Les affrontements entre la police et les manifestants de l’opposition sont fréquents dans les rues de Caracas. / RONALDO SCHEMIDT / AFP

La condamnation s’ajoute aux multiples critiques internationales qui visent déjà le Venezuela. L’Organisation des nations unies (ONU) a de nouveau condamné mardi 8 août « l’usage excessif de la force » et a accusé les forces de sécurité vénézuéliennes d’avoir causé la mort d’au moins quarante-six manifestants antigouvernementaux. Une trentaine d’autres morts serait imputée à des groupes armés progouvernementaux, qui circulent à moto en brandissant des armes à feu.

« Depuis le début des manifestations, en avril, on constate une tendance évidente à l’usage excessif de la force à l’encontre des manifestants, a déclaré dans un communiqué le haut-commissaire aux droits humains, Zeid Ra’ad Al-Hussein. Plusieurs milliers de personnes ont été placées en détention arbitraire, beaucoup auraient été victimes de mauvais traitements et même de torture. »

L’enquête n’a pas pu être menée sur place, les autorités vénézuéliennes ayant refusé l’accès du pays aux enquêteurs de l’ONU. Mais M. Zeid a chargé une équipe de spécialistes des droits humains d’interviewer à distance cent trente-cinq victimes et leurs familles, ainsi que des témoins, des journalistes, des avocats, des médecins, et des membres du bureau de la procureure générale.

« Ces violations se produisent alors même que s’effondre l’Etat de droit au Venezuela, dans un climat d’attaques constantes du gouvernement contre l’Assemblée nationale et contre la procureure générale. Les responsables gouvernementaux les plus haut placés sont responsables des violations des droits enregistrées par nos services ».

Des actes de torture

Aucun chiffre officiel ne permet d’établir le nombre de personnes détenues. Mais « des estimations fiables suggèrent qu’entre le 1er avril, date à laquelle ont commencé les manifestations de masse, et le 31 juillet, plus de 5 051 personnes ont été placées en détention arbitraire », écrit le haut-commissariat. Plus de mille personnes seraient encore en détention.

Au-delà des détentions arbitraires figurent des crimes imprescriptibles comme la torture. Le député Rosmit Mantilla a passé deux ans et demi en prison. Il a raconté au Monde ce qu’il a subi, vu et entendu pendant son incarcération :

« Les décharges électriques, les suspensions prolongées par les mains ou les pieds, les sodomies avec des bâtons, le chantage et les tortures psychologiques sont systématiques. Il s’agit d’une politique d’Etat. El Hélicoïde, le siège de la police politique à Caracas, est le plus grand centre de torture d’Amérique latine. »

Plusieurs rapports crédibles confirment ces accusations, faisant également état d’asphyxie au gaz et de menaces de mort à l’encontre des détenus ou de leurs familles.

Le haut-commissaire a exhorté les autorités de Caracas à « stopper sans délai tout recours excessif à la force contre les manifestants, à mettre un terme aux détentions arbitraires et à libérer toutes les personnes détenues arbitrairement ».

Mardi, la Cour suprême du Venezuela a annoncé la condamnation à quinze mois de prison de Ramon Muchacho, maire du district de Chacao, dans l’est de Caracas, bastion de l’opposition.