Une grande nouvelle pour Paris, mais surtout pour Saint-Denis ? Plus de vingt ans après la construction du Stade de France, la ville située au nord de la capitale pourrait connaître un nouveau coup d’accélérateur. L’attribution des Jeux olympiques de 2024 à Paris serait « un booster pour le développement de la ville », s’enthousiasme Suzanna de la Fuente, maire adjointe (Front de gauche) de la commune de Seine-Saint-Denis.

Ravagée par la désindustrialisation dans les années 1970, la zone de la Plaine, à cheval entre le sud de Saint-Denis, Aubervilliers et Saint-Ouen, avait en effet profité de l’arrivée du Stade de France (SDF) en 1997 : nouvelle gare RER, modernisation du quartier, construction de logements, développement de l’activité tertiaire… L’accueil des JO permettra de « sécuriser les délais concernant la construction de la gare du Grand Paris Express à Pleyel, et ainsi changer la vie de milliers d’habitants » assure Jacques Grossard, président de l’association Mémoire vivante de la Plaine. L’enfouissement de l’autoroute A1, qui traverse la ville, le prolongement de la ligne 8 du tramway, ou la nouvelle gare sont de nature à améliorer le quotidien et à décongestionner des transports saturés. La ville espère donc que les JO apporteront un élan supplémentaire, car le développement économique engendré par le SDF n’a pas eu tous les effets escomptés.

Effet inflationniste sur les prix de la pierre

Malgré l’arrivée de grandes entreprises, le taux de chômage ne baisse pas sur la Plaine (23,1 % en 2013, selon les derniers chiffres connus par l’Insee, contre 20 % pour le département). « L’époque où les entreprises venaient pour le bassin de main-d’œuvre est révolue, désormais elles s’implantent avec leurs salariés », commente l’acteur associatif. « Il y a une inadéquation entre les qualifications des résidents du quartier et les besoins des entreprises », admet Mme de la Fuente. Signe qu’en vingt ans le Stade de France a peu fait bouger les lignes, la population de la Plaine Saint-Denis comptait 15,6 % de cadres en 2013, contre 11 % en 1999.

Les JO permettront-ils d’inverser cette tendance ? Certes, le village olympique, qui doit s’installer à Pleyel au sud-ouest du quartier la Plaine, sera après les compétitions transformé en un écoquartier composé de 2 200 logements (dont 40 % de logements sociaux et 50 % d’accession libre) et de 900 appartements destinés aux étudiants.

Mais à quel prix ? L’arrivée de nouveaux transports et d’infrastructures a de fortes chances d’avoir un effet inflationniste sur les prix de la pierre. A l’horizon 2024, le mètre carré pourrait grimper de 30 %, estimait le réseau d’agence Guy Hoquet en juin 2017 dans Le Parisien.

« Accélérer la gentrification du quartier »

« Malgré la conversion d’une partie en logement social, les prix risquent d’être inaccessibles aux plus modestes, ce qui va accélérer la gentrification du quartier », prévient Frédéric Viale membre du collectif Non aux JO 2024 à Paris. « Si rien n’est fait, les Jeux risquent d’agrandir le fossé entre la Plaine Saint-Denis et le centre-ville », abonde M. Grossard.

Les habitants ne disent pas autre chose. « Evidemment les JO de 2024 peuvent être une belle fête. Encore faut-il que cela n’accentue pas la fracture sociale avec les autres quartiers de la ville et que tous les Dyonisiens en profitent », explique Macit, étudiant en sciences politiques.

Or, certains équipements construits à l’occasion des Jeux pourraient ne pas profiter à la population. Prévu pour faire face au manque de piscine dans le département, le centre aquatique, avec ses deux bassins de 50 mètres, « sera utilisé pour les grands événements sportifs mais ne sera pas ouvert aux enfants du quartier », prévient M. Viale. Face à la grogne, la ville tente actuellement de négocier pour que cette piscine soit ouverte aux scolaires et aux habitants. Et ainsi éviter que les JO laissent un goût amer aux Dyonisiens.