que, dans chacune des scènes du film, on peut deviner un gobelet de café Starbucks, sur le modèle des livres pour enfants Où est Charlie ?. Au cours des années suivantes, les fans du film repéreront chaque occurrence et les publieront sur les forums, alors en pleine explosion.

Bande annonce de « Fight Club »

Fight Club (VF)

Cette envie de s’en prendre à la société de consommation trouve une illustration très littérale dans une scène où Norton et Pitt explosent toutes les voitures d’un parking à coups de battes de base-ball. Ils s’acharnent en particulier sur une New Beetle. Lancée en 1998 par le constructeur allemand Volkswagen, la voiture est une version modernisée de la fameuse Coccinelle. Comme l’expliquera Norton dans un bonus DVD, lui et Brad Pitt s’étaient rendu compte, juste avant le tournage, qu’ils détestaient tous les deux les New Beetle, et avaient demandé à ce qu’un modèle soit présent sur le décor. Ils estimaient que la Coccinelle, utilisée autrefois par les hippies, avait été pervertie. Et que la New Beetle exprimait la récupération de la contre-culture des années 1960 par le néo-libéralisme décomplexé des années 1990. Ironiquement, à la sortie du film, aucune enseigne ne s’est plainte publiquement. C’est qu’en voulant dénoncer l’emprise des marques, Fincher avait disséminé des logos tout au long de son film, sa critique acide s’était transformée en placement de produits.

« Fight Club », de David Fincher, 2 h 19. En salle le 26 juillet.