Au terme d’un long calvaire, Air Berlin a finalement déposé son bilan, mardi 15 août. L’ironie a voulu que la compagnie, qui avait fait fortune avec ses liaisons vers ­Majorque, destination populaire en Allemagne, termine sa course au milieu de l’été. Pour éviter de gâcher les vacances de milliers d’Allemands à six semaines des élections, Berlin a accordé à la compagnie un prêt d’urgence pour maintenir le trafic pour trois mois et tenter de trouver un ­repreneur.

C’est l’actionnaire principal, la compagnie d’Abou Dhabi, Etihad, propriétaire de 30 % du capital, qui a donné le coup de grâce. En refusant, mercredi 9 août, d’accorder à la deuxième compagnie allemande un versement de 50 millions d’euros, elle ne lui a laissé aucune autre échappatoire que le dépôt de bilan. Air Berlin, s’est justifié Etihad, a manqué les objectifs qu’elle s’était elle-même fixés. Plus largement, la stratégie de la compagnie arabe de multiplier les partenariats européens a échoué. Alitalia, sa deuxième plus grosse participation, a également fait faillite.

Un prêt d’urgence pour sauver les meubles

La compagnie allemande accumulait les déficits depuis des années. Elle a accusé, en 2016, une perte opérationnelle record de 667 millions d’euros. Le déclin était devenu évident en 2013 : l’entreprise, qui avait affiché, en 2012, le chiffre d’affaires le plus important de son histoire, à 4,3 milliards d’euros, n’avait été capable de dégager qu’un bénéfice minime, à 7 millions d’euros.

Après cette date, Air Berlin a vu sa situation financière se dégrader rapidement, en même temps que son chiffre d’affaires. En 2016, il est repassé sous son niveau de 2010, à 3,8 milliards d’euros. Les efforts de redressement entrepris se sont finalement brisés en mars : le changement de prestataire de services au sol, le nouveau étant apparemment dépassé par la charge de travail, a entraîné une multiplication des retards et des annulations de vols. La situation était devenue intenable.

Mardi, le ministère de l’économie a annoncé qu’un prêt d’urgence de 150 millions d’euros avait été accordé à Air Berlin, assorti d’une garantie d’Etat. Cet argent permet à la compagnie de maintenir ses vols ces trois prochains mois. Un temps précieux pour tenter de sauver les meubles : après une faillite, les droits de trafic sont normalement remis sur le marché. Sans aide de l’Etat, ils auraient rapidement été rachetés par une compagnie concurrente, qui n’aurait sans doute pas repris les salariés laissés au chômage.

« Les emplois chez Ryanair ne sont pas une solution  »

Or, 8 500 personnes travaillent pour Air Berlin, dont 7 200 en Allemagne. Un plan social de cette ampleur à six semaines des élections n’était pas tenable pour le ministère de l’économie, dirigé par le Parti social-démocrate. Le syndicat IGL, qui représente les salariés de la compagnie, a immédiatement salué la décision, de même que le syndicat des pilotes Cockpit. « Les emplois chez Ryanair ne sont pas une solution pour le pays et pour les gens », a déclaré Nicoley Baublies, syndicaliste chez IGL.

Le sauveur pourrait être Lufthansa, qui a déjà déclaré son intention de reprendre certaines des activités d’Air Berlin. Il a exclu une reprise complète de la compagnie, arguant de son haut niveau d’endettement, mais il pourrait se porter acquéreur des liaisons longue distance, incluant le personnel concerné.

« Nous savons que des négociations sont actuellement en cours entre Air Berlin et Lufthansa, a déclaré la ministre de l’économie, Brigitte Zypries, mardi, à Berlin. Elles se déroulent de façon encourageante et pourraient aboutir dans les prochains mois. » Deux autres compagnies pourraient également entrer en négociation, a déclaré le ministre des transports, Alexander Dobrindt, au quotidien Handelsblatt, sans donner plus de précisions.