« Je parie que vous n’avez pas entendu parler de tout ce que le président a accompli cette semaine à cause de toutes ces “fake news”. » C’est le lancement choisi par la présentatrice — et belle-fille de Donald Trump –, dans l’émission diffusée dimanche 30 juillet sur la page Facebook du président américain. Le bandeau qui l’accompagnait annonce : « Watch here for REAL news ! » [« Pour avoir de vraies informations, regardez ici ! »]

Dans la vidéo, d’un peu plus de deux minutes, Lara Trump passe en revue les « exploits » de son beau-père, devant un fond où apparaît l’adresse de son site de campagne. Donald Trump a fait don d’une partie de son salaire, Donald Trump a inauguré une nouvelle usine dans le Wisconsin, Donald Trump se réjouit du retour de la croissance… Le tout avec le ton, plus ou moins maîtrisé, d’un véritable journal télévisé.

Le nouveau programme est passé relativement inaperçu jusqu’à ce que Buzzfeed en parle, notant que les médias traditionnels, censés cacher les réalisations de M. Trump, ont bel et bien rapporté les informations en question. Mais ils ont aussi consacré plus de temps au chaos en cours à la Maison Blanche, à l’incapacité des républicains à abroger l’Obamacare ou encore au tweet présidentiel selon lequel les personnes transgenres n’auront plus le droit de servir à l’armée.

Trump en guerre contre les médias « mainstream »

Peu importe pour l’animatrice Lara Trump, la femme d’Eric Trump, qui a été la productrice d’« Inside Edition », une émission diffusée sur la chaîne CBS. Mais elle fait surtout partie du cercle rapproché du président, de plus en plus exclusivement composé des membres de sa famille. Et ce n’est pas un hasard si on la retrouve aux commandes de la nouvelle arme présidentielle dans sa guerre sans relâche contre les organes de presse dits « mainstream ».

Dès le début de sa campagne présidentielle, et depuis son élection, Donald Trump met en scène sa haine pour les médias traditionnels qui critiquent sa politique. Une hostilité qui vire à l’obsession, comme l’ont montré Les Décodeurs du Monde : les médias sont les premières cibles de ses attaques en 140 caractères.

« L’article du défaillant@nytimes sur la transition est tellement complètement faux. Ça se passe sans incidents. Et, j’ai parlé à plusieurs dirigeants étrangers »

La rumeur sur la création d’une chaîne télévisée Trump circulait depuis la campagne présidentielle. Dès ses débuts, certains soutenaient l’idée selon laquelle Donald Trump se présentait uniquement pour faire la promotion d’un projet secret de chaîne concurrente à la conservatrice Fox News.

Son unique moyen de « faire entendre la vérité »

L’arrivée effective du milliardaire à la tête du pays a vite balayé cette théorie. Mais Donald Trump a effectivement déjà joué sur les deux tableaux. A l’occasion du troisième débat, il a accueilli sur sa page Facebook un programme monté par une société de production qui n’avait rien à envier à une émission de télévision.

Avec ses 35 millions d’abonnés sur Twitter et les 25 millions de personnes qui suivent son actualité sur Facebook, il privilégie les réseaux sociaux pour contourner les médias. Dans un tweet récent, le chef de l’Etat va jusqu’à affirmer qu’ils sont son unique moyen de « faire entendre la vérité ».

« Seuls les médias “fake news” et les ennemis de Trump veulent que j’arrête d’utiliser les réseaux sociaux (110 millions de personnes). La seule façon pour moi de faire entendre la vérité ! »

Il y a néanmoins une différence entre utiliser des outils numériques pour communiquer directement avec le public afin d’envoyer des messages politiques sans passer par le filtre journalistique et s’approprier la forme et le style d’un média d’information.

Cette confusion des genres, qui s’appuie sur la défiance croissante de la population envers les médias, n’est d’ailleurs pas spécifique aux Etats-Unis. En France, l’annonce du parti En marche !, qui souhaite se constituer en « média », va dans la même direction.