Donald Trump s’exprimait depuis la base militaire de Fort Myers, non loin de Washington. / JOSHUA ROBERTS / REUTERS

Le jour de son investiture à Washington, le 20 janvier, Donald Trump avait proclamé devant ses sympathisants que dorénavant, c’était « l’Amérique d’abord ». Autrement dit, le pays ne s’aventurerait plus à l’étranger. Après sept mois à la Maison Blanche, le 45e président américain a dû, comme l’écrit le Washington Post, « s’incliner devant la réalité » sur le sujet afghan.

Lundi 21 août, sur la base militaire de Fort Myer en Virginie, M. Trump a confirmé que les Etats-Unis poursuivraient bien leur effort en Afghanistan. Avant même de faire campagne, le milliardaire militait pourtant pour un retrait rapide de son pays, critiquant l’argent et le sang perdus dans le conflit. Depuis le début de la guerre, à l’automne 2001, 2 400 soldats américains et 31 000 civils afghans ont trouvé la mort. En seize ans, les Etats-Unis ont versé plus de 110 milliards de dollars (93 milliards d’euros) d’aide à la reconstruction.

« Mon instinct initial était le retrait, et historiquement, j’aime suivre mon instinct, a déclaré Donald Trump. Mais toute ma vie, j’ai entendu que les décisions sont bien différentes une fois dans le bureau Ovale. »

Jusqu’à 3 900 soldats supplémentaires

A Camp David, vendredi, le président américain a passé de longues heures à analyser la situation en compagnie de son ministre de la défense, le général James Mattis – qui a servi en Afghanistan –, son conseiller à la sécurité nationale, H. R. McMaster – ancien chef des forces armées sur place –, et son secrétaire à la Maison Blanche, John Kelly, dont le fils fait partie des victimes du conflit.

« George W. Bush et Barack Obama ont découvert que l’Afghanistan était un conflit qu’ils ne parviendraient pas à gagner mais qu’ils ne pouvaient pas se permettre de perdre. Donald Trump est en train d’apprendre la même difficile leçon », commente USA Today.

Si les Etats-Unis retirent les quelque 8 000 hommes et femmes qu’il possèdent sur place (contre 100 000 au plus fort de la guerre), le risque de voir le fragile régime démocratique en place renversé par les talibans est grand. Un retrait créerait un « vide » qui profiterait aux « terroristes », a justifié le chef de l’Etat qui s’oriente plutôt vers l’envoi de troupes supplémentaires, jusqu’à 3 900 selon plusieurs médias américains.

« Nous ne parlerons pas du nombre de soldats » car « les ennemis de l’Amérique ne doivent jamais connaître nos projets », a-t-il éludé. « Les conditions sur le terrain, pas des calendriers arbitraires, guideront nos stratégies à partir de maintenant. Je ne dirai pas quand nous allons attaquer mais nous attaquerons », a promis Donals Trump dans une allusion à Barack Obama qui avait fixé une date au départ des troupes avant de se raviser.

Le président américain a collé au prompteur pour ce discours diffusé en direct à la télévision. / JOSHUA ROBERTS / REUTERS

Le Pakistan sous pression

« Notre engagement n’est pas illimité, a toutefois insisté M. Trump dans un message à Kaboul. Notre soutien n’est pas un chèque en blanc. Le peuple américain attend de voir des véritables réformes et de vrais résultats. »

Le discours, fidèle au prompteur, a également mis la pression sur le voisin pakistanais. « Les Etats-Unis ne peuvent pas rester silencieux plus longtemps sur les refuges » [que ce pays] offre aux terroristes, a prévenu le président américain. « Le Pakistan a beaucoup à gagner en se joignant à nos efforts en Afghanistan. Il a beaucoup à perdre en continuant à accueillir des terroristes », a-t-il menacé.

Paul Ryan et John McCain, deux figures du Parti républicain qui ne sont pas toujours en accord avec les prises de position de M. Trump, ont salué la stratégie adoptée par la Maison Blanche. Le sénateur libertarien du Kentucky Rand Paul, opposant à la guerre en Afghanistan, a jugé que c’était « une idée terrible d’envoyer plus de troupes ».

Les talibans, de leur côté, n’ont pas paru impressionnés. Dans un communiqué, ils ont critiqué un discours « vieux et peu clair ».

Mais ce sont ses supporters les plus fidèles que Donald Trump devra d’abord convaincre. Ceux qui ont applaudi « America First » dans le froid de janvier à Washington et qui comprennent que la guerre la plus longue de l’histoire de leur pays n’est pas près de s’arrêter.