Aurélien Ducroz participe au quarantième Tour de France jusqu’au 30 juillet. | ERIC GACHET

Fini les montagnes dessinées dans sa voile et sur la coque de son petit trimaran Diam 24, aujourd’hui remplacées par le logo de son sponsor principal. Il s’agissait jusque-là des seuls indices de la première passion d’Aurélien Ducroz, le skippeur de Coved-Paprec, engagé dans le quarantième Tour de France à la voile qui se termine ce dimanche 30 juillet à Nice. Depuis sept ans, ce Chamoniard de 35 ans partage sa vie entre le ski l’hiver et la mer l’été.

Mars 2011, Bec des Rosses en Suisse, Aurélien Ducroz termine un « run » de ski rapide et maîtrisé. Il remporte l’Xtreme de Verbier, et est sacré champion du monde de freeride, un sport extrême, pour la deuxième fois après son titre de 2009. La même année, ce fils d’un guide de montagne et d’une monitrice de ski participe à sa première course à la voile, la Mini Transat, régate initiatique où les marins traversent l’Atlantique sur des monocoques de 6,5 m.

Pourtant, deux ans auparavant, Aurélien Ducroz ne connaissait encore rien au monde de la voile. Sa rencontre avec le skippeur Adrien Hardy, en 2007, marque est un tournant dans la vie du skieur. « Une attachée de presse m’a proposé d’être le parrain du bateau d’Adrien. Je ne connaissais rien à la voile mais j’ai accepté », se rappelle Aurélien Ducroz.

A cette époque, Adrien Hardy est engagé dans la Mini Transat. « J’ai suivi Adrien pendant deux ans. J’ai découvert ce milieu que je ne connaissais pas. Je me suis passionné pour la mer, et la course au large », se remémore Aurélien Ducroz. Une idée germe alors dans la tête du Chamoniard : vivre de ses deux passions, la montagne et la mer. En 2009, après son premier titre mondial, Aurélien Ducroz se lance dans l’aventure et crée le projet « Latitude Neige, Longitude Mer » avec l’objectif de participer à la Mini Transat 2011, entre La Rochelle et Salvador de Bahia au Brésil, via Madère, tout en poursuivant sa carrière de freerider. En 2010, il achète son Mini 6.50 et se qualifie pour la Mini Transat. Il ne la termine pas, obligé d’abandonner sur la deuxième partie de parcours. Mais ce n’est pas la fin du rêve.

« Dix ans de voile en dix jours »

Un rêve fait de rencontres. Après celle, fondatrice, avec Adrien Hardy, Aurélien Ducroz fait la connaissance d’autres marins : Sébastien Josse, Charles Caudrelier, Tanguy de Lamotte. Tous l’aident, le conseillent et participent à son apprentissage de la course au large. En 2013, il embarque en tant que mediaman (preneur d’images) avec François Gabart et Michel Desjoyeaux, sur la Rolex Fastnet Race. « J’ai navigué pendant dix jours avec François et Michel. J’ai appris dix ans de voile en dix jours. Ces marins m’ont passionné et ils m’ont tout donné. » Après le Mini 6.50, le champion de freeride poursuit sa formation en Class 40, un monocoque de douze mètres. En 2013, il termine quatrième de la Transat Jacques Vabre dans cette catégorie.

Marin du large, Aurélien Ducroz veut se défaire de son image de bizuth et apprendre ce qui lui manque, la régate au contact et sa technique. Pour cela, il s’adresse à une de ses connaissances, Laurent Voiron, un montagnard comme lui, mais avant tout champion du monde de catamaran Tornado (2002) et quatrième aux Jeux olympiques d’Athènes (2004) avec son équipier Olivier Backès. « Lorsque je leur ai parlé de mon projet et que je leur ai proposé de me former, ils ont tout de suite accepté », se rappelle Aurélien Ducroz.

Le trio participe à son premier Tour de France à la voile en 2015, à bord du Diam 24 La-France-du-Nord-au-Sud.fr. Cette année-là, les trois marins, faute de temps, ne naviguent que trois jours avant le début de l’épreuve. Ils se classent neuvièmes. « C’est un équipage brillant depuis le début, note Christophe Gaumont, directeur de course du Tour de France à la voile. « Ils ont été dans le coup dès le début et ils continuent à progresser. » En 2016, le trio revient à bord Team Coved et se classe quatrième.

Cap sur le Vendée Globe en 2020

« Aurélien est très bon marin, il apprend très vite », confie Olivier Backès, le barreur de Coved-Paprec et qui suit le skippeur depuis ses débuts en Diam 24. Une adaptation rapide certainement due aux parallèles qu’Aurélien Ducroz fait entre ses deux passions, deux sports de glisse. « Sébastien Josse m’a aussi bien conseillé : il m’a dit de penser comme en montagne, dans la manière de gérer, d’appréhender, d’anticiper le terrain. Je pense que j’ai gagné dix ans d’expérience grâce à la montagne », explique le champion de freeride, pour qui tout est question de trajectoire. « Pour moi, le ski alpin se rapproche de la régate, alors que le freeride est plus semblable à la course au large. »

Et Aurélien Ducroz montre cette année qu’il est un marin en constante progression. Après un premier acte compliqué, dans ce Tour de France 2017, et une quinzième place au général, lui et ses équipiers – Olivier Backès, Gurvan Bontemps et Guillaume Le Brec – n’ont cessé de grappiller des places, entrant en Super Finale à quatre reprises depuis Les Sables-d’Olonne. A la veille de l’ultime journée de régate, ils sont dixièmes au général.

Mais le rêve d’Aurélien Ducroz est de retourner au large et de participer au prochain Vendée Globe, en 2020. Première étape, cet automne, avec la Transat Jacques-Vabre en double avec le skippeur Romain Attanasio, quinzième du dernier Vendée Globe, à bord Famille-Mary-Etamine-du-Lys.