C’est le projet d’aménagement urbain le plus important de Ouagadougou : créer, en périphérie de la capitale du Burkina Faso, trois nouveaux centres-villes. Les travaux de la deuxième phase du Projet de développement durable de Ouagadougou (PDDO 2) devraient démarrer l’an prochain. Quelque 80 millions d’euros injectés par l’Agence française de développement (AFD, partenaire du Monde Afrique) pendant cinq ans vont permettre de créer les infrastructures sanitaires, sociales, culturelles et sportives dont manquent cruellement les quartiers de Tampouy, du Grand Est et de Katre Yaar.

Boureima Kaboré est le directeur des études, de la programmation et des investissements à la mairie de Ouagadougou. Pour le coordonnateur du PDDO 2, ce projet contribue à résoudre un problème auquel doivent faire face la plupart des capitales africaines : comment désamorcer la bombe démographique qui est le sur point de faire exploser les villes ?

Présentation de notre série : L’Afrique en villes

En matière de gestion urbaine, à Ouagadougou, il y avait urgence ?

Boureima Kaboré Oui, toutes les études le démontrent. En trente ans, la superficie de la capitale a été multipliée par quatre. En 1987, Ouagadougou s’étalait sur 14 000 hectares. Aujourd’hui, la ville fait 52 000 hectares. C’est énorme !

Comment l’expliquer ?

Cet étalement est dû à l’urbanisation massive. En l’espace de dix ans, la population est passée de 1,5 million à plus de 2 millions d’habitants. En 2030, on estime qu’elle pourrait atteindre les 6 millions. Au fur et à mesure, les Burkinabés qui souhaitaient vivre en ville se sont installés dans les quartiers périphériques et Ouaga a grandi. Aujourd’hui, ces quartiers sont surpeuplés : 80 % des Ouagalais y vivent, alors que 90 % des infrastructures publiques, qu’elles soient sanitaires, scolaires ou culturelles, sont situées au centre-ville. Ouaga, c’est tout dans le centre-ville et rien dans les autres quartiers, à l’inverse d’autres capitales africaines comme Abidjan, par exemple. Il fallait que ça change.

Quel a été le déclic ?

Les bouchons. Dans les années 1990, il n’y en avait pas. A partir de cette période, on a commencé à faire du surplace. Alors on s’est posé une question : pourquoi on ne connaissait pas ça avant ? Parce que c’est à cette période que la décentralisation a démarré. A partir de 1987, les quartiers centraux ont commencé se dépeupler. La population augmentait et la capacité de logement n’était pas suffisante. L’Etat a donc donné aux enfants nés dans les quartiers centraux, historiques, des parcelles situées en périphérie. C’est comme ça que le centre-ville a pris sa fonction essentiellement économique et commerciale qu’il continue d’avoir aujourd’hui.

La contrepartie, c’est que les habitants de ces quartiers périphériques doivent parcourir de longues distances pour accéder aux services de base…

Oui, c’est cela qui crée les embouteillages et, surtout, cela complique leur quotidien. Dans le Grand Est, il n’y a pas de lycée public. Chaque matin, tous les enfants sont contraints de faire des kilomètres et des kilomètres pour se rendre au centre-ville. Avec le PDDO 2, qui prévoit la construction de trois lycées, tout ça va changer.

Pourquoi avoir choisi ces trois quartiers pour abriter les futurs centres-villes secondaires ?

Grand Est, Tampouy et Katre Yaar sont les centralités les plus denses de Ouagadougou : 1,2 million de Burkinabés y vivent. Il y avait urgence. Mais ce n’est qu’un début. Au total, la mairie a identifié sept pôles urbains qui deviendront tous, à terme, des centres-villes secondaires. On pense déjà au PDDO 3 !

Le sommaire de notre série « L’Afrique en villes »

Cet été, Le Monde Afrique propose une série de reportages dans seize villes, de Kinshasa jusqu’à Tanger.