Les avocats de Murielle Bolle Me Jean-Paul Teissonière et Me Christophe Ballorin devant le tribunal de Dijon (Côte-d’Or), le 28 juillet. | JEAN-PHILIPPE KSIAZEK / AFP

Murielle Bolle va-t-elle retrouver la liberté ? La demande de ce témoin clé de l’affaire Grégory en 1984, aujourd’hui écroué, est examinée vendredi 4 août par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Dijon.

Agée de 48 ans, Mme Bolle a été mise en examen et placée en détention provisoire, le 29 juin pour enlèvement suivi de mort.

Adolescente à l’époque des faits, elle avait accusé son beau-frère Bernard Laroche du rapt du garçon de quatre ans retrouvé mort dans la rivière Vologne, avant de se rétracter.

Pour l’accusation, le revirement de la jeune fille de 15 ans s’explique par des violences familiales subies à l’époque. Le 4 juillet, la chambre de l’instruction avait ainsi décidé de la maintenir en prison en attendant notamment qu’une solution d’hébergement sans contact avec sa famille puisse être trouvée.

Un mois plus tard, « tous les éléments permettant sa remise en liberté sous contrôle judiciaire sont réunis », a déclaré à l’AFP Me Jean-Paul Teissonnière, l’un des conseils de Murielle Bolle, citant notamment une possibilité de résidence « très éloignée de sa famille ».

L’audience doit commencer à 9h30 devant la formation de trois magistrats présidée par Claire Barbier, qui est chargée du dossier. Face aux avocats de Mme Bolle, le parquet général plaide pour un maintien en détention.

Pressions

« J’ai pris des réquisitions écrites pour m’opposer à la demande de remise en liberté, essentiellement pour les nécessités de l’enquête et l’efficacité des actes à venir », avait déclaré mardi le procureur général, Jean-Jacques Bosc.

Selon le ministère public, si elle devait être remise en liberté, Murielle Bolle ne serait pas à l’abri de pressions, « compte tenu de ce qui s’est passé en 1984 ».

A l’époque, les toutes premières déclarations de l’adolescente de 15 ans n’avaient pas convaincu les gendarmes. Puis elle avait fini par dire qu’elle se trouvait dans la voiture de son beau-frère, passé prendre le petit Grégory Villemin le 16 octobre 1984, jour de sa mort, avant de le déposer, pensait-elle, chez des amis des parents de l’enfant.

Le 5 novembre 1984, Murielle Bolle avait répété ces déclarations devant le juge d’instruction, qui décidait en conséquence d’inculper et écrouer Bernard Laroche. Mais le lendemain, après une nuit en famille, elle était revenue avec sa mère pour se rétracter, disant avoir parlé sous la contrainte des gendarmes.

Son beau-frère avait été libéré début 1985, puis abattu moins de deux mois après par le père de Grégory, Jean-Marie Villemin, convaincu de sa culpabilité.

Contrôle judiciaire strict

Si les enquêteurs considéraient déjà comme établi que Murielle Bolle avait été « malmenée » par sa famille le soir du 5 novembre, un cousin de 54 ans est récemment venu apporter de l’eau à leur moulin. Témoignant pour la première fois, il a parlé de « lynchage » et affirmé que sa cousine lui avait confié ce soir-là avoir bel et bien assisté à l’enlèvement.

Mais lors d’une confrontation organisée il y a une semaine, les deux cousins sont restés sur leurs positions.

« Cela fait 32 ans qu’elle dit qu’elle n’a pas subi de violences de la part de sa famille, avec qui elle est en bons termes », a martelé jeudi Me Teissonnière.

Pour les avocats de Mme Bolle, les déclarations de ce cousin ne sont qu’un simple « recyclage d’informations tirées des médias ».

L’affaire Grégory avait été relancée de manière spectaculaire à la mi-juin avec l’arrestation de Marcel et Jacqueline Jacob, grand-oncle et grand-tante de Grégory, soupçonnés d’avoir joué les « corbeaux » de l’affaire, en envoyant une série de lettres anonymes très bien renseignées.

Mis en examen pour enlèvement et séquestration suivis de mort, les deux septuagénaires, jamais inquiétés jusqu’alors, avaient été remis quelques jours plus tard en liberté sous contrôle judiciaire strict : domiciliés séparément dans des lieux tenus secrets, avec notamment l’interdiction absolue de parler à la presse.

Selon ses avocats, Murielle Bolle, qui vit très mal sa détention provisoire, acceptera les conditions du contrôle judiciaire que pourrait imposer la chambre de l’instruction pour lui redonner sa liberté.