Brigitte et Emmanuel Macron, à l’Elysée, le 25 juillet 2017. / Julien de Rosa / AP

Le poujadisme de comptoir a donc trouvé un nouvel os à ronger pour apaiser sa hargne contre les puissants, à commencer par le plus exposé d’entre eux, le président de la République. En quelques jours, quelque 300 000 signataires ont apporté leur soutien à une pétition en ligne dénonçant l’éventuelle instauration d’un statut de « première dame » pour l’épouse du chef de l’Etat.

Emmanuel Macron s’est engagé à préciser la nature du rôle public exercé par la femme ou compagne du président.

Lors de la campagne électorale, Emmanuel Macron avait en effet annoncé son intention de sortir du clair-obscur où se trouve placée la femme du président depuis le début de la Ve République, exposée au premier rang des dîners et visites d’Etat, puis reléguée dans l’ombre le reste du temps.

Qualifiant à juste titre cette situation d’« hypocrisie française » – et il aurait pu ajouter d’archaïsme –, le candidat Macron souhaitait « définir le cadre » du « rôle public » que serait amenée à jouer son épouse, Brigitte.

Inélégant et de mauvaise foi

C’est ce projet que les pétitionnaires jugent inacceptable. Rebondissant sur la proposition (écartée) d’un député de La France insoumise, lors du débat parlementaire sur la loi de moralisation de la vie politique, ils estiment qu’il n’y a aucune raison d’accorder un budget sur les fonds publics à l’épouse du chef de l’Etat : « On demande aux députés et sénateurs de ne pas employer leur épouse, mais on fait une exception pour la femme d’Emmanuel Macron. C’est contradictoire », soutiennent-ils. C’est leur droit. Mais c’est inélégant, de mauvaise foi et rétrograde.

Il est effectivement peu glorieux de s’en prendre à la femme de quelqu’un pour mieux atteindre son mari. Mais il est vrai que l’élégance en politique n’est pas la vertu la mieux partagée… Il est en revanche d’évidente mauvaise foi d’étendre au président de la République l’interdiction désormais faite aux ministres, parlementaires et responsables d’exécutifs locaux d’employer comme collaborateur un membre de leur famille.

Il serait paradoxal – et humiliant – qu’en 2017 l’épouse du chef de l’Etat soit renvoyée au rôle de « potiche ».

Emmanuel Macron avait clairement affirmé, durant sa campagne, qu’il ne saurait être question de rémunérer son épouse. Il ne s’agit donc pas d’un « emploi familial ». Mais de préciser la nature du rôle public que la femme ou compagne du président exerce inévitablement auprès de lui.

Avec plus ou moins de bonheur, toutes les devancières de Mme Macron se sont pliées à ces obligations officielles. Toutes se sont efforcées de mieux trouver leur place en menant, en outre, une action humanitaire ou caritative, depuis la fondation pour les enfants handicapés d’Yvonne de Gaulle à la lutte contre l’illettrisme menée par Carla Bruni-Sarkozy, en passant par la Fondation France Libertés de Danielle Mitterrand ou la Fondation Hôpitaux de Paris-Hôpitaux de France de Bernadette Chirac.

Davantage de transparence

Toutes enfin, depuis Mme Giscard d’Estaing, ont bénéficié pour cela d’un cabinet de quelques personnes à l’Elysée. C’est ce rôle et ces moyens que le chef de l’Etat entend, à juste titre, rendre plus explicite et plus transparent.

Enfin, la croisade engagée contre la « première dame » est pour le moins rétrograde. Car il serait paradoxal – et passablement humiliant – qu’en 2017 l’épouse du chef de l’Etat soit renvoyée au rôle de « potiche » (le mot est de Valérie Trierweiler, ex-compagne de François Hollande), qui fut, bon gré mal gré, celui des femmes de président depuis des lustres.

Vouloir les cantonner dans la fonction de maîtresse de maison à l’Elysée et de dame d’œuvre à l’extérieur relève bien d’un stupéfiant archaïsme.