L’Etat a choisi de nationaliser STX plutôt que d’en confier les clés au groupe italien Fincantieri. Cette opération « temporaire » vise à « défendre les intérêts stratégiques de la France », a précisé le ministre de l’économie. | DAMIEN MEYER / AFP

Une décision « satisfaisante » et « rassurante » pour les uns, qui ne « résout rien » pour les autres : les syndicats du chantier naval STX France de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) sont partagés après l’annonce, jeudi 27 juillet, par le gouvernement de sa nationalisation temporaire.

« C’est une bonne nouvelle, c’est forcément satisfaisant, même si c’est temporaire, transitoire », réagit Nathalie Durand-Prinborgne, déléguée Force ouvrière (FO). Le syndicat milite, en effet, depuis longtemps pour une nationalisation du chantier naval. Pour FO, l’Etat est « le seul véritable actionnaire qui se soit engagé ces dernières années pour sauvegarder ce site, même s’il était minoritaire, en faisant pression sur les banques pour les commandes ». Le gouvernement « dispose maintenant de beaucoup plus de temps (…) pour continuer à négocier », ajoute Mme Durand-Prinborgne.

« Le gouvernement ne lâche pas les négociations en cours [avec l’italien Fincantieri, qui a racheté 66 % des parts au sud-coréen STX Offshore and Shipbuilding], c’est ça qui me rassure », commente pour sa part Christophe Morel, délégué CFDT. Depuis la première mise en vente de STX France par sa maison-mère sud-coréenne, en 2014, rappelle-t-il, « un seul industriel s’est montré intéressé, Fincantieri ».

Le syndicat se félicite ainsi que le gouvernement, qui entend relancer les discussions avec le repreneur italien, n’ait pas choisi « la rupture totale qui nous aurait renvoyé encore, pour de nombreux mois, voire années, dans une incertitude sur notre avenir ».

« On est reparti pour un tour »

Pour la CFE-CGC, syndicat de cadres, l’annonce de la prise de contrôle temporaire par l’Etat du chantier naval « apporte sur le court terme une période de stabilité indispensable pour l’activité, mais ne résout rien sur le fond ». « On est reparti pour un tour », regrette François Janvier, représentant CFE-CGC et qui trouvait « plutôt satisfaisant » l’accord initial trouvé avec le constructeur italien Fincantieri :

« L’Etat ne va pas rester actionnaire pendant vingt ans et, pour l’instant, il ne propose pas d’actionnaire industriel de référence et ça nous gêne. »
« L’Etat s’offre une image de défenseur de l’industrie et des salariés à bon prix »

Pour la CGT, « dans ce bras de fer entre deux gouvernements libéraux, l’Etat français s’offre une image de défenseur de l’industrie et des salariés à bon prix ». Alain Lebrun, délégué CGT, premier syndicat de STX France, se déclare « pas plus rassuré » par la préemption que par la répartition de l’actionnariat initialement proposée :

« La seule chose qu’on regardera, c’est quel actionnaire donne des garanties sociales aux salariés. La CGT sera vigilante là-dessus. »

« Au vu des mesures antisociales que le gouvernement Macron souhaite mettre en place (casse du code du travail, mise en place des CDI de chantier), on peut craindre qu’il n’y ait rien à attendre de la préemption sur le contenu social de l’entreprise », ajoute encore le syndicat dans un communiqué.

Nouveau tour de table

La France, qui dispose d’un peu plus de 33 % de STX France, avait jusqu’à vendredi minuit pour exercer son droit de préemption sur les 66 % restants, actuellement détenus par le sud-coréen STX Offshore and Shipbuilding, la justice coréenne devant entériner samedi la revente des parts détenues par le groupe à l’italien Fincantieri.

Avec l’annonce de cette nationalisation, qui coûtera environ 80 millions d’euros à l’Etat, le gouvernement n’entend pas rester propriétaire des chantiers, mais organiser un tour de table le satisfaisant.

Le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, avait lancé un ultimatum aux autorités italiennes mercredi, les enjoignant d’accepter « un contrôle à 50-50 » des chantiers de Saint-Nazaire entre le groupe Fincantieri et les actionnaires français. Cet ultimatum avait été accueilli par une fin de non-recevoir à Rome.

Dernier grand chantier naval français, STX France emploie 2 600 salariés et fait travailler environ 5 000 employés d’entreprises sous-traitantes.