Armand Duplantis a bataillé dimanche pour se qualifier en finale du saut à la perche. / KIRILL KUDRYAVTSEV / AFP

Si vous avez l’intérêt sportif du genre chauvin, votre enthousiasme risque de se concentrer mardi 8 août au soir devant votre télévision sur Renaud Lavillenie. Le recordman du monde tentera de remporter le seul titre qui lui manque lors des Mondiaux de Londres. En poursuivant sur votre lancée, vous allez certainement aussi vibrer pour le fantasque et turbulent Mahiedine Mekhissi, aligné en finale du 3 000 m steeple, et pour le fantasque et un peu moins turbulent Pierre-Ambroise Bosse, en finale du 800 m. Mais comme il n’y a pas que des athlètes français dans la vie, c’est d’un très jeune perchiste américano-suédois que nous allons conter la courte histoire, qui ne demande qu’à s’allonger.

  • La story

Il était une fois Armand, un jeune garçon de Lafayette en Louisiane, né d’un père américain, Greg, et d’une mère suédoise, Helena. Greg Duplantis avait été un bon perchiste, qui avait franchi 5,80 m malgré une taille modeste que l’on croyait rédhibitoire à l’époque (moins de 1,70 m). Helena Hedlund, devenue Mme Duplantis, avait pratiqué à un haut niveau l’heptathlon et le volley. Avant Armand, son grand frère Andreas, également perchiste, avait représenté la Suède en 2009 aux Mondiaux cadets et en 2012 aux Mondiaux juniors, tandis que son autre frère Antoine excellait batte de baseball en main.

Dans le jardin de cette famille sportive américano-suédoise, aux origines cajun et nordique, un sautoir avait été installé. Dès l’âge de 4 ans, Armand se prit le plus naturellement du monde pour un acrobate. « Mondo a tenu une perche à un âge très jeune. Cela a été extrêmement naturel pour lui puisque c’était simplement comme jouer dans un jardin d’enfant », se souvient Greg Duplantis.

Raccourci spatio-temporel, treize ans plus tard, ce même Armand Duplantis est sur le point de devenir ce soir à Londres, à 17 ans et 271 jours, le plus jeune perchiste à participer à une finale mondiale. Il détrône ainsi Sergueï Bubka, qui disputa et remporta son premier championnat du monde à l’âge de 19 ans et 253 jours, en 1983.

Ancien entraîneur de Renaud Lavillenie, Damien Inocencio a suivi au premier rang l’éclosion du prodige par un curieux hasard. « Ma femme [Marie Poissonnier, championne de France 2002] était partie effectuer un stage aux Etats-Unis après les JO de Sydney, en 2001. Elle a vécu deux mois dans la famille Duplantis, à Lafayette. Mondo n’avait que deux ans et c’était un gamin rigolo, qui planquait ses petites figurines d’enfant dans le lecteur VHS », raconte-t-il.

Depuis ce séjour, le couple est toujours resté en contact avec la famille, lui envoyant une bouteille de vin chaque année. Ils ont regardé les premières vidéos de Mondo sautant à la perche, sa première perche cassée. « Il a ce feeling, il aime et sent la perche. Ses parents ne l’ont jamais poussé », ajoute Damien Inocencio. Son sérieux et son implication ne l’empêchent pas de s’amuser et de faire l’idiot comme un adolescent de son âge (comme sauter à la perche en hoverboard).

Mondo Hover board 10ft

Toujours est-il que Mondo n’a cessé de progresser et d’être en avance sur son âge. A 10 ans, il sautait 3,86 m, soit au-dessus des meilleures performances mondiales de garçons âgés de 11 et 12 ans. A 15 ans, il remportait les Mondiaux cadets grâce à un saut à 5,30 m. L’année suivante, à 16 ans, il prenait la troisième place des Mondiaux juniors (5,45 m) contre des adversaires plus vieux de deux ou trois ans. « Il ne s’est mis vraiment beaucoup et sérieusement à la perche qu’en novembre dernier. J’ai échangé avec Greg pour donner des conseils techniques. Cet hiver, j’ai vu qu’il faisait des choses qui valaient statistiquement largement plus de 5,80 m d’ici à six mois », lance Damien Inocencio.

Le 1er avril, lors des Texas Relays, Mondo bat le record du monde junior (et le record national de Suède) avec un saut à 5,90 m… « Il est déjà à un haut niveau avec cette performance. Je pense qu’il peut, l’an prochain ou l’année d’après, franchir les 6 mètres, ce qui est le super-haut niveau », prédit son père, Greg Duplantis. « Il est rapide et possède des qualités d’impulsion. Mais, il n’est pas un monstre physiquement et a beaucoup de points techniques à travailler. Il va encore progresser », analyse Damien Inocencio.

Cette année, il a participé honorablement à ses premiers meetings de Diamond League, rencontrant Renaud Lavillenie. « Renaud a toujours été et est encore son perchiste favori. Je pense qu’il a visionné plus de cent heures de ses sauts. Son saut est d’ailleurs un mélange de Renaud et de son propre style », livre Greg Duplantis. Comment ne pas faire le parallèle entre les deux perchistes, qui ont treize ans d’écart : gabarit modeste (1,80 pour Duplantis, 1,76 pour Lavillenie), sautoir installé dans le jardin et un talent évident.

Une chose les sépare cependant, la précocité. Au même âge, Renaud Lavillenie ne sautait que 4,80 m. Quand on sait qu’un perchiste arrive à maturité à 28 ans, la question du record du monde se pose forcément pour Duplantis. « C’est impossible bien sûr de prédire son évolution, mais s’il reste en bonne santé et qu’il poursuit sa progression naturelle, il a une chance de se mesurer au record du monde », assure Greg Duplantis. Et de porter le record du monde vers de nouveaux sommets.

Workout Wednesday Mondo Duplantis Pole Vault Training

  • Hors piste

Renaud Lavillenie ou l’art d’illustrer son message. Il regarde, son visage est tourné, on en déduit donc bien, malgré les lunettes de soleil, qu’il a le regard tourné vers la finale. Pour sa cinquième participation, et après quatre échecs, le perchiste français ne veut se mettre aucune pression. Espérons tout de même qu’il enlève les lunettes ce soir sur le sautoir.

« Améliorer vos performances. » Abonnez-vous. La régie publicitaire du Times est plutôt réactive. En plus d’être hué par tout un stade, Justin Gatlin est transformé « à l’insu de son plein gré », comme dirait Richard Virenque, en homme-sandwich pour le prestigieux journal. Samedi, le sprinteur américain tentera une nouvelle fois d’énerver le public en battant le relais jamaïcain d’Usain Bolt avec ses camarades de l’équipe des Etats-Unis.

La rubrique « hors piste » se doit d’aller sur tous les terrains, même les plus glissants. Le forfait hier sur 200 m du Botswanais Isaac Makwala a braqué la lumière sur une épidémie de gastro-entérite dans l’un des hôtels officiels de la compétition. Des athlètes canadiens et un irlandais ont été malades. Les organisateurs ont publié un communiqué pour signaler qu’ils collaboraient avec la santé publique anglaise pour combattre ce virus handicapant.

Makwala a préféré parler d’intoxication alimentaire. Pudeur de gazelle.

  • En piste

19 h 20 : finale du lancer du javelot féminin

19 h 35 : finale du saut à la perche masculin

21 h 10 : finale du 3000 m steeple masculin

21 h 35 : finale du 800 m masculin

21 h 50 : finale du 400 m masculin